Censure

Boké : Aveu d’impuissance du gouvernement

Deux morts, de nombreux blessés, des pillages de biens publics et privés. Les forces de l’ordre ont été retirées de la ville de Boké donnant libre cours à des personnes qui vandalisent, terrorisent, sous prétexte qu’elles revendiquent le courant électrique. Autant dire que dans la ville minière-qui doit cependant au maximum être sécurisée compte tenu du fait qu’elle attire les investisseurs étrangers-, l’Etat a foutu le camp. Et son autorité avec. En témoigne cet appel ‘‘pathétique’’ (sic) de Bouréma Condé, ministre de l’Administration du Territoire.

Les bureaux et locaux de la gendarmerie départementale ont été vandalisés, des archives brulées, des armes et minutions emportées, y compris le ravitaillement de la troupe, plusieurs gendarmes et policiers sont blessés au cours des affrontements, malgré la présence de  renfort, la situation est demeurée de plus en plus grave

‘‘Mesdames et messieurs, citoyens et citoyennes de Guinée, depuis le 12 septembre 2017, la ville de Boké, ville minière par excellence est sous le coup de manifestations, suite à une panne intervenue sur le premier groupe électrique de la centrale électrique de la ville de Boké et ce même jour aux environs de 20h, toutes les rues de Boké ont été prises d’assaut, jonchées de barricades et par endroit des pneus enflammés sur le bitume. Le lendemain le 13 septembre 2017, la série de violence a commencé à se manifester dans la matinée. Les barricades et les violences se sont multipliées en ville et environs. Le siège du gouvernorat a été violenté par des jets de projectiles, qui ont cassé plusieurs vitres du bloc administratif. Faut-il rappeler que ce bloc est la première infrastructure, des infrastructures faites à Boké par le biais des fêtes tournantes instaurées par le chef de l’Etat dès son accession à la magistrature suprême de notre pays. N’eut été l’intervention rapide de la CMIS, le bloc administratif aurait été mis à sac, au regard de l’ampleur des manifestations qui prenaient de l’allure, de convulsions sociales dangereuses, les autorités administratives ont sollicité l’envoi d’un renfort de force de sécurité, l’objectif étant de sécuriser les édifices publics, les personnes et leurs biens, les expatriés et autres installations des sociétés minières. Les bureaux et locaux de la gendarmerie départementale ont été vandalisés, des archives brûlées, des armes et minutions emportées, y compris le ravitaillement de la troupe, plusieurs gendarmes et policiers sont blessés au cours des affrontements, malgré la présence de ce renfort, la situation est demeurée de plus en plus grave, plusieurs véhicules sont endommagés, dont les véhicules de commandement du gouverneur de région et celui de monsieur le préfet’’.

les manifestants, déterminés dans la virulence de leur manœuvre de destruction

‘‘Pendant ce temps les techniciens de EDG s’activaient tant bien que mal sur le groupe en panne afin qu’ils puissent être dépannés ce, jusqu’aux environs de 1h du matin. Malheureusement, pendant que cette première panne était en train d’être jugulée, une seconde panne sur le régulateur de tension est survenue, aggravant la situation d’espoir suscité, les travaux de dépannage se sont intensifiés pour la mise en marche d’un groupe loué par EDG, lequel devait assurer le relais, au même moment des efforts sont déployés pour la remise en état du premier groupe objet de la panne. Ceci nous amène donc à la matinée du 14 septembre 2017, ce jour-là, la conjonction des efforts des différentes équipes des forces de l’ordre continue à en découdre avec les manifestants, déterminés dans la virulence de leur manœuvre de destruction. En début d’après-midi, un premier calme précaire a commencé à revenir progressivement, une équipe de techniciens en provenance de Kamsar  est attendue pour appuyer celle déjà en place, le régulateur de tension du groupe en panne est obtenu à Conakry et pendant que ces évènements se passaient donc, ce régulateur était en train d’être acheminé vers Boké. Le gouverneur de région et le préfet de Boké ont reçu plusieurs responsables et des personnes ressources pour que des voies et moyens de retour au calme, puissent être obtenus et donc beaucoup de citoyens se sont prêtés comme étant des négociateurs de bons offices’’.

les manifestants se sont rendus maitres de la ville en érigeant à nouveau les barricades qui avaient été dégagés des voies publiques, diluant ainsi dans le néant les promesses de la notabilité

‘‘La journée du 15 septembre, une réunion d’importance est organisée au niveau de la commission de crise, avec une délégation de la notabilité sur la requête de cette dernière et ceci c’était autour de l’organisation des meetings par la notabilité de Boké à travers notamment le grand imam de la mosquée centrale. L’objet devait naturellement porté sur les thèmes de prêche du vendredi qui venaient, pour le renforcement de la paix, de la quiétude et la cessation des actes de vandalisme. Face à cette initiative que les autorités ont salué, mais qu’elles ont trouvé inappropriée à tenir dans un contexte surchauffé dans un lieu public, l’autorité à conseiller sa tenue à la grande mosquée, ce qui fut accepté par les initiateurs. La notabilité a sollicité en même temps, le repli des agents de sécurité dans leurs cantonnements, ce qui fut également accepté pour la bonne collaboration et la synergie pour une gestion concertée de la crise, consécutivement donc au repli des agents de la sécurité, les manifestants se sont rendus maitres de la ville en érigeant à nouveau les barricades qui avaient été dégagés des voies publiques, diluant ainsi dans le néant les promesses de la notabilité. On déplore, suite à ces évènements graves à Boké, des cas de décès que le président de la République, le Professeur Alpha Condé a fortement déploré, et a instruit à monsieur le Premier Ministre, chef du gouvernement, que soit prise de façon diligente des mesures  amenant à faire toute la lumière sur ces deux cas de décès et que ces éventuels coupables répondent devant la loi. Parallèlement à ces deux cas que tout le peuple Guinée déplore sur les pas du chef de l’Etat, le bilan des préjudices causés par les manifestants est ahurissant, on dénombre en effet 14 gendarmes blessés, 7 policiers, 56 civiles, 3 évacués à l’hôpital de Kamsar, des magasins pillés, deux camions de la gendarmerie nationale brulés, la compagnie de la gendarmerie départementale de Boké a eu également ses locaux brulés, 2 pickups calcinés, trois motos brulées, des archives brulées également, le marché central de Boké pillé, 2 conteneurs défoncés, le village communautaire de Boké, encore une des infrastructures de la célébration de la première fête tournante vandalisé. Le bloc administratif régional saccagé. Il faut noter également l’immobilisation des centaines de véhicules en provenance de la Guinée-Bissau et de la Gambie voisine et leurs passagers rançonnés par certains manifestants, notons également que les domiciles des agents de sécurité, logeant dans les quartiers sont vandalisés, leurs familles pourchassées, le train de la CBG bloqué et la gare saccagée, l’empêchement également des techniciens de EDG de procéder à des réparations sur le groupe défectueux’’.

Mesdames et messieurs, nonobstant ce qui précède. A l’heure où j’interviens ici dans les studios de la RTG (samedi 16 septembre, NDLR) trois groupes électrogènes, donc deux de 2,5 mégawatts et un de 1 mégawatts sont en train d’être acheminés sous bonne escorte à Boké, ils viendront s’ajouter à deux autres groupes de 1 mégawatt chacun, rendant ainsi dans les brefs délais, la fourniture du courant effective à Boké.

cet appel pathétique est celui de M. le Président de la République

Quelles leçons tirer de ce qui précède ? Oui les Guinéens ont besoin de services sociaux essentiels, l’eau, l’électricité. Mais faut-il que nous sachions face à certains problèmes qui ne sont pas de la volonté des humains que nous sommes, car la panne d’un groupe électrogène peut intervenir à tout moment. Le plus dure et le plus amère serait peut-être de ne pas faire face à cette panne. Mais quand des efforts sont déployés par le gouvernement, par les autorités locales, quand l’implication de la notabilité et des personnes ressources est réunie, faudrait que l’on sache raison garder. Au-delà de tout ce que nous venons de dire, jamais, jamais du tout, notre pays ne saurait se sortir des difficultés qui l’assaillent tant que nous n’aurons pas renoué chacun de nous, en son for intérieur avec la paix, qui est la denrée la plus partagée par tous les Guinéens. Nous en appelons ici donc, à tous les citoyennes et citoyens de Boké, et cet appel pathétique est celui de M. le Président de la République, celui du Premier Ministre, chef du gouvernement, celui de tout le peuple de Guinée. Nous en appelons à la population de Boké, les mesures idoines sont en train d’être prises, les groupes arriveront à Boké, au pire des cas demain (dimanche 17 septembre, NDLR) dans la journée, au meilleur des cas, au petit matin. Des camions remorques ayant déjà été mis en route, d’ici là nous demandons à la population de Boké de rester dans le calme, d’observer une attitude citoyenne et de renoncer à tout ce qui était là comme disposition à faire de Boké une ville en état de guerre. Nous ne le souhaitons ni pour Boké ni pour aucune autre ville de notre cher pays. Je vous remercie de votre attention’’.

Un rapporteur d’une réunion de crise présidée par un prélat n’aurait pas fait mieux ! De toute façon ces jérémiades du ministre Bouréma condé qui avait à ses côtés le ministre de la Sécurité, Abdoul Kabélé Camara, est un aveu d’impuissance du gouvernement face à la situation de Boké.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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