Censure

Makanera, Vous me faites peur! (Par Salim Gassama Diaby, Montréal, Canada)

Monsieur, Il m’a été donné l’occasion de lire votre interview sur les accords du 12 octobre 2016, non sans amertume et émoi. De votre interview, un passage choc qui, du reste, a capté l’attention de nombreux directeurs de site d’information m’a particulièrement interpelé, en l’occurrence : << La fronde est due au fait que ces partis politiques ne sont pas prêts. Financièrement, ils ne sont pas prêts par rapport à la logistique. Les gens ont peur de perdre. S’ils n’ont aucune commune, ils perdent de poids. Et aujourd’hui, ce n’est pas n’importe quel parti parmi eux qui est capable de gagner une commune. C’est ridicule que la troisième ou quatrième force politique n’arrive pas à gagner même une commune>>, pour répondre à la question de savoir pourquoi l’UFR, le PEDN et le Bloc Libéral ont-ils dénoncé les manœuvres politiques qui, selon eux ont été de nature à détourner l’accord de son dessein initial. Nul doute que vous n’êtes pas une tombée de la dernière pluie sur l’échiquier politique guinéen, ce qui fort heureusement a permis aux publics guinéen et international de jauger votre personnalité en tant qu’homme politique.

Je ne vous ai pas compris quand vous souteniez le gouvernement guinéen dans le massacre de Womey

En effet, votre passage éphémère, mais ô combien tumultueux au ministère de la communication m’avait pourtant donné l’impression d’avoir affaire à un homme de conviction, même si vos interventions par moments et par endroits m’avaient laissé sur ma faim. Je demeure convaincu que si vous aviez été en politique durant la période de la révolution en Guinée, vous auriez marqué ce régime d’une empreinte indélébile. Je vous prie de bien vouloir accepter ce ‘‘compliment’’. Ce caractère d’homme de conviction dont je croyais être le vôtre s’est renforcé en moi quand, le 12 janvier 2016 suite à votre non-reconduction, vous affirmiez : « Je reste encore membre de la famille RPG et reste à la disposition d’Alpha Condé ». Vous continuiez : <<J’étais hier l’un des principaux défenseurs de la cause du Rpg Arc-en-ciel et d’Alpha Condé. Si je suis limogé, je fais un saut rapidement pour être dans l’opposition, les gens ne me comprendront pas>>.

Monsieur, je ne vous ai pas compris quand vous souteniez le gouvernement guinéen dans le massacre de Womey qui se présente dangereusement comme un crime contre l’humanité et dont la résolution passe nécessairement par votre audition en tant que témoin au moins, et très probablement en tant qu’ instigateur; je ne vous ai pas compris quand vous chantiez les louanges du président Condé alors que les détournements de deniers publics et le clientélisme politique étaient devenus la marque singulière de la gestion de la chose publique en Guinée; je ne vous ai pas compris, non plus, quand vous criiez haut et fort les vertus de la démocratie guinéenne quand un système de gouvernance à la sauce dictatoriale prenait forme en guinée. Et aujourd’hui plus qu’hier, j’ai perdu tout espoir de vous comprendre. Vous me faites peur!

Pourquoi aviez-vous été effroyablement silencieux et joyeusement supporteur du président Condé

Mon ami et frère, votre intervention et mea culpa au siège de l’UFDG suite à votre départ du gouvernement m’ont surpris à plus d’un titre. Je comprends que vous ayez décidé de rejoindre l’opposition, mais de là à demander pardon pour avoir été membre du RPG et collaborateur dévoué du président Condé ne laisse aucun doute que vous aviez quelque chose à vous reprocher ou que vous étiez à la recherche de point de chute. Vous avanciez :<>, ce qui crée un lien naturel avec l’UFDG, parti dont il est le père fondateur. Cependant, il devient tout à fait naturel de vous poser la question de savoir pourquoi aviez-vous été effroyablement silencieux et joyeusement supporteur du président Condé quand l’armée sous son autorité assassinait les héritiers de Bah Mamadou par dizaines, par cinquantaines, j’allais dire par centaines sur l’axe Bambeto-Cosa, dans leur effort pour la matérialisation de ses idéaux démocratiques? Mon cher, vous donnez plus l’image d’un politicien en location désespérément à la recherche d’un preneur, qu’un homme de conviction. Vous nous faites peur!

Puisque vous vous improvisez chef comptable du PEDN, de l’UFR et du Bloc Libéral

Monsieur Kaké, voyez-vous, suite à la rencontre qui vous a réuni avec vos pairs de l’opposition, un deal a été conclu sur le prix de la vie/de la mort de ceux qui ont perdu la vie dans les manifestations qui ont précédé la tenue des élections législatives. Cette pratique sournoise de marchander la vie humaine dans un espace extrajudiciaire entre 2 partis politiques fondés sur le populisme ethnique et qui font de la mort un fonds de commerce politique nous indigne, sincèrement! En sus, puisque vous vous improvisez chef comptable du PEDN, de l’UFR et du Bloc Libéral pour mettre sur la place publique leurs prétendues difficultés financières pour faire face aux futures échéances électorales, ne vous est-il pas venu à l’idée que le parti de votre nouveau mentor, l’UFDG, pourrait bien être en train de se décharger des dépenses financières des familles de ses membres tués et blessés pour souffler un peu, surtout que les circulaires de demande de contribution de ses membres signalant l’amorce d’une véritable période de vaches maigres ont fait la une de l’actualité durant presque toute la période des vacances? En outre, vous prétendez que ces partis politiques cités plus haut ne seront pas prêts pour les élections prochaines alors qu’aucune date officielle n’a été retenue. Mais, on comprend que vous ayez une conception d’être prêts assez particulière, parce que quand on a battu campagne pour un gouvernement qui s’est servi des moyens de l’État pour faire avancer sa cause, comme l’a si bien souligné le rapport de l’union européenne concernant l’élection présidentielle de 2015, ces questions se règlent à la minute, au coup de fil, à la signature. Votre confusion, semble-t-il, vient de cet état de fait et c’est pour cette raison que vous nous faites peur.

Si vous êtes élu président de Guinée, je vous promets que je porterai un bœuf sur mes épaules

Mon cher ami Makanera, comprenez-vous, il y a un grand nombre de guinéens qui s’offusquent de la politisation à outrance des chefs de quartiers parce qu’ils comprennent que tout ce tintamarre politique qui a suffisamment amusé la galerie durant votre rencontre qui a donné suite à l’accord du 12 octobre 2016 cache une réalité plus subtile. En effet, nous comprenons que ces chefs de quartiers sont devenus la pierre angulaire de la fraude électorale en guinée par leur capacité de rétention de cartes électorales de leurs adversaires politiques ou par la multiplication d’électeurs fictifs. Leur complicité dans ce cynique jeu n’est plus à démontrer. Au lieu de régler ce problème avec sagesse et maturité, les partis politiques guinéens ont préféré se lancer dans une course effrénée à la capture de ces courroies de transmission de la fraude électorale. S’insurger contre une telle manœuvre est

Salim Gassama Diaby
Salim Gassama Diaby

loin d’être une expression de peur, a fortiori être un ennemi de la guinée comme l’a laissé entendre votre mentor, M. Cellou Dalein Diallo. La divergence d’opinions est un principe sacrosaint de la démocratie et remettre cela en cause en s’attaquant au patriotisme des Guinéens est une attitude condamnable et regrettable. N’est pas ennemi de la guinée celui qui défend une opinion contraire à celle de M. Cellou Dalein Diallo! Monsieur Kaké, il est une évidence que vous vous êtes laissé aller trop vite et trop facilement dans ce jeu incompréhensible de vous engouffrer dans toutes les brèches piégées qu’ouvrent M. Cellou Dalein Diallo. Gardez-vous d’être un bélier politique à la solde du populisme ethnique.
Pour finir, je vous souhaite bonne chance pour l’élection présidentielle de 2020. Si vous êtes élu président de Guinée, je vous promets que je porterai un bœuf sur mes épaules depuis Bonia puis, j’arpenterai la pente de Boubouya et ce, jusqu’à Makhanera Kounda, cette grande et noble famille qui constitue un symbole de la sagesse et un creuset du savoir pour la ville Boké. Vous aurez même droit à des pas de danse de Saouro de ma part. Encore fois, bon vent pour 2020, mon frère!

Salim Gassama Diaby
Montréal, Canada

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