Censure

Gouvernement Youla: Equipe d’action ou d’incompétents? (Par Hasmiou Tall)

Pour ce qui est des intellectuels ou ceux supposés l’être, plusieurs ont applaudi à la nomination de l’équipe gouvernementale actuelle avec l’entrée de seize nouveaux hauts cadres. En dehors du ministre des Affaires étrangères, celui de la Pêche, des Transports, de l’Enseignement pré universitaire ou encore de l’Action sociale, l’on se disait tout de même que les autres membres du gouvernement, bardés de diplômes des plus grandes universités du monde, allaient contribuer à sortir le pays de l’ornière. Ce sont en effet, pour la plupart, des jeunes qui ont fait de brillantes études et dont les CV se passaient de commentaires. Hélas, trois mois à peine après son installation, l’équipe gouvernementale actuelle s’est fait remarquer par son inexpérience, son amateurisme, les fuites en avant, sa méconnaissance des réalités sociopolitiques du pays. Bref, son incompétence avérée dans la conduite des affaires de l’Etat.

Arrivée dans un contexte particulièrement difficile pour la Guinée qui venait de sortir d’une des plus graves crises sanitaires que le pays n’ait jamais connue et après une élection présidentielle des plus coûteuses, la nouvelle équipe gouvernementale ne pouvait pas s’attendre à un état de grâce. Comme elle s’est pompeusement baptisée ‘’équipe d’action’’, l’on attendait dès lors d’elle des actions rapides d’envergure afin de remettre le pays en faillite sur le bon chemin. La réflexion n’aura pas été longue. Elle aura été surtout un raccourci pour ce qui est de la recherche des solutions dans la crise économique et financière qui frappe le pays. Son ingéniosité aura été de mettre en branle une série de mesures que Toto lui-même aurait trouvé tout seul : augmentation des recettes publiques par des taxes et impôts de plus en plus élevés. Quel génie, quelle trouvaille, quelle astuce ! Retirant à l’économiste le principe qui voudrait que ‘’trop d’impôts tue l’impôt’’, l’équipe s’est lancée dans cette mièvrerie sans consulter le corps social pour lequel il est censé contribuer à améliorer les conditions de vie. Conséquences immédiates : plaintes, complaintes et grève généralisée. Pensait-elle naïvement que la pilule aurait passé aussi facilement ? De la TVA de 18% on remonte à 20% avant de revoir sa copie sur certains produits de large consommation après le cri des consommateurs. Tout comme ces 5% arrachés dans les maigres émoluments des fonctionnaires pour une caisse dite de prévoyance sociale et qui n’est en réalité qu’un fourre-tout d’accumulation de recettes. Là également, le gouvernement a fait marche-arrière face à la complainte des pauvres travailleurs. Mais ne disposant pas d’associations de consommateurs représentatives, la TVA sur la téléphonie a rendu le téléphone impraticable dans un pays qui se vante d’être à l’ère du numérique, de l’Internet, etc. Pis, l’utilisation à outrance de la planche à billets ces deux dernières années a créé une inflation des plus insidieuses, augmentant presqu’au double le prix des produits sur le marché.

Aujourd’hui, selon le Gouverneur de la Banque centrale, l’endettement du Trésor auprès de son institution dépasse les 1700 milliards de francs guinéens. A la mort de Lansana Conté en 2006 cet endettement était à près de 2000 milliards pour culminer à 3000 milliards à la fin de la transition. Les efforts remarquables du gouvernement d’Alpha Condé ont permis d’éponger cet endettement, renouer avec le FMI et obtenir l’initiative en faveur des Pays pauvres très endettés (PPTE). Comment sommes-nous alors revenus à ces 1700 milliards de GNF, pas loin des ‘’performances’’ du régime de Lansana Conté. On nous enfoncera la sempiternelle crise Ebola, alors que le pays était soutenu par la communauté internationale qui n’a pas manqué de mettre, et à plusieurs reprises, la main à la poche. Il est donc vrai qu’il y a eu Ebola mais il y a également eu mauvaise gestion, corruption, détournements de deniers publics, toutes choses qui ont prévalu au dérapage du programme avec le FMI. Car ce FMI-là sait qu’il y a Ebola mais s’est tout de même dit qu’il y a eu trop de laisser-aller dans la gestion.

Cette nouvelle équipe arrive en ce moment, et croit trouver des solutions en prenant les plus simples : faire payer au peuple les conséquences de la gabegie financière de l’Etat. Elle n’est pas à la hauteur, car composée de jeunes inexpérimentés, incapables d’analyser le tableau des opérations financières de l’Etat (TOFE), qu’ils ne connaissent ni d’Adam ni d’Eve, et se refusent de travailler avec les cadres aguerris qui en ont la compétence. Dès lors, l’on se réfugie devant des tablettes, et l’on préfère travailler avec des e-mails pour ne pas dévoiler en public ou en réunion ses platitudes. De parfaits délinquants financiers sont propulsés à la tête des régies de l’Etat qui, quoique jeunes, ont déjà fait leurs armes dans la corruption, à la Primature et ailleurs. Non, pour la situation économique difficile actuelle, le pays a besoin de guerriers, pas de marmots qui lâcheraient du lait si on leur pinçait le nez.

Hasmiou Tall

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