L’opposition guinéenne a fini par renoncer à saisir la Cour suprême dans le bras de fer qui commençait à se profiler autour de l’adoption de la loi de finances 2014, favorisant le démarrage prochain de la législature dans un climat apaisé.
Alors que des observateurs s’attendaient à une posture « va-t-en-guerre » de l’opposition après les réactions suscitées par l’ouverture de la session de loi de finances 2014 au niveau du Conseil national de transition (CNT, parlement transitoire) la semaine dernière, le chef de file de l’opposition Cellou Dalein Diallo et ses pairs ont mis de l’eau dans leur vin. C’est du moins la lecture que l’on peut faire de leur sortie effectuée mardi, lors d’une conférence de presse qui s’est déroulée à Conakry.
Certes, les conférenciers n’ont pas été tendres en dressant le bilan du gouvernement pour les 3 ans écoulés, qualifiant celui-ci de « globalement négatif », mais il faut noter que l’hypothèse qui avait été avancée — et qui portait sur une éventuelle saisine de la Cour suprême, en vue d’attaquer la décision gouvernementale de recourir au CNT pour l’adoption de la loi de finances 2014 — a été écartée.
Le CNT poursuit donc ses travaux en toute sérénité, tandis que le ballet des délégations ministérielles se poursuit devant les conseillers à un rythme effréné, chacune venant défendre chèrement son budget pour l’exercice 2014.
En se gardant de déclencher une procédure judiciaire contre le gouvernement, démarche qui aurait encore contribué à crisper davantage l’atmosphère politique, l’opposition démontre bien sa volonté de siéger le plus rapidement possible au sein de la future Assemblée nationale. L’heure n’est pas à la palabre, en attendant que les députés élus ne prennent fonction, pour combler le vide créé par la suppression de cette institution dont le rôle s’avère capital dans une démocratie.
La suppression en question est survenue à la suite du putsch perpétré par le capitaine Moussa Dadis Camara en décembre 2008, au lendemain du décès de Lansana Conté.
Le Conseil national de Transition mis en place pour suppléer le parlement a durant 3 ans ratifié plusieurs lois et conventions, dont la Constitution du pays et le code minier.
La création du CNT a été rendue possible grâce aux accords signés à Ouagadougou au Burkina-Faso en janvier 2010, dans le but de mettre en place un gouvernement de transition et d’organiser la présidentielle.
Il a fallu 3 ans depuis la signature de ces accords, pour que la transition arrive enfin à son terme, par l’élection d’une Assemblée nationale. Tous les regards sont désormais tournés vers le palais présidentiel, dans l’espoir que le décret sur la date de la première législature sera fixé. Car aucun des camps ne souhaiterait revenir sur cet acquis.
C’est d’ailleurs ce qui aurait motivé l’opposition à sursoir à toute action susceptible de replonger le pays dans une logique de confrontation, quitte à entreprendre des démarches visant à revoir les lois adoptées par le Conseil de transition une fois que la législature aura été enclenchée.
Le président Alpha Condé, en ordonnant mardi dernier par décret le Conseil national de Transition à examiner la Loi de finances 2014, était sans doute animé par un souci d’empêcher que l’année ne se termine avant que cette loi ne soit votée. Une situation qui aurait mis le gouvernement dans l’embarras et compromis la coopération avec les institutions de Bretton Woods, comme le FMI et la Banque Mondiale.
L’explication est simple : sans l’adoption de la loi de finances 2014, le chef de l’Etat guinéen serait tenu de procéder par ordonnance pour décider des dépenses à exécuter. De quoi remettre en cause toute gestion rigoriste des affaires de l’Etat, alors que le pays a besoin de se remettre de décennies de gouvernance considérée à tort ou à raison comme étant en dessous de la moyenne admise en la matière, surtout en termes économiques.
Voilà donc pourquoi il a eu recours aux services du CNT pour adopter cette loi. C’est l’argument avancé par le gouvernement. Et le secrétaire général de la présidence Kiridi Bangoura a déclaré au lendemain de cette décision présidentielle qu’il avait reçu un mandat du président pour contacter certains leaders de l’opposition afin de leur porter le message justifiant la nécessité de la démarche gouvernementale.
Il faut noter que ce jeudi, les nouveaux députés sont convoqués par la présidente du CNT au palais du peuple, afin que soit mis à leur disposition le guide du parlementaire, outil indispensable à ces députés pour cette législature qui s’annonce pour une durée de 5 ans.
Xinhua