Censure

Moussa Dadis Camara : Entre le marteau et l’enclume (opinion)

Lorsque dans un Etat la vie socio-économique connaît une léthargie prolongée le terrain est propice pour un coup de force sous l’instigation de civils ou de militaires, mais plus généralement ce sont ces derniers qui prennent le devant avantagés qu’ils sont par la discipline et les armes dont ils disposent. C’est ce qui est arrivé en 2008 en Guinée quand le général Lansana Conté est mort suite à une longue maladie et après deux décennies de gestion calamiteuse du pays.

La junte qui prend le pouvoir a à sa tête le capitaine Moussa Dadis Camara inconnu du grand public. Il ne met pas beaucoup de temps pour étaler au grand jour ce qu’il est et ce qu’il vaut. Un exalté qui prend plaisir à s’exhiber en parfait profane des arcanes de la politique, un inculte qui se rit du savoir, de la langue et des usages mondains. Il nourrit très tôt une soif inextinguible  pour le pouvoir, soif qui le mène rapidement à l’irréparable, la répression sanglante d’une manifestation pacifique de l’opposition : plus de 150 morts au Stade du 28 septembre en 2009. Tout le monde découvre subitement en Guinée et à l’extérieur que ce n’est pas l’homme qu’il fallait pour une transition paisible et démocratique.

Un incident survient entre-temps entre le capitaine-président et son aide de camp, une bale l’atteint à la tête qui occasionne une évacuation d’urgence dans un hôpital militaire du Maroc. Un intérim s’organise aussitôt qui se conclut plus tard à Ouagadougou (Burkina Faso) sous la supervision des forces vives de la Guinée et des émissaires de la communauté internationale. En fait, de source bien informée, c’est la France et les Etats-Unis qui ont décidé de l’exil forcé de Dadis, ils ont chargé Blaise Compaoré de gérer cet exil.

Maintenant que l’hôte de Dadis est chassé du pouvoir par son peuple, les gens s’interrogent sur ce que deviendra l’exilé de Ouaga. Les Guinéens sont partagés entre ceux qui souhaitent qu’il revienne au pays et ceux qui espèrent le voir prendre le chemin de La Haye. Moussa Dadis lui-même, sans pouvoir l’affirmer publiquement, c’est qu’il est entre le marteau et l’enclume. Il ne peut en aucune manière envisager de rentrer en Guinée où le régime en place le traite en persona non grata. Même pour organiser les obsèques de sa défunte mère en avril 2013 en Guinée forestière de laborieuses tractations n’avaient pas réussi à le faire transiter par Conakry pour prendre le corps de sa mère, un chemin de détour lui a été imposé : Ouaga-Monrovia-N’Zérékoré (aller et retour).²²²²²

Il ne reste à Dadis que d’attendre patiemment le jour où il devra répondre à son interpellation par la Cour Pénale Internationale. Et au cas où sa culpabilité serait établie, mieux vaudrait pour lui de passer le restant de sa vie dans une prison dorée, comme Charles Taylor, que de mourir à petit feu dans une sordide geôle de Guinée. Pauvre Dadis !

In Le Démocrate, partenaire de guinee7.com

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