Censure

Le président de l’INIDH tire la sonnette d’alarme: ‘‘La démocratie guinéenne en danger’’ (déclaration)

Peuple de Guinée, Le Directeur Général de la police nationale Bangaly Kourouma, a déclaré, le Jeudi 24 Novembre 2016, au siège du RPG  Arc-en-Ciel dans le sud de la Guinée,  que :

« Le Président de la République de la Guinée, Pr Alpha Condé, restera au pouvoir tant qu’il est en vie ».

Cette déclaration d’une gravité extrême suscite de sérieuses préoccupations, en ce sens que :

  • L’auteur des propos est le chef suprême de la police nationale, le détenteur de l’autorité et du pouvoir légitime d’encadrement des manifestations sur les places et les voies publiques, ainsi que de la gestion de la sécurité publique ;
  • Les propos en question qui violent l’obligation de réserve et de neutralité qu’impose la loi à tout agent de la fonction publique, sont totalement incompatibles avec les idéaux de Démocratie et des Droits Humains auxquels aspirent le peuple de Guinée et pour lesquels d’importants sacrifices ont été consentis notamment de 2007 à nos jours ;
  • Elle intervient à un moment où le pays se pose des questions sur l’avenir de sa Démocratie et de l’Etat de Droit auxquels aspire son peuple, avec notamment :
  1. Les accords du 12 Octobre dont certaines dispositions sont un risque réel pour la Démocratie et les Droits de l’Homme :
  • Le mode de désignation des chefs de quartiers et de districts est assez flou et nécessite des débats sérieux pour rassurer tout le monde car les chefs de quartiers jouent un rôle plus important que les maires dans la transparence des élections. Par conséquent, des maires non élus constituent moins une menace sur l’encrage Démocratique que des chefs de quartiers non élus ;
  • L’indemnisation des victimes de 2013 est une avancée à saluer, mais le Ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation ne doit pas la conduire même si c’est son Ministre qui a facilité l’obtention des dites accords. Une commission indépendante doit être constituée pour le faire. D’ailleurs, la Commission Provisoire de réflexion sur la réconciliation nationale a rendu son rapport dans lequel figure une recommandation pertinente concernant la mise en place de ladite commission ;
  1. Une injustice inacceptable à l’endroit de la dame Fatou Badiare, Alpha Oumar Boffa Diallo (AOB) et consort qui croupissent en prison pendant que d’autres, tel que Bah Oury condamné dans le même dossier ont bénéficié d’une grâce présidentielle et sont libre de tous mouvements ;
  2. Le dossier du 28 Septembre qui traine en longueur et dont beaucoup d’observateurs sont convaincus de l’incapacité de la justice nationale à réussir ce procès toute seule.

De ces observations découlent les remarques suivantes :

  1. Des manœuvres pourraient être en cours pour remettre en cause l’un des acquis fondamentaux de la dernière transition qui fixe le nombre de mandats Présidentiels à deux ;
  2. La détention de Fatou Badiar, d’Alpha Oumar Boffa Diallo (AOB) et consorts a perdu sa légitimité d’autant plus que le procès ayant abouti à leur condamnation n’est pas indemne de critiques ;
  3. Le procès du 28 Septembre pourrait, soit ne jamais se tenir, soit aboutir à un procès contesté dont les verdicts donneront libre cours à toutes formes de spéculations, donc de crises ;
  4. Les aspects négatifs de notre histoire récente pourraient se reproduire avec des violations massives des droits humains et l’impunité comme système de gouvernement ;
  5. Des crises politiques et sociales graves pourraient éclater avec des risques de répressions inhumaines émanant de la police dont les positions du directeur sont sans équivoques ;
  6. Le silence du Ministre de la Sécurité, supérieur hiérarchique dudit Directeur, laisse penser à un complot latent de l’appareil sécuritaire d’Etat contre toutes velléités de contestations, pourtant prévues par la Constitution ;
  7. Les recommandations de la Commission Provisoire de Réflexion sur la Réconciliation nationale sont oubliées, malgré l’espoir qu’elles ont suscité chez les populations en quête de justice, d’unité, de stabilité et de paix durable ;

Recommandations:

A monsieur le Président de la République, je recommande très fortement de :

  • Révoquer le directeur de la police nationale, monsieur Bangaly Kourouma afin de réaffirmer son adhésion totale aux valeurs de Démocratie acquises de haute lutte par son peuple et à laquelle il a lui-même contribué ;
  • Faire une déclaration publique dans laquelle il lève toute ambigüité sur la probabilité d’un troisième mandat, afin de clore le débat sur cette question qui risque de susciter la prochaine crise politique et sociale la plus grave de notre histoire récente;
  • Mettre en œuvre les recommandations du rapport de consultations nationales de la Commission Provisoire de Réflexion sur la Réconciliation nationale ;
  • Accorder sa grâce à Dame Fatou Badiar, Alpha Oumar Boffa Diallo et consorts ;
  • Transférer le dossier du 28 Septembre à la Cour Pénale Internationales de (CPI) ou à une juridiction supranationale plus indépendante et plus efficace afin d’assurer la garantie de non répétition de crimes de cette nature et briser le sentiment qu’ont certaines catégories de la société guinéenne d’être au-dessus des lois.

Aux membres du gouvernement et aux cadres de l’Administration d’observer strictement leurs obligations de réserver et de neutralité afin que les sévices publics bénéficient à tous les citoyens sans distinction aucune ;

Au Procureur de la République de poursuivre sans complaisance aucune, le Directeur Générale de la Police nationale car ce genre de discours porte les germes de troubles graves à l’ordre public et susceptibles de mettre en danger la stabilité de notre pays ;

A l’élite guinéenne, d’éviter toute prise de positions allant à l’encontre de la Démocratie, des Institutions, de la Constitution et des engagements internationaux de la Guinée ;

Aux Institutions de la République, de soutenir tous les efforts visant à consolider les acquis démocratiques et les Droits de l’homme ;

Aux partis politiques et la Société Civile de se mobiliser pour défendre les Institutions, la Constitution et les aspirations légitimes du peuple de Guinée ;

A la communauté internationale d’apporter son appui technique et financier aux efforts du Président de la République pour mettre en œuvre les recommandations de la Commission provisoire de Réflexion sur la Réconciliation et de s’impliquer pour éviter à la Guinée, une crise profonde aux conséquences imprévisibles.

Vive la Guinée

Vive la coopération internationale

Que Dieu Bénisse les Guinéens,

Je vous remercie

Conakry le 28 Novembre 2016

Le président

Mamady KABA

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