N’étant pas libre les prochains dimanches, la radio Evasion m’a demandé de partager, avec ses auditeurs, mon analyse des ragots sur l’agression du 22 novembre 1970 et ma première réflexion sur le rapport et les recommandations de la Commission Provisoire de Réflexion sur la réconciliation nationale.
Je voudrais d’abord préciser que les thèmes proposés méritent analyse et mise au point.
Car, par manque d’arguments, les ennemis historiques d’Ahmed Sékou Touré continuent à avancer des accusations qui ne résistent à aucune analyse objective basée sur des faits résultant de la lecture scientifique des documents et des témoignages irréfutables produits par les vrais acteurs et témoins des faits historiques de notre histoire récente.
Celui qui tente de les contre dire est aussitôt objet d’injures, d’accusations gratuites et calomnieuses, armes des faibles d’esprit et des ethnocentriques indécrottables. Heureusement que nous sommes de ceux qu’aucune menace, aucune injure, aucune accusation calomnieuse n’ébranle ; qui ne sont intéressés que par la recherche de la vérité historique et qui ont donc pour devise: « le chien aboie, la caravane passe ».
C’est dire que certains détracteurs–des vrais mercenaires de la plume– qui, au lieu d’opposer des faits vérifiables aux faits vérifiables, se ridiculisent dans des ragots de rue et perdent vraiment leur temps et leur crédibilité, s’il en eurent un jour.
Certes, il est vrai que la critique est aisée et l’art est difficile, surtout pour les cancres. Mais nous posons, malgré tout, cette question : pourquoi ne militent-ils pas pour un débat public contradictoire en Guinée même, puisqu’ils sont sûrs de détenir la vérité ?
Ils perdent leur encre et salive, s’ils croient pouvoir nous faire taire en nous insultant ; c’est eux qui se fatigueront parce que nous nous sommes têtus, incorruptibles et n’avons peur que d’avoir peur de dire et de défendre ce que nous croyons être la vérité. Donc, a bon entendeur, salut !
Surtout que tout le monde sait que le mensonge est le sport favori de certains guinéens.
Il est vrai aussi que nous avons à faire parfois à des cerveaux malades !!! Ceux-là ne méritent que le mépris et la pitié, comme ce qui s’est produite le 22 novembre 2016 au Palais du Peuple à Conakry.
Mais revenons aux ragots qui sont véhiculés sur l ‘agression du 22 novembre 1970 et au rapport de la CPRN.
- La substitution du mot débarquement au mot
Ceux qui le font veulent tout simplement atténuer la gravité de l’opération, minimiser les conséquences ou banaliser l’opération.
Selon le Petit Larousse illustré, le débarquement, dans son sens militaire, « c’est le transport entre les navires de guerre et un littoral (généralement occupé) de troupes et de matériels d’armement ». En général, ce sont des alliés d’un régime en place qui viennent l’aider à repousser les envahisseurs.
Mais si ceux qui ont attaqué la Guinée le 22 novembre 1970 et leurs semblables considèrent que l’opération qu’ils avaient organisée était destinée à aider leurs amis, les ennemis intérieurs (ou 5e colonne) d’Ahmed Sékou Touré, à renverser, son régime, ils peuvent l’appeler, par néologisme, débarquement.
Par contre, nous ne connaissons qu’un seul vrai « Débarquement », celui à partir de la Normandie, des alliés venus libérer totalement la France occupée par les Allemands durant la Seconde Guerre mondiale.
Enfin, le mot agression est défini comme suit par le même Petit Larousse illustré : « une attaque non provoquée et brutale ». L’attaque du 22 novembre 1970 était une vraie attaque brutale non provoquée donc une agression contre la Guinée indépendante par une puissance coloniale ennemie, le Portugal aidée des guinéens de l’extérieur qui voulaient prendre le pouvoir politique par les armes et l’exercer non au profit du peuple de Guinée, mais de celui de leurs bailleurs de fonds ?
En tout état de cause, la communauté internationale (ONU et l’OUA) avait jugé et condamné l’opération criminelle du 22 novembre 1970, comme une agression contre la République de Guinée qui a refusé toute néo-colonisation depuis le 28 septembre 1958 au 3 avril 1984.
C’est dire que substituer le mot débarquement au mot agression, c’est vouloir excuser les morts et blessés innocents (365 morts, selon les autorités guinéennes de l’époque et « plus de 500 », selon le capitaine Portugais Alpoim Calvao) et les dégâts matériels importants que l’on a enregistrés à l’occasion de cette attaque criminelle injustifiable .
Le capitaine Portugais Alpoim Calvao qui avait dirigé cette agression, l’appelle d’ailleurs, dans son Livre, « O ATAQUE A CONAKRY », l’ attaque de Conakry.
- Face aux critiques de Builguissa Diallo
Comme je viens de le dire, il n’est pas dans mes habitudes de répondre aux attaques personnelles dont je suis victime surtout de la part des faibles d’esprit et des ethnocentriques indécrottables. Quand tu défends la vérité dans un pays de mensonge, d’intriques et d’ingratitude comme la Guinée, il faut t’attendre à tout.
Et puis j’ai retenu de mon père, en réponse à une de mes plaintes contre un membre de la famille, ceci : « si on te poursuit, c’est que tu es devant ». Surtout qu’aucun de mes détracteurs ne peut se permettre de contester mes sources documentaires sur les complots, après vérification.
En ce qui concerne cet auteur, Il a fallu la parution de mon livre Autopsie d’un pamphlet .Camp Boiro, parler ou périr d’ Alsény René Gomez paru chez ANIBWE éditions 2009 pour qu’elle se résigne, selon mon éditeur ivoirien , à publier les « archives de son père ». Ce qu’elle a fait en 2014 chez l’Harmattan en journaliste partisane, se livrant à des hypothèses et des conclusions hasardeuse, tirées par les cheveux ; elle s’attaque à moi de façon injuste et déplacée dans cet ouvrage, mais confirme non seulement la réalité de l’opération, également la participation de son père à cette ignoble opération. Et c’est ce qui m’intéresse, même si elle tente vainement de démontrer par ailleurs que son père avait joué un rôle essentiel que je refuserais de lui reconnaître, dans l’organisation de l’agression du 22 novembre 1970.
Et j’ai d’ailleurs fini par comprendre que ce n’est pas pour rien que malgré son insistance, le capitaine Alpoim Calvao n’a voulu répondre qu’à trois de ses questions , alors qu’il m’ avait consacré 3 heures et demi d’interview, le 10 août 2004, à Bissau (Cf. l’annexe de mon livre déjà signalé, de la page 277 à la page 289 , illustrée par l’une de nos nombreuses photos).
Je trouve son ouvrage malgré tout utile même si feu Jean-Marie Doré l’a qualifié de « roman arrangé pour sublimer un homme qui a trahi David Soumah qui l’avait choisi pour diriger militairement l’opération du côté du FNLG », dit-il.
- . De la liquidation des prisonniers trouvés au camp Boiro au moment de l’agression du 22 novembre 1970
Quant à la raison de la liquidation des prisonniers trouvés au camp Boiro au moment de l’agression du 22 novembre 1970, on n’ a pas besoin d’être un grand clerc pour le connaitre. Il suffit de feuilleter les documents signalés et accessibles à tous ou de participer, chaque année, à la conférence-débat organisée au Palais du Peuple consacrée à l’agression du 22 novembre 1970 à l’occasion de chaque anniversaire; ces rencontres sont des occasions d’informations débattues contradictoirement.
Prenons la conférence-débat du 22 novembre 2016.
- Un jeune intervenant, Amadou Doumbouya, a cité le cas de son père adoptif recruté à Bafata (Guinée-Bissau) comme mercenaire, avec la promesse de fortes sommes devant être versées sur un compte ouvert à son nom; après l’agression, l’intéressé s’est rendu compte, après vérification, que c’était un faux compte bancaire et rien ne lui sera versé, à la fin de la criminelle opération.
- Un autre témoignage, celui repris de Mr Ismaël Condé, professeur de sociologie, qui séjourna du 20 janvier au 14 novembre 1970 au camp Boiro comme prisonnier : selon ce collègue, tous les prisonniers du camp Boiro étaient informés de l’éminence de l’agression qui se préparait contre la Guinée ; ce qui est confirmé par tous les organisateurs de l’ignoble opération, en particulier le capitaine Alpoim Calvao : « déjà, ajoute le collègue, au mois de juillet 1970, rares étaient les intellectuels prisonniers au camp qui n’étaient pas informés qu’immanquablement l’année allait finir en même temps que le régime en place » ; que cette information lui a été donnée par un médecin qui a été arrêté dans le complot qui venait d’être déjoué. Ce médecin avait été chargé par le Président Ahmed Sékou Touré de le soigner d’une maladie qu’il avait contractée un mois auparavant. C’est au cours d’une séance de soins que le médecin guinéen prisonnier révèle, comme pour soutenir son patient, en ces termes : « Mon Petit, il faut tenir ; d’ici décembre, tout va finir », sans toutefois lui préciser le comment et la date même approximative du changement. Quatre mois après, ce fut l’agression du 22 novembre 1970 et tous les prisonniers repris furent fusillés pour complicité avec les agresseurs.
- Refus ou peur des auteurs guinéens de l’agression du 22 novembre 1970 de s’assumer.
Aucun responsable du FNLG n’a assumé l’agression22 novembre 1970 par lâcheté et il ne s’est trouvé personne, parmi ceux qui se disent victimes de Sékou Touré, pour porter plainte contre eux, si certains ne les ont pas approuvés publiquement. Et ils s’étonnent de l’indifférence des autres citoyens. Or, c’est cette agression qui a provoqué la radicalisation de la répression.
C’est pourquoi, l’on se demande comment certains peuvent estimer que cette l’agression était légitime, mais condamnent la répression qu’elle a déclenchée ? Or, comme l’a dit le ministre Alioune Dramé au Palais du Peuple en janvier 1971 à propos de l’agression du 22 novembre 1970 qui était une vraie aventure suicidaire : « Aller à l’aventure, c’est jouer quitte ou double : ou on gagne totalement ou on perd totalement ». J’ajoute : quand on perd totalement on ne peut choisir ni la sanction, ni sa forme ; le choix revient au gagnant.
Il est vrai, comme l’a écrit le journal Le Lynx, « si l’agression du 22 novembre 1970 n’avait pas tourné à la débâcle, tout le monde se serait acharné à en assumer la paternité ». Mieux, je soutiens que les responsables du FNLG auraient été reçus en héros et les complices intérieurs ou 5e colonne auraient bruyamment manifesté leur complicité pour pouvoir bénéficier des retombées de la victoire.
Il faut noter que cette hypocrisie a été déplorée même par ceux qui, comme Mr Issa Diallo, ancien secrétaire exécutif de la CEA, approuvent l’opération, mais condamnent le fait que l’opposition qui « l’a montée conjointement avec les Portugais n’eurent pas le courage de revendiquer son action ».
Mais une question m’a toujours taraudé : un Guinéen étant égal à un guinéen, un homme étant égal à un homme, pourquoi, depuis le 3 avril 1984, il ne s’est trouvé aucune personnalité officielle guinéenne, ni une institution internationale se qualifiant défenseur des droits de l’homme, pour défendre la mémoire des innocentes victimes de cette ignoble agression, victimes plus nombreuses que les 85 pendus qui ont été comptabilisés par certains ? Et pourtant l’opération avait été condamnée à l’époque par l’OUA et les Nations unies sur la base d’enquêtes.
- De l’innocence et de la réhabilitation des accusés à tort
Nous avons toujours affirmé, ayant été relâché après quarante-huit heures (25 au 26 novembre 1970) d’interrogatoire au comité révolutionnaire de Conakry I présidé par Mr Emile Condé sur dénonciation calomnieuse, que tous ceux qui ont été arrêtés pour leur participation aux complots n’étaient pas tous coupables des faits qu’on leur a reprochés ; cela a été confirmé cette fois par expérience, au cours de la conférences-débat du 29 novembre 2008 au Palais du Peuple, par feu Dr Baba Kourouma, ancien prisonnier au camp Boiro en ces termes: « Tous ceux qui ont été au camp Boiro n’étaient pas tous coupables, mais tous n’étaient pas non plus innocents ».
Mais seuls ceux qui avaient organisé cette opération «conjointement avec les Portugais» et les éléments intérieurs sur qui ils comptaient effectivement auraient pu nous aider à distinguer des éléments de la 5e colonne des vraies victimes de la répression ; eux seuls peuvent encore nous dire avec preuve, au cours du débat public contradictoire espéré, s’ils vivent encore, que « tel était avec nous, tel autre était accusé à tort ». Car, la complicité intérieure n’a été contestée que par ceux qui, soit savent, soit ignorent que leurs parents faisaient parties effectivement des complices intérieurs ou 5e colonne ; ils ont tous peur que ceux-là ne soient livrés à la vindicte populaire.
En tous les cas, même un journal des milieux d’affaires européens, Marchés tropicaux et méditerranéens, qu’on ne peut accuser de sympathie envers Sékou Touré, a reconnu dès le 28 novembre 1970 ce fait, en parlant des agresseurs : « on sait, avec certitude, qu’ils ont eu des complicités dans la place ».Certains de ces complices portant des brassards verts au bras, signe indicatif des partisans intérieurs, ont été cités nommément par des officiers-témoins à la radio privée « Evasion » les dimanches 27 novembre et 5 décembre 2016 et avaient tous fini par être arrêtés.
Même Builguissa Diallo, analysant un rapport de David Soumah, le reconnait en ces termes : « Le FNLG avait donc des contacts intérieurs, ce qui est de bonne guerre au fond », même si elle tente, par ailleurs, d’avancer des hypothèses spécieuses et subjectives devant asseoir son accusation contre Ahmed Sékou Touré, qui serait « complice » des Portugais, selon elle; ce que son père et David Soumah, qui ont lutté durant toute leur vie active contre Ahmed Sékou Touré, n’ont pourtant écrit nulle part dans leurs documents publiés dans cet ouvrage.
Il y a également la nécessité d’accès à des archives étrangères. Le Dr Dianè Charles l’avait affirmé très tôt à Facély II Mara (quand celui-là dirigeait l’émission radio « à vous la Parole », au lendemain du coup d’Etat du 3 avril 1984), que : « Si nous voulons connaître la vérité sur qui a fait quoi dans les différents complots, il nous faudrait consulter impérativement les archives du PDG, des services secrets français, du MOSAD, de la CIA, du K GB ».
Or, il ne s’est trouvé personne, surtout parmi ceux qui se disent victimes de Sékou Touré, pour exiger cela quand les principaux acteurs de cette tragédie vivaient encore et s’agitaient sur le théâtre politique guinéen ou exiger des autorités guinéennes d’entreprendre des démarches officielles auprès des pays suscités en vue de l’accès ou l’ouverture de leurs archives aux chercheurs en général. Au contraire certains de ceux-là continuent à approuver l’agression du 22 novembre 1970, à lui trouver une légitimité et à condamner la répression qui l’a suivie, alors que les deux choses sont dialectiquement liées.
Ce qui est encore dommage, c’est même quand un témoignage est donné par des cadres guinéens, opposants de l’extérieur notoirement, sur leurs relations avec des cadres guinéens de l’intérieur, ceux qui se victimisent continuent à démentir ou à se taire sur ce qu’on dit ou écrit sur leurs parents.
Prenons l’exemple sur le témoignage de Dr Diané Charles : « J’étais de l’opposition guinéenne ; je militais dans le regroupement des Guinéens à l’Extérieur. Et personnellement, j’étais en relation avec mon ami feu Tibou Tounkara ; Je crois qu’il était, à cette époque-là, ministre résident à Nzérékoré. Et on se passait des messages avec énormément de prudence. D’ailleurs, j’avais réussi à le sortir de Nzérékoré pour l’amener au Libéria ».Or, ce témoignage a paru dans l’hebdomadaire guinéen L’Enquêteur, N° 15, du 21 novembre au 6 décembre 2002, p.7.
Quand cette interview a paru, il ne s’est trouvé personne pour démentir son auteur ; aucune plainte n’a été déposée pour diffamation contre Dr Dianè Charles de son vivant, ni contre la direction du journal qui l’ a publiée.
C’est dire qu’il n’est pas prudent qu’un enfant veuille répondre de tous les actes de ses parents.
Ce qui est encore plus condamnable, c’est la disparition, au lendemain du coup d’Etat destructeur du 3 avril 1984, d’archives essentielles de notre patrimoine documentaire (archives privées du président de la République, archives présidentielles, archives de la Permanence nationale du PDG-RDA (siège actuel du Ministère de la Jeunesse et de l’ Emploi des jeunes), archives des départements ministériels et archives des services de sécurité et de l’ armée, disparues par incinération, jet dans la mer ou vol par des particuliers, dont certains membres du CMRN et du gouvernement et quelques cadres opportunistes qui se baladent avec allusion à des lettres de dénonciation les concernant et sans présentation desdites lettres.
Et il est à noter aussi qu’aucune demande officielle d’accès ou de déclassification des archives étrangères sur les rapports de ces pays avec la Guinée entre 1958-1984 n’ a jamais été formulée par les autorités guinéennes, comme le Rwanda l’a fait et obtenu des documents importants. Tout cela aurait permis ou permettrait d’innocenter et de réhabiliter certains guinéens en faisant le tri entre les traitres (ceux qui ont effectivement collaboré avec certaines puissances extérieures identifiées contre la Guinée entre 1958-1984) et des innocentes victimes, des Guinéens accusés à tort et liquidés sous la première République sur dénonciations calomnieuse ou règlement de compte.
Il faut également regretter l’assassinat, au lendemain du coup d’Etat( 3 avril 1984), des acteurs et témoins essentiels de la première République, accusés à tort ou à raison de torture et de liquidation physique des « innocents » : il fallait empêcher ceux-là qui tenaient à faire des révélations fracassantes, gênantes parce que accusatrices, de le faire publiquement.
Abordons à présent des accusations injustement portées contre le Président Ahmed Sékou Touré :
- Ahmed Sékou Touré est accusé d’avoir été complice des Portugais
Plus précisément,
- Il aurait été averti, aurait négocié avec les Portugais et avec le FNLG pour engager cette opération afin de pouvoir liquider ses adversaires intérieurs.
- Les portugais auraient participé à l’agression du 22 novembre 1970 parce qu’ils voulaient seulement libérer le fils du Maire de Lisbonne.
Ces accusations ont encore été effectivement reprises sur une radio privée le 22 novembre 2016, malgré les démentis par ceux qui ont effectivement organisé l’ignoble agression, démentis publiés pourtant dans des documents accessibles à tous ceux qui militent réellement pour la vérité historique, et qui veulent savoir ce qui s’est réellement passé entre 1958 et 1984 en Guinée et non continuer à empoisonner l’atmosphère politique par des déclarations mensongères et fracassantes. Ah ! La mauvaise foi quand tu nous tiens.
L’origine de la fable du « fils du Maire de Lisbonne » est de Dr Dianè Charles, à son retour de son exil; elle a été reprise depuis par différents anciens prisonniers du camp Boiro qui nous ont livré leur témoignage, avec des variantes, sans prouver leur propre innocence.
Prenons deux exemples :
- Croyant me faire une révélation capitale, Alsény René Gomez affirmait, dans le manuscrit qu’il m’avait envoyé pour lecture, que les Portugais étaient venus chercher le fils du maire de Lisbonne arrêté par le PAIGC. Mais ayant lu l’extrait de mon interview de 2006 dans le journal guinéen le Diplomate et relative au démenti du capitaine portugais Alpoim Calvao qui avait dirigé l’agression, il ne parle plus de fils du maire de Lisbonne arrêté par le PAIGC dans son livre paru chez l’Harmattan-Guinée en 2007, mais de « pilote d’un avion portugais,…fils d’une personnalité très en vue à Lisbonne ».
Or, le seul pilote portugais capturé par le PAIGC était Rebato, qui n’était le fils d’aucune personnalité portugaise ; il a été libéré après 7 ans de prison.
- Un autre rescapé, Naby Moussa Touré dans son livre Mémoires d’un rescapé du goulag de Sékou Touré parle, lui « de capture du fils d’un industriel portugais ».
Qui dit la vérité ?
Le même Naby Moussa Touré, sans aucune preuve, ne serait-ce que la source de l’information soutient également que « l’agression portugaise fut une affaire hautement manigancée par Sékou Touré parmi les multiples complots à la sékoutouréenne. L’agression dont il avait été parfaitement informé ».
Voilà les sources d’information de certaines personnes et de leurs semblables qui se disent victimes de Sékou Touré et s’agitent comme des diables soit à la radio soit à la Télévision, soit au cours de toutes rencontres.
Or, ceux qui veulent appréhender la vérité historique sur l’agression du 22 novembre 1970 ou sur tout complot doivent plutôt approfondir les recherches en comparant les différentes sources de renseignements et nous dire ce qui est vraisemblable ; le refus de le faire dénote tout simplement la mauvaise foi. Il est vrai que la seule vérité qu’ils acceptent est la leur. Et gare à celui qui ne les suit pas dans leur mensonge!
Car, aucun des vrais organisateurs de cette ignoble opération ne fait allusion à ces inepties:
- Le Capitaine Alpoim Calvao n’en parle pas dans son ouvrage Mar verde publié en 1976, ni dans la longue interview qu’il m’avait accordée, à Bissau, le 10 août 2014, et que je publie dans mon ouvrage intitulé La Guinée de Sékou Touré. Pourquoi la prison du camp Boiro ? publié chez l’harmattan en 2014, PP 277-289; sa réponse immédiate m’avait montré un agacement quand j’insistai sur la question: « Non, ce n’est pas vrai ; c’est de l’imagination délirante »… « Je me trouvais avec les prisonniers portugais que nous avions libérés ; il n’y avait aucun fils d’un homme important parmi eux ».
- Ces inepties, qui ne sont que des tentatives de diversion face à l’évidence d’un fait historique indéniable, l’agression du 22 novembre 1970, ne se trouve même pas dans les archives privées du commandant Thierno Diallo ou de David Soumah qui les aurait signalées si c’était vrai.
Il est donc dangereux de ne lire que des livres, des articles ou interviews d’ancien prisonniers ou leurs conjoints ou enfants qui cherchent plus à se venger par l’écriture qu’à dire la vérité ou à prouver leur innocence ou celle de leurs conjoints ou parents .
Mais admettons même que ces fables soient réelles ou vraies, pourquoi, à l’époque, le Portugal discrédité, acculé, condamné par la communauté internationale et insulté à longueur de journée par les autorités guinéennes, n’a-t-il jamais fait état devant le Conseil de Sécurité du prétendu accord passé avec la Guinée dont on se gargarise toujours pour prouver la complicité d’Ahmed Sékou Touré ? L’instance suprême des Nations Unies n’avaient-elles pas fait sien le rapport de la commission d’enquête qu’elle avait dépêchée à Conakry ? N’a-t-elle pas fini par condamner le Portugal, suite à un débat public et contradictoire en son sein et la motion condamnant le Portugal a été adoptée par 11 pour et 4 abstention, les membres de l’OTAN?
Par ailleurs, les autorités guinéennes n’avaient pas, à l’époque, attendu l’agression du 22 novembre 70 pour dénoncer les Portugais et l‘opposition guinéenne, et il serait fastidieux de citer toutes les dénonciations préventives avant la première condamnation du Portugal par l’ONU le 22 décembre 1969 et après cette date.
Enfin, tout le monde sait que toutes les autres formes de liquidation du régime ayant échoué, il ne restait plus que l’agression militaire.
Il été également révélé, lors des émissions radiodiffusée de l’Evasion, que la hiérarchie militaire, complice des agresseurs, sous prétexte de les nettoyer et de les préparer, avait fait enlever toutes les batteries protectrices des pourtours de Conakry pour les emmener au camp. Quand, des soldats, au cours de l’Assemblée générale du 21 novembre 1970, ont protesté, il leur a été répondu que ces armes seront prêtes le lundi 23 novembre 1970, donc après la victoire (la chute du régime) prévue pour le dimanche 22 novembre 1970.Il en fut de même au camp Almamy Samory Touré ; pour faciliter sa prise par les envahisseurs, toutes les armes appropriées avaient presque disparu du magasin des armes quelques jours avant le 22 novembre 1970.
Soyons sérieux et retenons une fois pour toutes que la Guinée a été agressée le 22 novembre 1970 par le Portugal et le FNLG avec la complicité de guinéens de l’intérieur; qu’il y a eu des centaines de morts et de blessés graves avec des dégâts matériels importants ; que la communauté internationale avait condamné ce crime injustifiable, à l’époque.
Mais militons pour un débat national public contradictoire sur les idées et les faits de cette opération susceptibles de confirmer ou d’infirmer les accusations portées contre certains accusés.
Qu’on le veuille ou non, les faits historiques sont têtus. On a beau manipulé le mensonge, la vérité finira toujours par écraser tout sur son chemin.
Nous les constatons déjà : ceux qui parlaient et accusaient aisément hier, sont de plus en plus acculés ; désemparés, ils se ridiculisent à chaque sortie. Les bouches ont commencé à s’ouvrir ; mais la leurs radotent ou se taisent ayant déjà tout dit.
Si nous militons pour la vérité parce que c’est elle seule qui est conciliatoire et qui résiste au temps et non pour un mensonge masqué, momentané, arrangé pour se faire plaisir, exigeons tous, non une compensation ou indemnisation , seul objectif de certains -la vie n’ayant pas de prix-, mais ce débat que certain veulent absolument éviter de peur d’être ridiculisés ou démaqués.
- la prétendue détention, par le Président Ahmed Sékou Touré, des clés des armureries des camps de Conakry.
Selon une autre ineptie qui aurait été reprise, il y a quelques semaines par un cadre que je considérais comme l’un des meilleurs produits de la Révolution sur le plan intellectuel et moral, les clés de l’armurerie se trouvaient avec le Président Ahmed Sékou Touré, au moment de l’agression, c’est pourquoi la réaction militaire fut tardive.
Cette information mensongère se trouve dans le livre la vérité du Ministre Abdoulaye Diallo dit Porthos, alors que tous les témoignages de militaires contactés soutiennent qu’aucune clé des armureries des camps ne se trouvait avec le Président Ahmed Sékou Touré ; toutes se trouvaient avec les chef des armements du camp ou leurs adjoints.
En effet, chacun des deux camps militaires de Conakry avait des armes, mais les plus importantes se trouvaient à l’armurerie centrale du camp Alpha Yaya. Ce qui est confirmé par Alsény René Gomez qu’on ne peut accuser d’être tendre et objectif avec le régime de la Première République: « La consigne était claire et simple : en cas d’alerte, tout le monde devait se retrouver au camp Samory pour le regroupement et la distribution des armes ».
Kaba 41 avait, selon Alsény René Gomez, signalé les risques de ce plan ; l’auteur ajoute que « la remarque… fut peu appréciée par la hiérarchie qui le lui fera savoir quelques mois plus tard avec un ticket pour le camp Boiro ». Il s’agit en fait de la hiérarchie militaire au sein de laquelle existaient des animosités personnelles connues de tous ceux qui s’intéressaient à l’armée guinéenne à l’époque, et non d’Ahmed Sékou Touré. Kaba 41 devait donc s’en prendre uniquement à sa hiérarchie .
Et puis le jour de l’agression, cette hiérarchie miliaire du camp Almamy Samory Touré a plutôt cherché à se cacher en lieux sûrs ; Certains derrière les grottes ; ils n’ont été rassurés que quand ils furent convaincus par des voisins civils du camp que les mercenaires et le groupe de responsables du FNLG conduit par le Commandant Thierno Diallo avaient pris la tangente.
Quant à l’armurerie du camp Alpha Yaya, les clés se trouvaient avec l’adjudant-chef Dobo Sovogui, chef des armements au moment de l’agression et non avec le président Ahmed Sékou Touré.
Dobo Sovogui était au camp de Kindia d’où il a été affecté au camp Alpha Yaya de Conakry en 1964. C‘est le Cdt Gaye, chef des armements du camp, qui lui avait remis les clés depuis cette date jusqu’en 1984. Il a toujours refusé de les donner à certains officiers supérieurs : d’abord à Kaman Diaby, au moment du complot Petit Touré, ensuite au commandant Ousmane Condé, à l’agression du 22 novembre 1970, à des hauts cadres administratifs et politiques qui s’étaient présentés à lui le 22 novembre 1970.
En effet, quand éclata l’agression, le commandant Ousmane Condé, chef du camp Alpha Yaya Diallo, qui avait fait croire à certains de ses subordonnés qu’il détenait la clé de l’armurerie, était effectivement venu les demander à Dobo Sovogui ; s’étant rendu compte que l’intéressé portait un brassard vert au bras qu’il avait du mal à cacher et qu’il avait vu, l’adjudant-chef Dobo Sovogui refusa de lui remettre lesdites clés ; ce qui lui aurait coûté cher si les agresseurs avaient réussi à s’emparer du pouvoir.
Contrarié et en retard, le commandant Ousmane Condé prit, à bord de son véhicule, le commandant Mory Keita, président du CUM du camp et quatre para commandos et se rendit rapidement camp Boiro où il était attendu par les agresseurs comme complices intérieurs ; malheureusement ou heureusement, selon, il reçut, par erreur, une rafale de mitraillette à l’entrée du camp : les mercenaires n’avaient pas vu le signe distinctif au bras du commandant qui meurt sur place.
Pris de peur, ses compagnons qui semblaient tout ignorer, ont fui les lieux et sont revenus immédiatement au Camp Alpha Yaya Diallo.
Un autre témoignage qui prouve que les clés des armureries des camps ne se trouvaient pas avec le président Ahmed Sékou Touré, c’est celui de feu le capitaine Tiana Diallo ; un aviateur de formation, mais qui s’était emparé de l’un des chars contre les agresseurs, vint après le commandant Ousmane Condé au magasin d’armes du camp Alpha Yaya Diallo ; l’adjudant-chef Dobo Sovogui se souvenant du cas du commandant Ousmane Condé fut réticent; il a fallu, selon le capitaine Tiana Diallo , le menacer pour que l’intéressé ouvre le magasin d’armes afin qu’il se ravitaille pour continuer sa traque des mercenaires et poursuivre la défense des camps assiégés. Je vous renvoie au témoignage du capitaine repris par l’intéressé le 22 décembre 2007 et rediffusé à la Radio Doliba (Radio mémoires) de feu Sékou Madi Traoré, le 30 décembre 2008 et repris dans mon livre déjà signalé. En tous les cas le commandant Dobo Sovogui en retraite à Macenta a encore confirmé au téléphone de la radio Evasion le dimanche 5 décembre 2016 que c’est lui qui avait les clés du magasin des armes jusqu’en 1984 et non le Président Ahmed Sékou Touré.
- De la prétendue prosternation du président Ahmed Sékou Touré devant une délégation de la hiérarchie militaire.
Tous les témoignages de militaires de l’époque contactés soutiennent que c’est là encore une information mensongère
C’est encore le livre la vérité du ministre Porthos qui le reproduit , repris par certains anciens prisonniers comme Alsény René Gomez et ses semblables.
Comme toujours, nous avons cherché à vérifier l’authenticité de ce ragot auprès des témoins susceptibles de la confirmer ou de l’infirmer : Sinkoun kaba fils, Hadja André Touré, épouse du feu Ahmed Sékou Touré et le colonel à la retraite, Mory Keita contredisent Porthos et dépeignent parfaitement la situation de traitrise qui régnait à l’époque à Conakry.
Sinkoun kaba fils, encore vivant et qui a toujours sollicité une confrontation, avec l’auteur, mais en vain, soutient que cette affirmation est fausse, « une pure invention de Porthos » qui connaissait les relations intimes du général avec son père, des amis intimes depuis l’enfance ; Porthos en a profité pour attribuer cette affabulation à son père puisqu’il sait que celui-là ne le verra plus, du moins ici-bas, pour démentir ou confirmer ce mensonge éhonté.
Hadja Andrée Touré a également marqué son mépris quand elle a lu cette version surtout qu’elle connaissait bien l’auteur de cette affabulation. Je vous renvoie, pour le détail des deux témoignages, aux pages 179 à 181 de mon livre qui leur sont consacrées.
Mais j’ai recueilli, le mercredi dernier 30 novembre 2016, le témoignage d’un colonel à la retraite qui m’avait été vivement recommandé depuis longtemps. Selon le colonel Mory Keita, de l’aviation militaire, qui habitait au camp Almamy Samory Touré, le 22 novembre 1970 , le magasinier qui détenait les clés de l’ armurerie du camp était venu tardivement à son service ; il a même fallu lui envoyer une commission alors que l’attaque du camp par les agresseurs avait déjà commencé et que l’attroupement devant le magasin était à son comble ; il ouvrit le magasin dès son retour ; ayant été l’un des premiers à y rentrer pour s’armer, quelle ne fut pas la surprise de Mory Keita de constater que les armes qui sciaient en la circonstance et qu’il avait vues auparavant avaient disparu ; il n’ y avait plus que certaines armes intactes donc utilisables et d’autres bourrées de graisse donc non utilisable puisqu’il il fallait les dégraisser avec du gasoil ou du pétrole pour pouvoir les utiliser. Or, il faisait nuit et aucune station de carburant n’était ouverte en ce moment-là.
L’étonnement de Mory keita se justifiait par le fait que cinq jours avant l’agression, le magasinier lui ayant promis un lit pico, il s’était rendu au magasin ; il y avait vu ces armes, mais en était sorti un peu frustré, le magasinier ne l’ayant pas satisfait.
Donc quand il revint le 22 novembre 1970 dans le même magasin constater le la situation sus -décrite, Il sut automatiquement que des officiers et officiers supérieurs étaient dans une trahison ; que cette disparition était le fait de la hiérarchie militaire et de la complicité du chef des armements du camp, Boubacar Fofana et de son magasinier, Sidafa dont les comportements lui paraissaient déjà bizarres. Il avait déjà constaté la fuite des officiers au premier coup de feu des mercenaires lourdement armés. Le nom Fofana avait créé un déclic en moi ; j’ai aussitôt décidé de revoir la déposition du général Noumadian Keita qui y affirme que « le lieutenant Fofana Boubacar, officier d’armement, devait paralyser la distribution des armes et munitions ».
Le chef d’Etat-major inter- armes, le général Noumadian Keita, en grand boubou, s’était réfugié à l’infirmerie du camp dès que les envahisseurs attaquèrent le camp; il resta indifférent de la nuit du 21 au 22 novembre 1970 ; « il n’était pas avec nous dans les mouvements », précise le colonel Mory Keita ; seuls les colonels Namory keita et Idrissa Condé avaient organisé la riposte au camp pour écraser les rebelles; c’est quand le colonel Mamadou Diallo, chef d’ Etat-major adjoint, fut blessé que le général Noumadian Keita a dit de tout faire pour le soigner ; après ça, il n’avait rien dit et n’avait donné aucun ordre. Il s’était encore réfugié dans son mutisme et ne mobilisa aucun soldat pour riposter. Le Colonel Mory Keita n’avait vu ce jour-là, comme officiers supérieurs au camp que les colonels Namory keita, Mamadou Diallo, adjoint du général Noumadian Keita qui était blessé et Idrissa Condé. Tous les autres avaient fui ; il ajoute « aucune délégation de la hiérarchie militaire ne s’était rendue à la Présidence de la République, ni lejour, ni la nuit. Le général Noumadian Keita n’était d’ailleurs jamais sorti du camp pour aller où que ce soit. Celui qui dit le contraire ment effrontément », me dit-il. Suivez mon regard !!!
Il faut quand même préciser qu’une grande partie du camp était prise par les assaillants. Aussi, constatant que la situation des loyalistes était de plus en plus difficile, que le camp risquait de tomber d’un moment à l’ autre et que tous les officiers risquait gros dans une éventuelle défaite du camp, le colonel Namory Keita prit l’initiative, aux environs de 5 heures du matin du 22 novembre 1970, de faire appel au camp Alpha Yaya en y envoyant un chauffeur ; le premier char envoyé tomba en panne devant le camp; le second entra au camp du côté de la mer en enfonçant le mur. Ce fut la débandade chez les mercenaires et l’abandon des différentes positions attaquées par des troupes loyalistes cachées derrière le char. Des sous-officiers, officiers et officiers ne sortirent de leur tanière que quand ils apprirent par des civils voisins du camp que tous les mercenaires et leurs chefs avaient fui.
A mon insistance sur le témoignage de Porthos, le Colonel Mory Keita m’a répondu sec : « c’est de la pure invention. Cette affirmation est fausse ; je vous répète que le général Noumadian Keita ne sortit pas du camp ni le jour ni la nuit du 22 novembre 1970 ; quant au commandant Kékoura Zoumanigui dont il parle, je ne l’ai pas vu au camp ce jour-là , surtout que chacun des chefs s’occupaient de son camp, lui de la gendarmerie . Nous n’aurons beaucoup de révélations qu’après », me répéta le colonel Mory Keita, une dernière fois.
Ce témoignage m’a permis de mieux comprendre l’attitude, décrite par Hadja Andrée Touré, du général Noumadian keita quand il était venu voir le Président Ahmed Sékou Touré pour la première fois le matin où devait se tenir le premier meeting au Palais du Peuple, après l’agression (Cf. La Guinée de Sékou Touré. Pourquoi la prison du camp Boiro ? L’Hamattan, 2014,pp.179-181).
C’est dire que
- le Président Ahmed Sékou Touré n’avait signé aucun accord avec le Portugal ou le FNLG et que le Peuple avait été plutôt trahi par la hiérarchie militaire.
- Il n’avait aucune clé des armureries des camps de Conakry, toutes se trouvaient avec ceux qui devaient les avoir :
- Le camp Samory Touré avec le lieutenant Boubacar Fofana, chef des armements militaires et son adjoint, Sidafa, le magasinier.
- Le camp Alpha Yaya Diallo, avec le sergent-chef Dobo Sovogui depuis 1964.
- Il ne s’est prosterné devant aucune délégation de la hiérarchie militaire, comme le dit Pothos puisqu’aucun chef d’Etat-major particulier, ni le chef d‘Etat-major général n’avait bougé de leur camp, même après l’agression, et n’avait été à la Présidence de la République où il ne s’y rendait, au moment des crises, que sur convocation du chef de l’Etat, le Président Ahmed Sékou Touré, particulièrement vigilant.
- A propos des pendaisons du 25 janvier 1971
Le procès des accusés de l’agression qui s’est déroulé du 18 au 23 janvier 1971 eut un caractère populaire, le régime estimant à l’époque que puisque c’est le peuple qui avait été victime, c’était donc à lui de juger.
Le 8 janvier 1971, l’Assemblée nationale s’érigea en Tribunal Révolutionnaire Suprême, siégeant au Palais du Peuple à Conakry du 18 au 23 janvier 1971. Auparavant toutes les structures du Parti avaient été impliquées, chacune jugeant les faits et déterminant ses propositions de sentence. On tenait à ce que chaque citoyen se sente concerné, impliqué et responsable des décisions qui seront prises.
Ainsi :
- Le 11 janvier 1971, les 8000 PRL (comités de base du parti) tinrent leur congrès.
- Le 13 janvier 1971, ce fut celui des 210 sections
- Le 15 janvier 1971, celui des 30 fédérations et de l’Etat-major de l’Armée
- Les membres du BPN et du gouvernement intervinrent directement au Palais du Peuple.
Au terme des débats, certains avaient été condamnés à mort, d’autres aux travaux forcés à perpétuité et 90 « libérés sans condamnation ».
Ce fut une grande surprise quand les populations de Conakry et des grandes villes se réveillèrent avec des éléments pendus le 25 janvier 1971, tels ceux du pont du 8 novembre : aucune décision n’avait été prise encore quant aux modes et dates d’exécution des éléments condamnés à mort.
A ce propos, Il semble, selon les responsables survivants, que nous avons rencontrés que
le Président Ahmed Sékou Touré et de nombreux membres du BPN et du gouvernement avaient été surpris. Certains qui n’ y croyaient pas s’y rendirent , telles Hadja Mafory Bangoura et Hadja Jeanne Martin Cissé informées par Emile Condé qui les avaient prises dans sa voiture pour le Pont..
Mais il faut préciser que parmi les éléments pendus à Conakry,
- Certains figuraient sur le film réalisé par Carl Michaël le matin du 22 novembre 1970 au bas de la résidence de l’Ambassade de la Tanzanie surplombant la zone et où il s’était réfugié avec Miriam Makéba ; les intéressés communiquaient par talki walki avec les 6 bateaux stationnant dans les eaux de Conakry (pour le détail du témoignage cf.mon ouvrage déjà signalé pp.163-164). Le film avait été donné au feu Président Ahmed Sékou Touré. Une copie se trouvait encore dans le bureau de feu Président Ahmed Sékou Touré dont les archives étaient très bien classées.
Nous profitons de cette occasion pour demander où sont passées ces archives dont la restitution rendrait un grand service au Peuple de Guinée ?
2 .Des mercenaires auraient été appréhendés cachés au domicile de certains autres.
- Un prisonnier, libéré par les envahisseurs du camp Boiro, aurait réussi à s’enfuir dès sa sortie de prison, le 22 novembre 1972, en Sierra Léone à bord d’un véhicule de service que lui aurait fourni l’un des pendus.
Selon le capitaine Alpoim Calvao, c’est grâce à cette fuite qu’ils reçurent le premier rapport sur la situation au camp Boiro.
Ce procès avait fait l’objet d’appréciations diverses. A l’étranger, particulièrement en France, tous ceux qui étaient contre la condamnation à mort pour des raisons politiques l’avaient condamné; d’autres le regrettèrent, mais le comprirent en se rappelant la répression qui frappa les collabos à la fin de la deuxième guerre mondiale en France.
La régularité du procès était également contestée par certains. Mais là aussi et jusqu’aujourd’hui les divergences persistent, car pour d’autres chaque régime a sa procédure judiciaire compte tenu de son option idéologique et politique. Il suffit de se rappeler l’avis de feu Jean-Marie Doré, par exemple, affirmant que, le Tribunal Suprême qui a jugé les accusés « était un Tribunal régulier. Les actes engageaient les citoyens … Ceux qui ont prononcé le jugement du temps de Sékou Touré étaient habilités par le Parlement guinéen à l’époque ».
- De la présence des ambassadeurs étrangers dans le cortège de l’association des victimes en janvier 2016
Ah ! Le sous-développement, quand tu nous tiens !
C’est la première fois que je voyais cela en Guinée. Même ceux qui ont pris le pouvoir le 3 avril 1984 et durant leur règne alors qu’ils appuyaient tout mouvement anti-Première République n’avaient accepté un tel acte inadmissible malgré la pression de leurs « amis qui les avaient aidés à prendre le pouvoir» (Première interview du Gl Facinet Touré à la radio Djolba). Aussi ai-je été choqué en tant que patriote. Pour moi, c’était de la de la foutaise.
A-t-on-vu des ambassadeurs en général et africains en particulier se permettre de participer à la manifestation d’une catégorie sociale en Europe, même des victimes d’une guerre ou se mêler des contentieux européens ? On les expulserait aussitôt.
Nous ne devons pas accepter, quel que soit le pois décisif de l’aide qu’ils nous nous accordent, que des bailleurs de fonds en profitent pour se mêler à nos problèmes et bafouer notre souveraineté. Ce que nos diplomates ne peuvent se permettre de faire dans les pays où ils sont accrédités, ceux qui représentent leurs pays ou une institution en Guinée ne doivent pas être autorisés à le faire en Guinée. Ils peuvent être consultés, mais pas en faire des arbitres de nos contentieux ou nos directeurs de conscience ou nous imposer leur définition du mot « victime ».
Moi j’ai toujours pensé que les diplomates étrangers accrédités en Guinée doivent plutôt se battre à nos côtés pour que les archives de leurs pays relatives aux rapports avec la Guinée soient accessibles aux chercheurs, au moins sur la période 1958-1984 ; militer pour une vraie réconciliation nationale entre les Guinéens en s’inspirant des contentieux historiques que leurs pays ont eu à résoudre ; une vraie réconciliation parce que définitive sur la base de la vérité historique et non aggraver les divisions sociales, prendre cause pour une catégorie sociale.
Il est vrai que la plupart de ces pays étaient impliqués dans les actions de déstabilisation contre la Guinée de la Première République l’empêchant de se consacrer à son développement. Mais cela ne doit pas continuer, même sur une base amicale.
Quant au ministère dit de la réconciliation, je ne saisis pas bien son approche pour favoriser ou atteindre cet objectif d’autant qu’on ne peut pas réconcilier si on prend parti avant de réunir les protagonistes ne serait-ce que pour connaitre leur objectif de combat.
Il est vrai que, et je le répète, dans ce pays d’intrigues, de mensonges et d’ingratitude tout est possible.
Mais ce département devrait tirer les leçons du sort de toutes les structures même provisoires recommandées ou mises en place depuis le 3 avril 1984 : elles ont toutes échoué parce que les approches étaient toutes mauvaises. Tant qu’un débat national, public et contradictoire ne sera pas organisé en Guinée, la réconciliation sincère et définitive ne sera pas possible parce qu’on voudra l’imposer par le mensonge et la tricherie. Ceux qui ont suivi la radio Evasion depuis quelque temps savent désormais que nombre de témoins sont prêts, pour ce qui est de la période 1958-1984, à faire disparaitre les fables et ragots des pages de l’histoire récente de notre chère patrie, la Guinée.
Il est vrai que vu la peur d’être livré à la vindicte populaire qui anime certains cadres et les engagements pris par d’autres, l’on m’a souvent dit que ma position est utopique dans un pays où dire ou la défendre la vérité est un crime. Mais je suis convaincu que seul le débat national, public et contradictoire permettra une réconciliation définitive et la réhabilitation des vrais innocents. C’est autour de cet objectif que les vrais patriotes, ceux qui n’ont rien à se reprocher dans les actions de déstabilisation contre notre pays depuis 1958, doivent se mobiliser. Les innocents et les traitres doivent être identifiés pour faciliter la réhabilitation des premiers comme des pays d’Europe et d’Amérique l’ont fait.
Comme je l’avais écrit en 1993, et nous vivons la même situation, beaucoup de Guinéens semblent se cacher encore et refuser de rendre témoignage à la vérité.
Mais ceux qui sont déterminés doivent savoir que la vérité est au-delà du vrai et du faux. Elle est seule pérenne et conciliatoire. Aussi se suffit-elle à elle-même. Faisons donc d’elle notre guide et laissons les menteurs s’égarer. Nous le savons tous: Les faits historiques sont têtus ; ils se révéleront au moment où l’on s’attend le moins. Il suffit d’être patient comme certains l’ont toujours été jusqu’ici. Les bouches s’ouvrent désormais…
- Du Rapport et des recommandations de la commission provisoire de réflexion sur la réconciliation nationale (CPRN)
Evasion
Que pensez-vous du rapport de la Commission provisoire sur la réconciliation nationale, surtout qu’on vous a vu à la séance de restitution et à la cérémonie de remise officielle au Chef de l’Etat ?
Réponse
J’ai fini par le lire intégralement. Et j’ai compris alors pourquoi ma longue lettre du 21 septembre 2011 que j’ai moi-même déposée au secrétariat de Mgr Koulibaly qui l’ a reçue et au domicile de l’Imam Saliou Camara, les co-présidents de la CPRN, n’a pas été répondue ; que toutes les demandes souvent répétées de tiers, membres des sous commissions de la CPRN et de l’ONG « Plus Jamais d’Agression contre la Guinée » de m’inviter aux différentes séances de travail, aux ateliers ad hoc en particulier, ont été systématiquement refusées par la CPRN.
Pour ce qui est de ma présence aux deux cérémonies suscitée, les organisateurs voulaient certainement tromper l’opinion publique nationale et internationale en voulant montrer que même Sidiki Kobélé Keita a participé aux différentes séances de travail.
La lecture des pages 32 à 60, 202 à 228 m’a surtout permis de comprendre pourquoi certains citoyens qui ont participé à la confection de ce rapport et des recommandations se sont montrés satisfaits : c’est la reprise, depuis le 3 avril 1984, en particulier sur la période 1958-1984 des mêmes sources d’information au bas de chaque page donc des mêmes inepties, des mêmes affabulations, des mêmes propositions suite à des analyses orientées, parfois édulcorées pour qu’on les avale facilement. La bibliographie qui suit à partir de la page 229 donne l’impression que d’autres ouvrages ont été lus et exploités. Ce qui ne se vérifie nulle part dans ce document fourre-tout
Pauvre Guinée ! Nous continuons à perdre du temps et de l’argent ; nous cherchons plutôt faire plaisir à certains bailleurs de fonds.
Evasion
Mais que dites-vous des recommandations ?
Réponse
Voyez-vous, la réconciliation nationale est une entreprise délicate et de longue haleine tant les contentieux sont sérieux et profonds. Le danger serait d’opter pour une réconciliation politicienne. Ce serait comme si nous masquions une plaie. Or, nous le répétons, une plaie masquée n’est pas une pleine guérie. Je suis de ceux qui sont convaincus que le chef de l’Etat veut une réconciliation réelle et définitive et qu’il n’acceptera pas des approches faciles et inspirées de l’extérieur au détriment des intérêts du peuple de Guinée. Pour lui chaque Guinéen doit se sentir concerné et responsable des solutions dégagées.
Les recommandations sont les mêmes sauces qui changent de structure de support ; elles ne sont ni appropriées, ni nouvelles, ni innovantes. Elles satisferont peut-être une partie des Guinéens, mais pas la Guinée. La plupart sont de vieilles propositions dont les auteurs sont connus pour leur hostilité maladive envers le Président Ahmed Sékou Touré et à « son » régime.
A mon avis ce qui urge, c’est la mise en place d’une véritable commission nationale qui se consacrera à des approches plus conséquentes parce que guinéennes, quitte à statuer sur les « recommandations » préconisées par la CPRN.
L’échantillonnage de Guinéens consultés, suivant les statistiques du rapport, demande en majorité la vérité et un débat public national contradictoire. La lecture dialectique des chiffres établis aboutit à cela. Toute précipitation donnerait à l’objectif visé un caractère politicien, donc provisoire. Or, nous voulons une réconciliation nationale définitive qui nous permette de nous atteler enfin, autant que possible unis, au développement intégral, effectif et harmonieux de notre chère Guinée.
Ne cherchons surtout pas à faire plaisir seulement aux bailleurs de fonds, dont certains sont parties prenante dans nos contentieux. Agissons froidement et sérieusement dans une perspective historique pour que de tels contentieux ne se produisent plus.
Evasion
Que pensez-vous de la journée de repentance proposée, le 28 septembre de chaque année ?
Réponse
Je ne suis pas surpris vu la composition de la commission provisoire de réflexion et la nature des contentieux à examiner et don certains n’ont pas été examinés, en particuliers ceux qui sont jusqu’ici à l’origine de l’hostilité de la hiérarchie catholique envers le Président
A mon avis, la date du 28 septembre proposée pour la repentance (?) entre dans les tentatives de réécriture orientée de l’histoire de la Guinée depuis le 3 avril 1984. Il s’agit surtout d’effacer certains faits historiques de patriotes qui dérangent et rappellent de mauvais souvenirs à certains citoyens guinéens et à des étrangers. Ceux qui doivent se repentir sont connus de certains. Mais le peuple ne les connaitra effectivement qu’après le débat voulu par la majorité des Guinéens et devant instaurer définitivement la paix en Guinée.
Et puis, ce ne sont pas des jours qui manquent dans un mois, pouvant devenir des journées historiques évoquant des faits majeurs d’une Nation.
Le 28 septembre doit rester le jour où le peuple de Guinée uni a dit « Non » au général de Gaulle et à son projet de néo-colonisation, la « communauté française », c’est-à-dire le jour où il a dit « oui » à l’indépendance de notre pays. Une journée de joie et de diverses réjouissances et non de tristesse. Donc une journée sacrée comme toute journée d’indépendance dans un pays jalouse de sa souveraineté et de sa liberté, un pays qui se respecte, où le patriotisme est une réalité ; personne ne doit souiller ou retenir cette journée pour commémorer un autre fait historique, si important soit-il.
Les Niçois peuvent-ils demander de choisir le 14 juillet de chaque année non pour commémorer la Révolution de 1789, mais l’attentat qui les frappa un 14 juillet de 2016 ? La France n’a-t-elle pas choisi un autre jour pour rendre hommage aux victimes de cet ignoble attentat ? Le 14 juillet c’est la fête nationale française.
Quand on est véritablement patriote, on ne touche jamais à certains symboles. Le 28 septembre est de ceux-là.
C’est dire que la répression du 28 septembre 2009 est certes condamnable et les auteurs quels qu’ils fussent doivent être sévèrement sanctionnés. Mais elle ne doit pas être commémorée à la place du 28 septembre 1958 parce qu’elle n’a pas un caractère national et suscite trop d’interrogations non encore élucidées.
Question
Votre dernier mot ?
Réponse
Toujours le même depuis le 3 avril 1984 : la tenue d’un débat national public et contradictoire.
Sidiki Kobélé Keita
Enseignant-chercheur
Conakry, le 8 décembre 2016