Censure

Le mal guinéen et son remède (Par Mamadou Lamarana Diallo)

Le mal guinéen a des racines profondes. En un peu plus d’un siècle d’indépendance, le peuple de Guinée est passé de la féodalité au libéralisme le plus dévoyé en passant par une révolution totalitaire ‘‘globale et multiforme’’, pour s’essayer aujourd’hui à la démocratie.

Un laps de temps assez long pour marquer et déranger les esprits, mais pas pour assimiler trois régimes idéologiques si fondamentalement opposés. Des chocs culturels qui ont chacun laissé un impact dont le Guinéen ne s’est pas encore relevé. Raison pour laquelle, des réformes profondes, en particulier celles des mentalités et de l’Etat, s’imposent aujourd’hui, sans délai. Elles passent inéluctablement par l’Éducation et seront l’œuvre de REFORMATEURS.

QUI SOMMES-NOUS ?
Nous sommes les REFORMATEURS : des Patriotes, Hommes et Femmes de Guinée, démocrates, convaincus, qui militent en faveur du CHANGEMENT : une rupture radicale avec les méthodes et pratiques de la politique qui ont échoué dans notre pays.
Notre devise : ‘’Servir au lieu de se servir’’. Nous voulons servir la Guinée Nouvelle, celle qui exige le Changement.
Nous avons foi en la démocratie non pas parce qu’elle est la solution à tous les problèmes de la Guinée, mais parce qu’elle est le moindre mal, étant la résultante du dialogue et du débat d’idées entre opinions modérées. Nous rejetons la violence parce qu’elle est le résultat d’un échec. Nous la rejetons comme moyen de gouvernement ou de changement de régime politique, parce qu’elle entraine la violence, alors que le progrès des peuples n’est possible qu’à travers le dialogue et la paix, sans lesquels rien ne pourrait se construire durablement.
Nous adhérons à l’idée que la politique est l’art du compromis et non de la compromission. Et considérons que le refus de dialogue national entre les acteurs socio-politiques est un handicap sérieux pour le progrès du pays. En particulier, le refus de dialogue entre l’opposition et la majorité gouvernementale, est un frein à tous les projets de développement que cette dernière pourrait imaginer. L’opposition représente un segment important de la population dont le point de vue doit toujours être entendu, quel qu’il soit.
Par ailleurs, l’opposition doit accepter que la politique étant aussi l’art du compromis, elle ne peut s’attendre à toujours obtenir 100% de ce qu’elle veut.
Enfin, le Gouvernement et l’opposition doivent se convaincre que devant les difficiles et complexes épreuves qui assaillent notre pays de toute part, nous ne réussirons pas dans une posture ou dans l’ignorance de l’autre.

POURQUOI LE CHANGEMENT ?
Parce que le peuple de Guinée ne veut plus soutenir la mal gouvernance, une pseudo-démocratie, l’injustice, la corruption et l’impunité, dont il est, en définitive, la seule victime.
Parce qu’un homme providentiel, quelque soit son intelligence, son dévouement et ses intentions, ne saura jamais se substituer à de bonnes institutions pour venir à bout de l’ensemble de nos problèmes de société : construction nationale, Etat, développement économique et société, justice, droits et libertés, paix et sécurité.
Le Changement en question, vise à rendre espoir à notre peuple et s’oppose à tous les éléments qui s’opposent à son progrès, son émancipation de la misère, de l’ignorance, de l’exploitation, de l’injustice et l’impunité.
Concrètement, le Changement ne se résume pas à changer de Premier Ministre, de Gouvernement ou de Président de la République. Il exige un Changement radical de comportement et d’attitude à l’égard des pratiques du passé qui ont donné la preuve de leur incapacité à solutionner les problèmes de la Guinée. Un Changement dans notre manière de concevoir et faire la politique.
La constitution exige que le Président exerce ses fonctions dans le strict respect et sous le contrôle des institutions et selon les règles que le peuple s’est donné. Il ne peut être initiateur, exécutant, contrôleur et juge à la fois.
Comme dans un grand orchestre, le chef ne joue pas tous les instruments ; mais sous sa direction, le résultat final c’est cette belle symphonie que nous entendons.
Pourquoi des démocrates ? Nous sommes démocrates par principe et par conviction, ce que les extrémistes de tous les bords, tapis dans les recoins des partis politiques, comme dans ceux de la majorité et de l’opposition, ne peuvent pas comprendre, tellement ils sont convaincus d’avoir toujours raison, rejoignant ainsi tous ceux qui pensent sans le moindre doute, que leur ethnie est le peuple élu de Dieu.
Le Changement ne se limite pas à la création d’une nouvelle structure, une nouvelle technique ou une nouvelle méthode. Il participe à la transformation de la nature des enjeux dans le système en place. Comme nouvelle forme d’action collective, le Changement passe par la recherche, la découverte et l’acquisition de nouvelles capacités.

Le Changement est collectif, ou il ne l’est pas. Il suppose une maîtrise collective du nouveau système en place ; un changement dans les rapports individuels, le système et les modes d’action dans l’organisation sociale. De nouvelles formes de contrôle social et un nouveau cadre institutionnel s’imposent, dans le cadre d’un projet de société conçu et construit autour d’une vision et de valeurs en partage : une éthique de valeurs, de responsabilité, de liberté, de justice, de solidarité, de fraternité et d’humanité.
Cette création et construction, doit être l’œuvre de REFORMATEURS, qui questionnent depuis un demi-siècle, notre capacité collective réelle à concevoir, piloter et gérer un système social fondé d’abord sur des valeurs en partage de liberté, de justice, de solidarité et de responsabilité.

Toute action est fondée d’abord sur la responsabilité de son acteur. Les problèmes étant vécus à la base de la pyramide sociale par le peuple, nous devons lui reconnaître la liberté de pensée dans ses propres affaires.
Il est temps, il est politique et moral, d’émanciper le Peuple de Guinée ; de le rendre encore plus maître de lui et plus capable de décider par lui-même et non par décret. Une responsabilité plus clairement assumée à travers une capacité nouvelle efficace d’action et de gestion.

Et pour nous émanciper des relations de domination par un Président Responsable de tout et capable de rien ou de son entourage, nous devons nous armer d’une nouvelle maturité politique pour constituer une capacité collective à agir pour organiser nos rapports sur la base de la confiance ; confiance que la politique des extrêmes ne laisse pas beaucoup de place au compromis, fondement de toute construction démocratique. Conscience que des personnalités, quelques soient leur intelligence, qualités et dévouement, ne peuvent pas et ne doivent pas se substituer aux institutions pour arbitrer nos différends. Conscience qu’un dirigeant peut être très bon, mais que rien ne vaut de bonnes institutions.

Nous n’y parviendrons pas dans la division et si l’Etat est guidé par les querelles et les groupes qui les engendrent. Nous n’y parviendrons pas sans un Etat techniquement et moralement crédible pour éclairer et servir d’exemple. Un Etat qui sait, sait faire et faire savoir.

Nous n’y parviendrons pas avec un Chef d’Etat régulièrement contraint à des tâches d’exécution et de contrôle des décisions prises par lui-même.
Nous n’y parviendrons pas avec un Etat qui éclaire la voie mais ne définit pas seul le chemin. Un Etat stratégique qui sait qu’il ne peut plus, comme hier, agir et organiser tout et tout seul, parce qu’il n’en a pas les moyens et parce que d’autres acteurs dans le secteur privé, la société civile et les organisations non gouvernementales, se trouvent mieux habilités et plus compétents que lui dans certains domaines.

Conakry, le 17 juin 2016

Mamadou Lamarana DIALLO
Membre du Groupe de Réflexion « Culture, Nation et Développement-CNAD»

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