Quelques heures après le meurtre par balle du journaliste El Hadj Mohamed Diallo, l’UFDG s’est fendu d’un communiqué qui intrigue et qui nous amène à nous poser quelques questions sur son sens et ses objectifs.
Selon le service de communication de l’UFDG, c’est Monsieur Amadou Oury Bah dit Bah Oury en personne, fraîchement débarqué de son poste de premier vice-président (une décision que ce dernier a qualifiée de « nulle et de nul effet »), qui a fait usage d’une arme à feu et qui aurait… tiré sur le journaliste ! Le même communiqué, mettant cette fois-ci une partie de son contenu sous le compte des « rumeurs », indique que le même Bah Oury serait venu au siège du parti qu’il a fondé avec l’intention d’assassiner le président de l’UFDG, Cellou Dalein Diallo.
En examinant de près les faits, un Bah Oury porteur d’une arme à feu ne saurait échapper à la vigilance des nombreux journalistes – dont certains brandissait leurs cameras ou leurs téléphones portables – et autres témoins présents sur les lieux. Comment l’ex exilé aurait-il pu sortir une arme, l’engager et tirer sans que cet incident ne soit signalé par les reporters ? Comment pourrait-il échapper à la réplique, légitime défense oblige, des éléments de la sécurité de l’UFDG ? Comment Bah Oury pourrait-il tirer sur un journaliste alors qu’au moment du coup de feu, plusieurs témoins indiquent que Mohamed Diallo, à l’écart des groupes en conflit, tenait son carnet et son stylo et de ce fait était facilement identifiable comme un homme de média ?
Selon les propres déclarations du directeur de publication du site Guinée7.com, l’organe de presse pour lequel le journaliste tué travaillait, Mohamed Diallo a eu le temps d’appeler la rédaction pour informer de l’arrivée de Bah Oury. Le problème, c’est qu’à aucun moment de la conversation, celui qui a reçu une balle en pleine poitrine, à bout portant, n’a signalé que Bah Oury tenait une arme à feu, un détail important qui ne lui aurait sans doute pas échappé si ce fait était vérifiable.
Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que de nombreux journalistes qui ont lu le communiqué ont accueilli avec une réelle gêne la version de l’UFDG. Pourquoi une telle tentative d’explication qui, de toute évidence, ne s’imposait pas étant donné que l’enquête venait tout juste d’être ouverte ?
L’incident du vendredi 5 février 2015 est si grave que pour un parti de la taille de l’UFDG il est d’un enjeu crucial de déterminer exactement ce qui s’est passé. C’est la première fois qu’un journaliste est abattu par balle dans ce pays alors qu’il ne faisait que son devoir : se rendre à la source de l’information. En attendant, Bah Oury en personne accuse un des éléments de la garde rapprochée du leader du l’UFDG, une piste prise très au sérieux par les enquêteurs.
Par Issa CAMARA