Depuis des semaines, le journal appartenant au porte-parole de l’Opposition, L’Indépendant, est dans la tourmente. Les journalistes ne sont pas contents des conditions difficiles de travail et le font savoir. Dans ce qui suit, un ancien journaliste de la boite, Amadou Touré, revient sur la dure réalité du travail à l’Indépendant.
‘‘J’ai hésité plusieurs heures, avant de coucher ces lignes, en guise de soutien aux journalistes, employés du Groupe de presse l’Indépendant, en grève. Cet organe de presse où j’ai roulé la bosse entre 2003 et fin 2005 était une école où il fallait s’armer de courage à cause des difficiles conditions de travail.
Pourquoi une hésitation? Dans ce dossier de revendication des » arriérés de salaires et piges » qui oppose un personnel gréviste et leur patron, la tournure politique qu’on a voulu lui coller m’étonne.
En Guinée, depuis quelques temps, dès qu’on veut noyer du poisson, il y a des termes appropriés à utiliser : » sabotage » ou » manipulation politique ». Dès que ceux-ci sont employés dans une affaire, quelque nature que ce soit, connaitre la vérité devient difficile.
Mais l’honnêteté intellectuelle et le désir de recherche de la vérité m’imposent à coucher ces mots, en guise de témoignage, pour la postérité.
Pour avoir été accepté en qualité de Stagiaire en 2003 – en classe de Licence- au sein du Groupe de presse l’Indépendant, j’ai appris à connaitre les dures réalités auxquelles faisaient face le personnel. Les discussions des journalistes confirmés -ceux là que je remercie pour mon encadrement- portaient à l’époque sur la qualité du traitement salarial parmi tant d’autres. C’était d’ailleurs une question sempiternelle !
A l’époque, ce qui irritait les journalistes, c’est lorsque ce salaire jugé « insuffisant » n’était pas payé à temps. Quelques fois, même après le paiement de la part qui revient au groupe de presse – avec 3 journaux à l’époque- dans la subvention allouée par l’Etat à la presse privée, la galère pourchassait mes » chefs ».
Cette dure réalité, tout naturellement, a poussé beaucoup d’entre eux à opter pour le système D. Dans la débrouillardise, quelques journalistes avaient le choix de travailler ailleurs ou quitter la rédaction.
Ce qui m’a vraiment frappé à l’Indépendant, c’est la mort de feu Gassim Magassouba, Secrétaire général du journal Le Démocrate, presque sans assistance. Atteint d’une maladie qu’on pouvait vraiment guérir, Gassim a souffert au CHU Donka avant de passer de vie à trépas. Son salaire ne pouvait pas couvrir les frais médicaux !
Entre 2005 et 2006, en ma qualité de pigiste, il m’a été donné de constater le non paiement de salaires et de piges durant quatre à 5 mois ! Toute la rédaction en a pris un sérieux coup. Ce qui n’empêchait, bizarrement, la publication des deux hebdomadaires de la maison par semaine. Le personnel qui avait un courage incommensurable, a été poignardé lorsqu’un jour, le DAF Diakité est venu, en cachette, accorder des » Bons » de quelques milles gnf aux présents. Alors que les employés tiraient le diable par les…testicules puisque la queue étant finie. Excusez du peu ! Mais cette expression avait été trouvée par un » Doyen » de la rédaction à son temps de colère !
Ces dures conditions de travail et le manque de considération des employés de la part des employeurs, m’avaient fait prendre des distances de cette école, l’Indépendant.
A mes yeux, ce n’est pas politique, vu ce vécu, quand on accuse le Groupe de presse l’Indépendant de rester devoir à ses travailleurs. Moi aussi, j’ai laissé des piges non payées jusqu’à ce jour à l’Indépendant. J’en connais d’autres aussi’’.
Amadou Touré
Journaliste, Conakry