Ehhh bèh dis-donc : qui disait d’ailleurs que le Vendredi 13 est un jour de drame ou de mauvaises nouvelles ? Cette fois-ci, je vous exhorte à aller lui dire qu’il s’est bougrement fourré l’index dans les narines, parce qu’ici, chez nous en Guinée, en ce Vendredi 13 décembre 2013, l’on s’est réveillé le cœur léger et la tête à l’espérance.
La cause de cette extase, vous la connaissez certainement : depuis toutes ces longues années que nos leaders des partis politiques dits de « l’opposition républicaine » nous entravaient la respiration avec leurs grimaces meurtrières, c’est la nuit dernière que nous entendons leur porte-parole aligner, enfin, des mots sensés et… positifs. Tenez-en le principal extrait : « … Les partis membres de l’opposition républicaine, prenant en compte les positions exprimées par leurs bases et structures respectives, tenant compte des plaidoyers de la société civile et des souhaits formulés par la Communauté internationale, décident de faire siéger leurs députés élus à l’Assemblée nationale issue des élections législatives du 28 septembre 2013… ».
Eh oui, ils ont décidé… oui, ils se sont (enfin ?) décidés à y aller. Pörèèèèè !!!
Je les vois d’ici, brandir la dernière manche de leur phraséologie comme un trophée : « … décident de faire siéger leurs députés élus à l’Assemblée nationale issue des élections législatives du 28 septembre 2013… ».
Oh Sacré Dieu, faut-il en rire ou en pleurer ? Pourquoi donc tout ce temps perdu dans des cancannements apocalyptiques et des accrochages fratricides ? Pourquoi donc tous ces innommables drames humains, matériels et économiques ? Pourquoi donc cet esprit de charognard qui ne se satisfait que dans les cortèges accompagnant les cercueils des enfants d’autrui au cimetière ? Pour quoi donc… Pour quoi… J’enrage !
Mais bon ! Aujourd’hui, en ce Vendredi 13 qui marque la fin effective de la Transition politico-meurtrière en Guinée, la majorité des guinéens, épris de paix et de quiétude sociale, remplissent leur poumon d’oxygène, en saluant une démarche « salutaire et responsable », au regard de l’atmosphère électrique dans laquelle évoluait la Nation, surtout en ces derniers mois. Aussi jubilent-ils avec tous les mots parfumés à l’égard de notre classe politique, et particulièrement, les meneurs de l’Opposition.
Par contre, et il faut le noter : tous n’ont pas cette joie sincère. Chez les esprits de forteresse et autres adeptes de l’action violente et de l’anarchie, c’est la déception grognarde. Tenez-vous bien : ceux-là continueront toujours à ronchonner, ne fût-ce que par quelques maladroites tournures de mots ou dans le silence hypocrite, leur douleur vrillante de voir la Guinée et les Guinéens emprunter non pas le chemin de la bêtise et de la confrontation, mais bien celui glorieux de la sagesse et de l’apaisement.
N’empêche ! Elle est finie et bien finie cette Transition turbulente, étourdie et carnassière, enclenchée depuis le décès du Président Lansana Conté, en Décembre 2008. Elle est bien terminée, la Transition, mais… elle aura laissé des cicatrices profondes et regrettables.
Durant cinq longues années, nous aurons eu le temps de tout nous dire et de tout nous faire. Tout d’indélicat et de carrément vache !
En cinq ans, nous aurons fini par mettre le tissu social guinéen en lambeaux. Nos mots et nos gestes nous aurons attiré l’admiration ou la réprobation de nos compatriotes. Dans certains cas extrêmes, nos crises de nerfs, nos mots hargneux et nos attitudes bigarrées nous aurons perdu à jamais pour beaucoup.
Cependant, l’espoir n’est pas encore éteint. La certitude ancrée étant que quelque part, dans les tréfonds de nos cœurs lacérés, mais optimistes, le guinéen sait que cette Guinée au sursaut déconcertant, finira inexorablement par revenir à elle-même, pour encore surprendre, comme toujours, le Monde qui nous observe et qui frémit pour nous.
Mais, il faut le souligner très fortement : cette rédemption, cet élan de compréhension mutuelle et de concorde se déclenchera, non plus dans la rue avec des cailloux, des serpettes, des couteaux ou des gourdins en mains, mais bien sûr ici, à l’Hémicycle, sous « l’arbre à palabres » des temps modernes, dans des échanges positifs et constructifs entre les 114 fils et filles de la Nation, choisis par nos urnes et légalement mandatés à parler en notre nom.
Dès l’instant où ces élus auront prêté serment, ils seront tenus, devant Dieu et les Hommes, à un devoir historique incompressible : ne débattre que de la Guinée et des préoccupations essentielles des guinéens, en guinéens et entre guinéens, sans aucune autre considération que l’essor de la Patrie de nos ancêtres.
Et à l’unanimité de la conscience nationale, c’est là où nous les attendons, c’est là, la raison de notre libre choix porté sur leur modeste personne, et c’est là que nous les mènerons, sans repos ni répit, tout le long de leur mandat.
Et ceci étant noté, honorables députés de la Nation, si vous êtes convaincus que vous êtes prêts pour des échanges positifs et constructifs, au-delà de tout esprit de blocage systématique ou de toute connivence d’applaudimètre mécanique, bref, si vous êtes prêts pour rien d’autre qu’une Guinée unie et émergente, alors, nous, vos mandants, nous pouvons vous dire, avec fierté : « Bienvenue à l’Hémicycle, dignes filles, dignes fils de la Patrie ! »
Fodé Tass Sylla