Censure

Kassory Fofana : Ce PM si technocrate, si politique… (Par Alexandre Naïny Bérété)

On y est ! Dans un décret lu hier à la télévision nationale, le chef de l’Etat confirmait de façon officielle ce qui se murmurait déjà aux oreilles dans les bars de Conakry. Kassory Fofana est désormais le nouveau chef d’orchestre de la politique guinéenne. Cette nomination marque ainsi la fin du chapitre Youla ouvrant un nouveau qui sera écrit cette fois par celui que l’on appelle Don Kass.

Cette nomination qui intervient à seulement un peu plus de 2 ans de la fin du mandat du président de la république, l’heureux élu pour conduire le navire guinéen représente à la fois un profil de réformateur, un fin connaisseur de l’administration guinéenne avec néanmoins un passé sulfureux, et peut-être un profil plus politique se présentant comme le probable dauphin du chef de l’Etat.

Don Kass, ce technocrate bourré d’expérience

Nul doute que le choix de Kassory Fofana comme premier ministre laisse entrevoir une volonté pour le président de la république de rendre concrète sa vision d’une Guinée émergente à l’horizon 2020, tant cet homme a derrière lui un background énorme en matière de gestion administrative. Si avec Mamady Youla, Alpha Condé avait déjà sous la main un profil technocratique, Ibrahima Kassory Fofana par son aura et sa forte personnalité n’a rien à voir avec la personnalité de son prédécesseur tant le fossé est grand, sans jeter bien sûr de pierre dans le jardin du sortant.

Le choix de Kassory représente incontestablement un message que la Guinée envoie à ses partenaires internationaux. Il représente de par son parcours un gage de confiance auprès des bailleurs de la Guinée que n’a été peut-être son prédécesseur, même si ce dernier était aussi issu du milieu des affaires. Cependant, Kassory est le prototype d’un homme abreuvé aux pratiques routinières de l’administration guinéenne et des affaires internationales depuis plusieurs décennies maintenant, surtout dans le domaine des finances et des affaires, un secteur que la Guinée souhaite faire son cheval de bataille pour son décollage économique. A ce titre, le choix de Kassory est un choix rationnel qui, à bien des égards, est même venu un peu tardivement.

Ceci étant, les circonstances dans lesquelles il vient d’être propulsé à la Colombe, montrent que cette nomination est purement un acte politique.

Kassory Fofana, le successeur désigné du président Alpha Condé ou l’architecte d’un 3e mandat?

En effet, pour être nommé premier ministre, il a fallu que le nouveau chef de gouvernement accepte de troquer son parti dans le wagon présidentiel. La fusion de son parti peut être considéré comme le préalable qu’il fallait satisfaire pour aboutir à ce que tout le monde sait maintenant.

Naïny Bérété

Cependant le discours que l’intéressé a tenu ce week-end au siège du RPG AEC en affirmant notamment je le cite: « Je renoncer au pouvoir pour le président Alpha Condé ». Ces propos peuvent être interprété comme le choix d’une position stratégique assumée, en se mettant dans la peau du fidèle lieutenant aujourd’hui, pour se mettre demain dans l’habit du successeur désigné du président de la république au terme de son second et dernier mandat en 2020. Un choix d’autant plus stratégique qui ferait de lui le favori pour être président de la république en 2020 face à une opposition qui se cherche encore et toujours une boussole politique.

Toutefois, ce choix de Kassory peut être analysé également comme le résultat d’un compromis avec le locataire du palais Sekhoutoureya pour préparer le terrain à un éventuel rempile du président de la république en 2020. D’autant que le nouveau premier ministre est un animal politique, et qui semble convaincu que c’est son mentor qu’il faut à la Guinée pour lui conduire à l’émergence tant désirée. Mais l’un dans l’autre le présenterait à coup sûr comme le futur dauphin incontesté d’Alpha Condé quand il aura tiré sa révérence politique.

Cette dernière option, pour le voir se matérialiser, il va falloir que le contexte guinéen s’y prête, ce qui n’est pas si sûr.

Par Alexandre Naïny Bérété, étudiant en Sciences Politiques à l’université de Nantes

Mail : Alexandrenainyberete@gmail.com

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