A la veille de la saison sportive 2013-2014, la Fédération guinéenne de football a cru devoir signer des contrats de sponsoring avec deux sociétés de la place: Nimba Mining pour le championnat et Guinée Games pour la Coupe nationale. Mais pour qui sait que ces deux sociétés sont dirigées par deux présidents de club, il y a lieu de se poser des questions. Et la suite des événements donne raison à tous ceux qui avaient émis des réserves par rapport à ce genre de sponsoring.
A l’issue de la saison sportive 2012-2013, la société minière Rio Tinto a décidé, pour des raisons qui lui sont propres, de ne pas renouveler son contrat de sponsoring des compétitions nationales (championnat national et coupe nationale). Il fallait donc, pour la Fédération guinéenne de football, taper à toutes les portes, bonnes ou mauvaises, afin de trouver des sponsors. C’est ainsi qu’un contrat de sponsoring a été signé avec deux sociétés de la place: Nimba Mining pour le championnat et Guinée Games pour la Coupe nationale. Mais pour qui sait que ces deux sociétés sont dirigées par deux présidents de club, il y a lieu de se poser des questions. Au bout de trois journées de championnat seulement, des voix ont commencé à s’élever pour remettre en cause ce sponsoring. Début janvier 2014, l’on s’en souvient, le Bureau exécutif de l’Atletico de Coléah, après avoir tiré les leçons du match du 5 janvier perdu 1-2 face à l’AS Kaloum (3ème journée), avait décidé de retirer le club du championnat et de la Coupe nationale (saison 2013-2014) « afin d’éviter de cautionner et de valider un résultat d’avance programmé ». Le club de Coléah avait pointé du doigt (comme beaucoup d’observateurs d’ailleurs) le sponsoring du championnat par Nimba Mining, une société minière à la tête de laquelle trône le président de l’AS Kaloum, Bouba Sampil. Et de là à parler de favoritisme et de conflit d’intérêts, il y a un pas que certains n’ont pas hésité à franchir avec empressement. L’Atletico reviendra un jour plus tard sur sa décision. Aujourd’hui, beaucoup donnent raison aux responsables de l’Atletico, pour avoir attiré à temps, mais sans être entendus, l’attention de l’opinion sur le favoritisme, le clientélisme et l’affairisme qui sont en train de prendre le football guinéen en otage, au vu et au su de tout le monde.
La façon dont les deux compétitions nationales ont été organisées cette année en est une parfaite et inquiétante illustration. Le championnat national de Ligue 1, sponsorisé par Bouba Sampil, a été remporté par son club, l’AS Kaloum. En Ligue 2, c’est le Gangan FC de Kindia qui a dominé les débats. Les poulains de l’entraîneur Ibrahima Sory Touré « Damas » ont terminé à la première place de la compétition, validant du coup leur ticket pour la Ligue 1. A une journée de la fin du championnat de Ligue 2, Alu Star de Fria était en bonne position pour s’adjuger la deuxième place qualificative pour la montée en Ligue 1. Malheureusement, la Fédération et les dieux de la corruption en ont décidé autrement. Selon de nombreux témoignages concordants, le match Sankaran FC/Alu Star, comptant pour la dernière journée dudit championnat, a été géré de la façon la plus scandaleuse qui soit. Les images des joueurs de Fria, avec des ecchymoses, des boursouflures et autres sparadraps témoignent de la violence inouïe par laquelle leurs adversaires se sont négativement distingués ce jour-là, au nez et à la barbe des officiels. Sous d’autres cieux, on aurait crié au scandale ou pris tout bonnement les mesures qui s’imposent en pareille circonstance. En cas de victoire, Alu Star de Fria aurait pu s’ouvrir grandement les portes de la Ligue 1. C’est le Hafia FC, présidé par le patron de Guicopres, Kerfalla Person Camara (KPC), qui s’est finalement emparé de cette deuxième place qualificative pour la montée en Ligue 1. Les pauvres joueurs de Fria n’ont plus que leurs yeux pour pleurer.
En coupe nationale, il n’y aura certainement pas de surprise. Sauf miracle, les Rouge-et-Blanc du Horoya AC remporteront haut la main cette compétition sponsorisée par Guinée Games, la société de leur président, M. Antonio Souaré. Ce qui fait dire aux mauvaises langues que les deux compétitions nationales de football sont désormais la « propriété » de leurs sponsors-compétiteurs, les autres formations n’y faisant que de la figuration. Salifou Camara Super V et son équipe ne sont-ils pas en train de nous faire regretter Aboubacar Bruno Bangoura à la tête de la Fédération guinéenne de football ? C’est la pertinente question que tout observateur averti serait tenté de se poser au regard de ce qui se passe actuellement dans la gestion quotidienne du sport-roi en Guinée. Une gestion qui suscite de plus en plus des grincements de dents chez bon nombre de membres statutaires. L’Assemblée générale du 25 octobre 2013 aura été une occasion de s’en rendre compte, avec regret. Ce jour-là en effet, quelque soixante membres statutaires ont signé un mémorandum dénonçant ce qu’ils assimilent à une gestion plutôt scandaleuse du football guinéen par l’actuel comité exécutif. Certains esprits malintentionnés ont vu derrière cette « fronde » la main de Djibril Diarra « Becken ». Le 14 novembre, ce dernier, à la surprise générale, a été suspendu par le président Salifou Camara Super V. Une suspension que beaucoup considèrent comme un règlement de comptes. Le 3 juin dernier, ce fut au tour du lieutenant-colonel Youssouf Traoré, membre de la Féguifoot, d’être suspendu à son tour pour avoir ‘’osé’’ dénoncer certaines mauvaises pratiques au sein de l’instance dirigeante du football guinéen.
Mamy Dioubaté