Censure

Le bloc-notes de Zacharie : L’emploi n’est pas que rare en Guinée

Ce fut parfois la question, passionnante bien souvent, de savoir à qui convenait-il d’accorder l’appellation de travailleur. Nous nous en passons simplement, du moins momentanément pour parler fête, non pas du point de vue des réjouissances traditionnelles, mais d’instants choisis par les nations du monde pour faire l’état du travail et de celui qui l’accomplit.

Le 1er mai, c’est aujourd’hui ! Le mouvement social choisit d’y aller sans vacarme en prémunition contre, nous apprenait-il, de la très contagieuse épidémie d’Ebola. Nous avons apprécié et salué la symbolique de la démarche. Toutefois en Guinée, parlons-en, la fête du travail arrive dans un contexte particulièrement complexe qu’il convient de décliner.

Commençons par les emplois où les échecs ont comme traîné les acquis dans la poussière. On ne niera pas, en effet, à l’Etat d’avoir créé de l’emploi, le Ministre Porte-parole du Gouvernement est très suffisamment revenu sur le sujet. Mais il faudra par le même moment reconnaître la destruction d’emplois rattachable, d’un côté au gouvernement, du fait d’une politique managériale déficiente, et de l’autre côté, à la conjoncture économique mondiale. La Sotelgui, Russal Friguia et la SMD suffisent à soutenir chacune de ces positions.

Toujours sur l’emploi, qui n’est pas que rare en Guinée. Aujourd’hui plus qu’avant, il convient de dépasser le concept du casse-tête pour parler de l’énigme du premier emploi. Et c’est le lieu de redire ma joie de voir initier la « Première Chance » qui, à défaut de garantir l’emploi, offrira tout au moins aux nouveaux diplômés de le démystifier.

La fête du travail, c’est aussi la condition du travailleur ; je soutiens que la condition du travailleur guinéen est un tout, construit de douleurs et de mépris. J’en veux d’ailleurs à ce SMIG, ridicule et insignifiant qu’ils ont abusivement assimilé à la lune, SMIG qu’on nous a exagérément brandi comme un trophée de chasse ; j’en veux aux retards de salaires qui contraignent les travailleurs à boire de leur sang pour survivre ; j’en veux au abus de licenciements dont ils font délibérément l’objet ; j’en veux aux excès de patrons froids et sans cœurs qui se déchargent allègrement sur leurs employés à leur seul dam ; j’en veux à leur cadre de travail qui n’a d’avantages que d’accélérer leur décrépitude.

Oui ! J’en veux à tous, mais surtout à l’Etat qui en appelle ignominieusement à certaines civilités pour voiler et justifier sa faiblesse, tels les instant où Rusal lui faisait sa loi ; j’en veux à l’Etat pour Sotelgui, pour nos enseignants, ces bâtisseurs de la nation qu’il remet insouciamment à la corbeille. Je lui en veux de ne pas faire grand effort.

Il crie souvent à la limite de ses moyens, ce que je peine à comprendre. Des milliards de nos francs s’envolent chaque année frauduleusement pour des poches autres que celles du peuple, des recettes portuaires et minières incroyables se réalisent depuis des décennies, mais très peu de choses changent à la vie du travailleur qui ne demande qu’à  être encouragé.

Le monde du travail en Guinée, c’est aussi une législation limitée aux textes, des garanties sociales qui relèvent de l’utopie, c’est l’asphyxie des compétences et la promotion du rapport aux personnes et à leurs origines, c’est la montée de la délation ; bref, ce sont tous les sept péchés capitaux d’Israël.

Finalement, il ne faut qu’espérer que ces quelques réformes insinuées, ajoutées à d’autres plus grandes, puissent permettre une amélioration significative de la condition du travailleur guinéen. Mais toujours est-il que cela ne saura voir le jour que par l’adoption d’une législation rigoureuse et juste du travail et l’édification d’un secteur privé fort.

Je mets les crampons.

zachariemills@gmail.com

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