Les démarches souterraines entreprises depuis bien longtemps par le chef d’une fraction de l’U.F.D.G., pour obtenir un entretien avec le président Alpha CONDÉ ont fini par aboutir. La rencontre tant souhaitée a eu lieu. Au palais SEKHOUTOUREYA, sous les projecteurs de la R.T.G., les deux personnalités ont bruyamment célébré leur nouvelle « entente » par des embrassades télévisées.
Dans la foulée, le président CONDÉ a profité du décès d’un proche de M. DALEIN pour effectuer une visite ostensible à son domicile. Ce qui est d’ailleurs conforme (moins l’ostentation) à nos traditions. Depuis, peut-être sur ordre, d’autres rencontres plus ou moins clandestines s’en sont suivies. Un « Rastignac » tropical ne représentant que lui-même, choyé des deux protagonistes, aurait-il été subrepticement intronisé « médiateur » parallèle, à la place de personnalités légalement instituées et donc plus légitimes, pour faciliter un « dialogue démocratique » dans une période de tension sociopolitique comme celle que connaît notre pays? Bonnes nouvelles ?—A voir. L’un des drames dans la vie publique guinéenne, est que ses principaux acteurs (politiques et gouvernementaux) choisissent systématiquement des pistes informelles à la place de voies officielles légalement instituées. Ainsi, le président transforme délibérément les INSTITUTIONS officielles légales et légitimes en OBJET informel, vide de tout contenu.
La rencontre entre le président de la République et le chef d’une fraction d’un important parti de l’opposition est souhaitable et normale
En effet, la validité du contenu d’un possible accord politique dépend aussi et dans une certaine mesure, de la représentativité sociologique de celui ou celle qui prétend en être l’initiateur. Dans le cas présent, il serait imprudent d’écarter tout doute, sauf à considérer que le bagout tient lieu de crédibilité, car de bagout, notre « Rastignac » tropical n’en manque pas. Et faut-il le rappeler, lui et le président ne sont à l’aise que dans l’informel, c’est-à-dire dans l’opacité.
La rencontre entre le président de la République et le chef d’une fraction d’un important parti de l’opposition est souhaitable et normale. Dans la configuration qui est celle de notre pays, un Opposant à une politique, ne devrait pas se laisser faire passer pour l’Ennemi de celui dont il conteste la politique. S’opposer à une politique, c’est empêcher son application, si on la considère nocive, ou tenter de l’infléchir dans le sens que l’on croit profitable au plus grand nombre. C’est la voie choisie par l’U.F.R. dès la « réélection » imposée de M. Alpha CONDÉ. Car à nos yeux, la paix civile dans notre pays, prime sur toute autre considération, y compris sur nos intérêts politiques partisans. M. Cellou Dalein DIALLO vient d’en reconnaître la pertinence et la validité en s’y ralliant, même tardivement, et de manière presque clandestine.
Je plaide donc qu’on lui épargne les propos désobligeants que certains de ses bras droits avaient déversés sur l’U.F.R. et son Chef, sans qu’il ne lève le moindre doigt pour y mettre fin. Peut-être, était-il absent du pays, ou ne les avait-il pas entendus ? Mais au fond, l’essentiel est que le niveau de tension dans notre pays cesse d’augmenter. Cependant, quelques interrogations subsistent, malgré les manifestations ostensibles d’ « entente » entre les nouveaux « amis ».
Une entente précipitée, aux motivations obscures.
L’apparente concorde, par sa soudaineté, intrigue plus d’un Guinéen. L’irruption injustifiable d’un petit « Rastignac» tropical dans ce processus, épaissi encore plus le trouble ressenti. Peut-être est-il chargé par M. Alpha CONDÉ de faire la « guerre » à SIDYA, ou encore de « surveiller » les militants R.P.G. qui, devenus plus clairvoyants, acceptent de moins en moins les propos vexatoires du genre « les Malinké et cadres malinké sont les plus malhonnêtes…. » ?–L’hypothèse pour, osée qu’elle soit, n’est pas à balayer d’un revers de main. La « bienveillance » inexpliquée du « chef de file » de l’opposition à l’endroit du chef de l’Etat qui, lui-même est devenu subitement humble et « conciliant », n’efface pas toutes les interrogations. Son ambition non avouée mais réelle d’être promu à la tête de l’Union Africaine, n’est un secret pour personne. Or les manifestations populaires fréquentes réussies, n’incitent pas ses collègues présidents africains à le soutenir dans ses ambitions démesurées de « grandeur » personnelle. De ce fait, le désir d’être perçu par ses homologues comme un Chef d’Etat « démocrate », ouvert au dialogue, n’est pas étranger à sa conversion quasi-magique aux vertus du dialogue, et à la transparence. Cela étant dit, le « chef de file » de l’opposition qu’il a désigné, est lui-même désireux de sortir du ghetto dans lequel certains de ses extrémistes, peut-être contre son gré, l’ont enfermé depuis bien longtemps.
Le président Alpha CONDÉ a une culture politique authentiquement communiste, de type stalinien
Néanmoins, ce contexte nouveau doit être consolidé, malgré les motivations troubles qui ont présidé à sa naissance. Car si nous, Fils et Filles de Guinée, avons besoin de paix civile sur la TERRE de nos ANCÊTRES communs, on ne peut affirmer avec certitude qu’il en est de même pour le président CONDÉ. On peut même émettre l’hypothèse tout à fait raisonnable, qu’une certaine « insécurité » lui est utile. Puisque, en communiste averti et proactif, l’argument de l’ « insécurité », et peut-être même de « coup d’Etat » peut à tout moment, être invoqué en temps opportun, c’est-à-dire lorsque la grogne populaire inévitable et légitime, s’extériorisera. Dans tous les cas, quelles que soient leurs motivations, il faut espérer, pour l’un et l’autre, et pour le pays, qu’en arrière-plan, il n’y a pas que calcul, ou si calcul il y a, que ce soit aussi dans l’intérêt de l’immense majorité de nos compatriotes.
Le président Alpha CONDÉ a une culture politique authentiquement communiste, de type stalinien. Sa conviction et sa fidélité à la pratique de cette doctrine ne peuvent être suspectées d’opportunisme. C’est à son honneur. Mais c’est aussi cela un des problèmes de gouvernance de notre pays. Car la «conversion » opportune à la « démocratie » et au dialogue ne tiennent pas une seconde, en face de cinquante ans de pratique communiste militante. Un communiste reste un communiste lorsqu’il arrive au pouvoir. Il n’y a pas de communiste, ancien président. Un communiste, même ancien, meurt au pouvoir. Aucune élection ne peut l’en faire partir. Il les « gagne » toutes, par tous les moyens, sans exclusive. Et les seuls « accords » qu’il respecte, ce sont ceux qui lui permettront de rester au pouvoir aussi longtemps qu’il le souhaitera. Oublier cela avec M. Alpha CONDÉ, c’est s’enfermer soi-même dans une prison et en jeter la clé à la mer.
Un dialogue peut-être utile, mais dont les acteurs choisis, sont d’inégale représentativité, au plan politique.
Comme toujours, en politique, on ne peut parler d’apaisement sans dialogue entre les différentes composantes du champ politique. Le dialogue vrai, franc, direct, et loyal avec les partis politiques dont la REPRÉSENTATIVITÉ est connue et reconnue dans le pays, devrait donc être une banalité. A l’évidence, ça ne l’est pas encore en Guinée. Une situation anormale. Cette anomalie s’explique en partie par la perversion de la représentativité de partis politiques en Guinée, perversion patiemment et efficacement organisée par M. Alpha CONDÉ pour ses intérêts personnels politiciens.
L’immense majorité des partis, n’a aucun adhérent, si on met de côté la famille, le ou les fondateurs pour lesquels, le parti reste un « placement »
Dans notre pays, plus d’une centaine de partis politiques sont légalement reconnus. Il continue de s’en créer. Tous les courants d’opinons peuvent s’organiser et s’exprimer publiquement. On pourrait parler de vitalité « démocratique ». Cependant, la quantité ne fait pas nécessairement « démocratie ». Au contraire, elle en pervertit le sens par la confusion qu’elle crée inévitablement dans un système à peine sorti d’une dictature sanguinaire (Sékou TOURÉ) d’abord, ensuite d’une anarcho-autocratie militarisée (Lansana CONTÉ), et maintenant, presque installé dans une incompétente autocratie affairiste nauséeuse (Alpha CONDÉ). L’immense majorité des partis, n’a aucun adhérent, si on met de côté la famille, le ou les fondateurs pour lesquels, le parti reste un « placement » qui sera monnayé le moment venu, contre un poste administratif ou gouvernemental juteux. En effet dans notre pays, l’espoir d’enrichissement rapide, ou de trouver un simple emploi alimentaire, par et dans des fonctions publiques, est très largement entretenu. Car en agglomérant autour de lui des partis dont l’existence se réduit à leurs sigles, le président Alpha CONDÉ perverti à dessein, le fait pourtant légitime de REPRÉSENTATIVITÉ en politique. Or l’existence juridique d’un parti, ne signifie en rien sa représentativité sociopolitique. La représentativité d’un parti politique, et c’est ce qui devrait prévaloir sur toute autre considération, ce sont ses adhérents, son expérience, sa capacité à mobiliser au-delà de ses militants, son autonomie de réflexion, d’action, de fonctionnant avec ses ressources propres qui sont la garantie de son autonomie.
Les petits partis, ou plus exactement ceux que les journalistes guinéens appellent parfois non sans ironie les « partis SIGLES », sans être vraiment représentatifs au plan sociopolitique, ne sont pas tous inutiles. En leur sein, il existe vraisemblablement des personnes remarquables, en mesure d’apporter au débat, des réflexions intéressantes qui méritent attention.
Toutefois, certains chefs de « parti SIGLE » ont tendance à se prendre pour ce qu’ils ne sont pas. Installés dans l’illusion de leur fictive importance, ils formulent des exigences que ne justifie ni leur poids personnel, ni la représentativité du parti dont ils sont les « chefs ». Au demeurant, leur parti, à part eux-mêmes, reste un SIGLE creux, sans ou peu de contenu.
Il ne faudrait pas en déduire que leur existence est illégitime. L’exaspération de certains d’entre eux vient selon moi, du fait qu’ils ont été spoliés du résultat de la mobilisation populaire dont ils ont contribué à accroitre l’ampleur. Alors qu’ils ont mobilisé au tant ou plus que des militants de l’U.F.D.G., c’est cette dernière qui a été présentée comme seule et unique organisatrice de la dernière manifestation. C’est de ce succès dont M. Cellou Dalein DIALLO s’est prévalu pour mettre la pression sur son tout nouvel « ami », le président Alpha CONDÉ. Et c’est aussi fort de ce même succès, que le « Conseiller » politique du président de l’U.F.D.G. renvoie sèchement les « petits partis » et leurs chefs, après avoir épuisé leurs militants sur le front des manifestations.
Le pays est déjà vendu en partie, morceau par morceau à des groupes d’intérêts dont nous Vrais Guinéens, ignorons tout.
L’état dans lequel se trouve la Guinée est dramatique. La catastrophe n’est pas loin. Le pays est déjà vendu en partie, morceau par morceau à des groupes d’intérêts dont nous Vrais Guinéens, ignorons tout. Notre président dont la « réélection » dès le premier tour a été IMPOSÉE en 2015, n’a pas d’ATTACHE dans notre pays, et n’y est pas ATTACHÉ, même au plan émotionnel. De ce fait, il ne peut se sentir concerné par la DÉCOMPOSITION de notre pays. Il est attaché aux privilèges de la fonction, mais pas aux fils et filles du pays, ni d’ailleurs au pays lui-même.
Mamadou Billo SY SAVANÉ