Censure

Faire des enfants pour avoir des papiers en France : Attention, danger !

Avec le ministre français de l’immigration Eric BESSON, j’ai participĂ© Ă  un groupe de travail sur l’incrimination de l’escroquerie sentimentale Ă  des fins migratoires. J’ai dĂ©fendu devant ce groupe que l’administration française n’avait pas le droit de s’immiscer dans la vie sentimentale des Ă©trangers, pour dĂ©terminer si leur amour est sincĂšre ou sournois. Cela dit, l’honnĂȘtetĂ© et la pratique du droit des Ă©trangers obligent Ă  admettre que des Ă©trangers bricolent un mariage (mariage gris) ou « fabriquent » un bĂ©bĂ© (bĂ©bĂ© gris) uniquement pour obtenir un titre de sĂ©jour. Il y a lieu d’avertir les africains qui banalisent ces manƓuvres sur les risques qu’ils encourent.

Mariage gris : je t’aime, moi non plus !

Il ressort de la loi française que tout Ă©tranger non polygame mariĂ© Ă  un ressortissant français peut obtenir de plein droit un titre de sĂ©jour « vie privĂ©e et familiale », s’il mĂšne une vie commune effective avec son conjoint. Il arrive ainsi qu’un Ă©tranger, faisant l’objet d’un refus de titre de sĂ©jour, se dĂ©pĂȘche d’épouser un « gaulois » ou d’engendrer un petit « gaulois » pour Ă©chapper Ă  l’éloignement. Des « sans papiers », Ă  qui la loi ou la prĂ©fecture n’offrent aucune autre chance d’obtenir un titre de sĂ©jour, succombent Ă  cette tentation. Ce dĂ©tournement frauduleux du droit fondamental Ă  une vie privĂ©e et familiale normale peut ĂȘtre le fait de l’étudiante titulaire d’un Master 2, qui n’a pas pu faire un changement de statut pour obtenir un titre de sĂ©jour »salariĂ© ». Comme la loi lui impose de rentrer au pays, elle dit OUI au mariage Ă©clair que lui propose son camarade de classe français ou son compatriote Ă©tranger qui dĂ©tient un titre de sĂ©jour. Alors qu’en temps normal, ce camarade Ă©tudiant n’aurait mĂȘme pas espĂ©rĂ© un bisou de sa part. Cela peut aussi ĂȘtre le fait d’un Ă©tranger qui a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, Ă  qui son avocat, en manque d’inspiration ou d’expertise en droit des Ă©trangers, conseille de se marier Ă  un ressortissant français pour bloquer toute procĂ©dure d’expulsion Ă  son encontre. C’est aussi le cas d’un Ă©tranger qui en a marre d’essuyer des refus de titre de sĂ©jour, et qui improvise un amour insidieux l’obligeant Ă  jouer le gigolo ou la courtisane, pendant tout le temps nĂ©cessaire Ă  l’obtention d’un titre de sĂ©jour en tant que conjoint de français(e). Une fois son titre de sĂ©jour en poche, il n’hĂ©sitera pas Ă  trouver un prĂ©texte pour larguer son naĂŻf conjoint français.

BĂ©bĂ© gris : OĂč t’es, papa oĂč t’es ?

D’autres Ă©trangers, plus pressĂ©s, zappent la case mariage et font rapidement un enfant avec un ressortissant français pour obtenir un titre de sĂ©jour. La loi française attribue un titre de sĂ©jour Ă  tout Ă©tranger non polygame, qui est pĂšre ou mĂšre d’un enfant français vivant en France, s’il contribue Ă  son entretien et son Ă©ducation. Les Ă©trangers qui font des « bĂ©bĂ©s gris » sont gĂ©nĂ©ralement rattrapĂ©s par l’effet boomerang de leur turpitude : titre de sĂ©jour non renouvelĂ© pour dĂ©faut d’entretien de l’ « enfant gris » ; chantage de la mĂšre de l’enfant qui leur soutire de l’argent avec la menace de dĂ©noncer leur manĂšge Ă  la prĂ©fecture ; infidĂ©litĂ© ou divorce au bout de quelques mois du fait que le mariage n’était pas motivĂ© par une intention matrimoniale, etc.

Pour Ă©viter le poids trĂšs lourd de la procrĂ©ation d’un enfant juste pour obtenir des papiers, des Ă©trangers, plus machiavĂ©liques, se livrent Ă  un pĂ©rilleux business de reconnaissance frauduleux de leur enfant par un français : les vrais gĂ©niteurs se mettent d’accord pour payer jusqu’à 10 000 euros Ă  un français pour qu’il se dĂ©clare comme Ă©tant le pĂšre de leur enfant. De ce fait, l’enfant Ă©tranger devient automatiquement français. Par consĂ©quent, la maman Ă©trangĂšre bĂ©nĂ©ficie d’un titre de sĂ©jour en tant que mĂšre d’un enfant français. Comme les français de peau blanche font plutĂŽt des enfants mĂ©tis avec des africaines de peau noire, ces derniĂšres ciblent alors les français antillais pour procĂ©der Ă  cette tĂ©mĂ©raire fraude Ă  la filiation. Ce business compromet l’état civil de l’enfant innocent, et accouche souvent d’une souris judiciaire.

Sanctions grises : je ne savais pas que c’est si grave

Les Ă©trangers tentĂ©s par ces transgressions ne se rendent pas souvent compte du risque pĂ©nal qu’ils encourent. La loi française punit toute personne qui contracte un mariage ou reconnait un enfant uniquement pour obtenir des papiers, Ă©viter l’éloignement ou obtenir la nationalitĂ© française, Ă  une peine de prison de 5 ans, pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison si plusieurs personnes ont contribuĂ© Ă  la fraude. Pis, le seul fait d’avoir tentĂ© de faire un « mariage gris » ou un « bĂ©bĂ© gris » peut vous amener en prison.
Pis encore, votre conjoint français peut vous faire emprisonner s’il dĂ©couvre plus tard que vous l’avez Ă©pousĂ©, ou lui avez fait un bĂ©bĂ©, juste pour obtenir un titre de sĂ©jour.
Dans cette hypothĂšse, votre vie dĂ©pend de lui : vous ĂȘtes Ă  sa merci et vous devenez psychologiquement son esclave. A la sortie de prison l’étranger condamnĂ© pour « mariage gris ou « bĂ©bĂ© gris » peut se voir interdit de remettre le pied en France pour plusieurs annĂ©es ou dĂ©finitivement ; et ses biens peuvent ĂȘtre confisquĂ©s. A y voir plus clair, ce n’est pas un bon deal.

Il existe des moyens légaux pour régulariser sa situation administrative en France, sans faire de mal à un conjoint et à un bébé innocent, et sans se tirer une balle sur la cheville.
A bon entendeur, vigilance !

Aliou TALL,
Juriste,
Président du Réseau Africain de Défense des Usagers, des Consommateurs et du Citoyen (RADUCC)