Censure

A Paris des intellos planchent sur le cas de l’Afrique ! (Par Benn Pepito)

Franchement, Mborré ! Ton gars, Mékhé Dounké, qui est recru de fatigue, ne voulait pas du tout aller s’ennuyer à la conférence internationale que le centre de recherche a organisée avec le barreau de Paris. Mais le libellé de son thème sur « Le devenir démocratique de l’Afrique : paix, sécurité et résolution des conflits » l’a décidé à aller voir de quoi il retourne. Et ce vendredi passé, jour de la dite conférence internationale, Mékhé Dounké débouche sur l’auditorium de la maison du barreau dise à l’hôtel de Harlay dans le premier arrondissement de Paris. A pile poil, il pénètre dans la coquette salle de conférence, s’installe face à un premier groupe de conférenciers.

La conférence doit durer de 14h à 18h pour écouter les bavardages de huit (8) baroudeurs africains plus un robin français tous rompus dans l’art de discourir et managés par surcroît par Bukusu et Jean-Célestin Edjanqué de Africa 24, deux bavards et présidents de séances. Ça va barder ! Parce que le public aussi voudra se montrer à la hauteur de tout ce qui va se dire là.

Bukusu, le manager des premiers baroudeurs, après avoir eu le courage de dénoncer le ratage du processus de démocratisation sur le continent notamment en Afrique centrale, au Congo, au Rwanda, demande malicieusement au baroudeur sénégalais : « Est-ce que le Sénégal va mieux ? » La réponse sort de la bouche de l’opposant Sidy Fall sur un ton péremptoire : « Le Sénégal va mal. Il a subit une régression démocratique. » Sidy Fall dévide son chapelet malgré les tentatives de Bukusu à le faire respecter son temps de parole.

M. Emery Okundji, un dépité national du RDC, embouche le crachoir. Il dénonce, lui aussi, tout ce qui est détestable dans les régimes dictatoriaux du continent. Avec cette volonté des dirigeants africains à vouloir se maintenir au pouvoir par le truquage des élections. Ce qui engendre des conflits, des crises dans les pays concernés. Le dépité Emery Okundji suggère la non reconnaissance des gouvernements issus d’élections truquées. Bukusu lui fait signe de se taire maintenant. Le parlementaire Congolais se résout à désactiver son micro d’un air entendu.

Bukusu invite Bah Guérémassoy de l’UFDG à activer son micro sur le thème : « Quelles solutions face aux crises institutionnelles en Afrique ? » Vous savez que le gars a la langue bien pendue et surtout qu’il est rôdé dans ce genre de chose. Ça connaît son sujet ! Ça va de la chute du mur de Berlin au discours de Baules avec toutes les conséquences que ces deux évènements majeurs ont engendré dans les processus de démocratisation sur tout le contient africain ! Ça argumente sur la nécessité d’avoir dans nos pays des contre-pouvoirs ! Ça dénonce le mensonge politique qui devient, selon lui, la denrée la plus répandue dans nos pays et qui désespère tous les combattants de la démocratie, du développement économique, de la liberté et de la justice. Conscient de la présence dans la salle de conférence d’individus outillés de connaissances politiques, ça montre qu’il a du jus dans la caboche. Bah Guérémassoy propose la création de Commission Electorale Nationale Indépendante supranationale et  une cour constitutionnelle supranationale sur le continent. Elles auront à charges de questions électorales sur le continent. A l’en croire, elles seront plus efficaces, plus indépendantes à vider les contentieux électoraux  dans nos pays. Et elles seront plus aptes à traiter de la question de la dévolution du pouvoir par le triomphe du droit et faciliterait davantage l’intégration africaine à l’image de la BECEAO. Bah Guérémassoy n’a pas le temps de s’étendre de long en large. Il a déjà largement dépassé son temps de papotage. Et puis il semble avoir séduit le public avec sa proposition clé pour suppléer aux incompétences des CENI en Afrique toutes inféodées aux régimes dictatoriaux sur place. C’est l’essentiel, non ? Alors, Allabé Annabbé ! Rends la parole maintenant… Mon vieux ! Quand est-ce que les Africains vont intégrer le respect du temps de la parole ?

Me Paul Dima avocat africain inscrit au barreau de Paris ! Vous avez la parole. Me Dima planche sur « L’Afrique et la cour pénale internationale. » Il dit tout ce que vous savez sur ça en montant en épingle l’idée répandue chez les Africains qui voient en la CPI un instrument qui ne viserait que les anciens chefs d’Etat Africains comme Laurent Gbagbo, et les dictateurs et criminels africains. Plus choquant pour les Africains est la poursuite du Kenyan Uhuru Kenyatta, un chef d’Etat en exercice, par la CPI.

Ensuite c’est le tour  du conférencier Djiboutien de vider son sac sur les régimes totalitaires africains qui compromettent ainsi la souveraineté des peuples, qui forcent à l’exil les jeunes de leurs pays, qui mettent en prison les récalcitrants et liquident physiquement leurs opposants. « La corne de l’Afrique se vide de sa population, de sa jeunesse. En Djibouti, on assiste à des défilés forcés de fonctionnaires. Hier, un vieux de 70 ans a été arrêté et jeté en prison» parce que le vioc n’applaudit pas des pieds et des mains le régime tyrannique sur place. L’opposant Djiboutien de saluer la proposition politique de Bah Guérémassoy sur la création d’institutions supranationales en Afriques pour régler les contentieux électoraux. C’est  la fin du premier round des baroudeurs à cette conférence. Alors commence l’exercice des questions et coups de communications politiques.

Mariame Thiam, une jolie dame très active dans la diaspora africaine pour la démocratisation du continent, ameute l’auditoire qu’en Guinée se prépare un génocide contre les peuls. Ça fait bondir Lanciné Camara qui réclame et prend le micro baladeur. Parlant de Sékou Touré, il verse dans la gasconnade, le déifie. Il dément Mariame Thiam. On pousse des cris d’orfraie comme au marché Madina à Cona-cris ! Mékhé Dounké en képi réclame lui aussi le micro baladeur pour enrichir cette querelle sur la question politique des peuls en Guinée. Il pressent que le micro baladeur ne lui sera pas remis. Des voix s’élèvent pour qu’on lui tende le micro baladeur. Il l’obtient et marque son insatisfaction sur la communication de Me Paul Dima. Dounké admet que certes ce machin a deux poids deux mesures dans le traitement des dossiers des dictateurs et autres génocidaires du monde en ne s’en prenant qu’aux africains mais en Guinée la CPI fait quand même la part belle au dictateur Goby Condé qui excite continuellement ses souteneurs et partisans à massacrer les peuls. Mékhé Dounké argue que la CPI est une épée de Damoclès sur les têtes des dictateurs en Afrique où on a soif de justice. Sur ce, il accorde foi à l’alerte lancée par Mariame Thiam qu’effectivement dans la Guinée de Goby Condé se prépare un génocide contre les peuls. Excédé par le fait qu’à l’étranger des nostalgiques de la révolution sékoutouréenne n’ont cesse de fabuler sur la vraie nature de Sékou Touré, Dounké martèle que celui-ci était un dictateur. On affirme, on n’a pas le temps d’argumenter. Dounké enlève son képi pour être bien vu et crie comme un putois que Goby Condé est un dictateur en se laissant tomber dans son strapontin. Son intervention énergique douche l’enthousiasme de Lanciné Camara à faire passer Sékou Touré et Goby Condé comme des modèles politiques aux yeux de ces intellectuels africains présents dans la salle. C’est raté !

Bukusu tente de reprendre la conduite du débat en main. Un intervenant Congolais déclare qu’ « On tue à ciel ouvert au Congo » dans un silence assuré de la communauté internationale. Il se demande si l’africain n’a pas le droit de s’émanciper, s’il n’a pas droit au bonheur et à vivre bien. Tellement que les situations politiques dans nos pays sont catastrophiques et vont complètement à l’encontre du développement des populations.

Toutes ces décadentes situations politiques dans les pays Africains amènent Jean-Célestin Edjangue de Africa 24, le second manager des derniers conférenciers, à dire qu’on est dans « la problématique de la culture du pouvoir en Afrique. Quand on gère un pouvoir, on ne le gère pas pour soi, pour sa famille, pour son clan… » Dans la plupart des pays africains ce pouvoir est justement mal géré. Ce qui explique, selon Célestin, que c’est une minorité qui s’en met plein les poches dans ces pays face à la majorité de la populace qui crève la dalle. Jean-Célestin Edjangue parle, bavarde et fixe ensuite un temps de parole de quinze minutes à Acheikh Ibni Oumar, ancien ministre des Affaires Etrangères du Tchad et ancien ambassadeur aux Nations-Unis.

Acheikh Ibni Oumar cogite sur le rôle capital des renseignements généraux dans le règlement de beaucoup de conflits entre Etats voisins. Seulement Acheikh Ibni Oumar oublie de préciser que dans les pays dictatoriaux africains les renseignements généraux servent plutôt à pister les opposants aux régimes et à les casser.

C’est le tour de André Nzapayéké, ancien premier ministre de la République Centre Afrique sous la présidence de l’actuelle présidente Samba Panza, d’appuyer sur le bouton de son micro et d’exprimer son état d’âme sur la crise centrafricaine qui dure depuis cinquante cinq (55) ans. André Nzapayéké décrie les pratiques de la brutalité, dénonce la politique de diviser pour mieux régner, la mal gouvernance, l’acharnement contre le secteur privé, la marginalisation de l’armée au profit de la garde présidentielle, la corruption et les détournements de deniers publics, l’administration minée par le clanisme, tout ça en Centre Afrique.

On a l’impression en écoutant André Nzapayéké qu’il planche sur le cas de la Guinée de Goby Condé. Beaucoup de similitudes entre ces deux pays. « On parle beaucoup de réconciliation mais on ne parle pas assez de justice. Depuis 55 ans la Centre Afrique est englué » dans l’impasse, note l’ancien premier ministre centrafricain.

Célestin reprend la conduite de son affaire et joue au suspens sur l’identité de l’invité surprise à cette conférence. Après des minutes de suspens, il annonce Armand Mavinga Tsafunenga qui, candidat à l’élection présidentielle en RDC, s’avance sur son trente et un.

Armand Mavinga s’épanche sur la culture et la paix, met en relief le problème de l’identité profonde de l’être humain. « Il faut que le parlementaire africain soit au cœur de l’humanisme. Un parlementaire sans identité profonde devient un parlementaire fonctionnaire. » Armand rejoint le poète président Leopold Sédar Senghor pour dire qu’il n’y a pas de développement sans culture.

Célestin commande qu’on donne rapidement le micro baladeur à des jeunes qui l’accusent l’on ne sait de quoi. Tous ne pourront pas parler. Il déjà 18h 15mn. La sauce sera sûrement salée pour les organisateurs de cette conférence internationale que le président de l’Assemblée nationale de la France, Claude Bartolone, et le premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, devaient rehausser de leur présence. Ils se sont fait excuser sans daigner se faire représenter. Aux yeux de leur esprit, il n’y a pas de quoi fouetter un chat en venant à cette conférence internationale axée sur la démocratisation en Afrique. Elle prend fin bien après l’heure et on sort de la salle en ayant à l’esprit la remarque de cet intervenant congolais. « C’est la transformation d’individus dits démocrates avant leur arrivée au pouvoir en Afrique en dictateurs dès qu’ils y accèdent. (…). On disait Alpha Condé démocrate avant son arrivée au pouvoir, aujourd’hui on dit qu’il est dictateur. Quel est le problème fondamental ? » Quel est le problème, selon toi, Mbarring ?

Benn Pepito

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