En plus de la guerre que le pays tout entier mène contre la fièvre hémorragique Ebola, qui s’est déclarée depuis mars dernier, la Guinée doit dorénavant faire face à la stigmatisation de la part de la
plupart des pays du continent, y compris dans la sous-région. C’est le moins qu’on puisse dire, d’autant que cela saute aux yeux et fait l’objet de commentaires dans la cité.
C’est dans cette atmosphère de psychose face à la propagation de la fièvre Ebola, que la délégation sportive guinéenne qui devait accompagner son onze national, dans la capitale ougandaise où il devait livrer une rencontre contre son homologue ougandais le 10 septembre, dans le cadre des éliminatoires de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2015 prévue au Maroc en 2015, a été réduite au strict minimum, à la demande du pays hôte, en cette période de fièvre hémorragique Ebola.
Domani Doré, ministre guinéenne des Sports a été ainsi priée de rebrousser chemin à partir du Maroc, où elle devait s’embarquer pour rallier Kampala. Dans une intervention sur une radio locale mercredi dernier, Mme la ministre des Sports a reconnu avoir renoncé à faire le voyage pour la capitale ougandaise où elle devait en compagnie d’autres responsables du monde sportif du pays, accompagner l’équipe senior de football.
La ministre des Sports semble avoir pris la chose avec philosophie. Du moins quand on se réfère à sa communication. Se contentant d’affirmer que ce sont les membres ‘’non nécessaires’’ de la
délégation guinéenne qui ont été invités à s’abstenir de faire le voyage.
Au finish, seuls 25 personnes, dont les joueurs, leur entraineur le français Michel Dussuyer et le directeur administratif et financier du département des Sports avaient pu faire le déplacement sur Kampala. Le président de la fédération guinéenne de football Salifou Camara, n’ayant été autorisé à rejoindre sa troupe que le jour du match. Ceci, après une intervention de la Confédération africaine de football (CAF) auprès des autorités ougandaises. Une rencontre que la Guinée a perdu finalement sur le score de 2 buts à 0.
Il conviendrait de noter que la Guinée, tout comme le Liberia et la Sierra Leone, se sont vus isoler au fur et à mesure que le temps passe, sans que ne soit rompue la chaîne de contamination au virus Ebola. Ainsi la plupart des compagnies aériennes qui desservaient Conakry ont suspendu leurs vols.
A ce jour le pays n’enregistre que 17 rotations sur une cinquantaine, selon une source gouvernementale.
Et c’est dans cette atmosphère d’Ebola phobie, pour le personnel navigant aérien, que des organisations syndicales françaises, notamment la Confédération française du travail (CFDT) avec son syndicat national CFDT Air France et la Confédération générale du travail (CGT) ont à travers un communiqué publié mardi indiqué avoir tenté de ‘’relayer l’appel des syndicats guinéens auprès de leurs collègues français pour le maintien de la desserte aérienne de Conakry.’’
Ces organisations rappellent que ‘’bien que Air France n’ait pas suspendu ses vols sur Conakry aujourd’hui, les organisations syndicales alertent les pouvoirs publics français sur les risques humains et sociaux que comporterait l’arrêt éventuel des vols vers la capitale guinéenne en raison de la propagation du virus Ebola.’’
Insistant sur le fait que ‘’la Guinée, Comme la plupart des pays de l’Ouest africain soit extrêmement dépendante des moyens de transport aérien. Et que l’absence de liaison avec l’extérieur et le
confinement ne sont pas les réponses appropriées à la crise sanitaire actuelle et s’avèrent contreproductifs pour de nombreux
experts sur place.’’
Il faut également dire que la Guinée digèrerait mal la fermeture des frontières de certains pays voisins, dont la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Même si ces pays ont finalement décidé d’ouvrir des couloirs, pour permettre l’acheminement de tout ce qui est aide en matière de lutte contre l’épidémie de fièvre Ebola.
Le ministre guinéen de l’Emploi Moustapha Naité a ainsi déclaré la semaine dernière qu’il n’y avait ‘’pas de risque à s’embarquer, atterrir ou être en transit à l’aéroport de Conakry’’, histoire de rassurer les personnes qui désireraient venir en Guinée.’’ Invitant au passage ses compatriotes à se lever pour ne pas laisser la Guinée sombrer sous l’étiquète de pays paria’’. Naité a regretté la sortie du président Macky Sall qui avait eu des mots assez durs à l’endroit du jeune étudiant guinéen, qui s’est retrouvé en territoire sénégalais, alors qu’il était porteur du virus Ebola. Même si le chef de l’Etat sénégalais a dans un entretien accordé au journal français l’Express ‘’condamne fermement tout comportement visant à ostraciser une communauté. Ce n’est pas parce que le cas détecté chez nous vient de ce pays que tous les Guinéens doivent être considérés comme porteurs potentiels du virus.
J’en appelle donc au respect du prochain’’, a lancé le président sénégalais. En réponse au fait que des commerçants guinéens disent être victimes de stigmatisation depuis que leur pays d’origine est
touché par cette épidémie. Un autre membre du gouvernement guinéen a profité du récent sommet de l’Union Africaine pour tirer la sonnette d’alarme sur l’impact négatif de la fièvre Ebola sur l’économie des pays africains. Le ministre des Affaires étrangères François Louncény Fall, dont il s’agit a dans son discours affirmé que ‘’L’impact négatif de la fièvre Ébola sur nos économies se manifeste déjà par le ralentissement des échanges commerciaux, la baisse de la productivité ainsi que par le recul des activités dans plusieurs autres secteurs comme les transports, les investissements et le tourisme.’’
Puis d’ajouter ‘’qu’au stade actuel, la Guinée a subi une perte de près de 1,5% du taux de croissance de son PIB.’’ A cela vient se greffer ‘’d’autres conséquences liées à la fermeture des frontières, la suspension des vols ainsi que la stigmatisation des ressortissants des pays affectés.’’
On le voit, la Guinée au-delà du combat qu’elle livre contre le virus Ebola, tient surtout à préserver l’image d’un pays qui n’entend pas céder à la panique, ce, malgré les effets néfastes de cette fièvre
hémorragique foudroyante.
In Le démocrate