Addis-Abeba – Le dimanche dernier s’est ouvert à Addis Abeba (Ethiopie) le 28e Sommet des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine (UA). Il fait suite au Sommet de Kigali (Rwanda) qui s’était déroulé en juillet 2016. Rarement un sommet aura été aussi attendu que celui qui vient de s’ouvrir dans la capitale éthiopienne. Et pour cause : l’actualité sur le continent est à la fois dense et complexe. Ce contexte confère à cette ténue un accent des plus particuliers pour notre pays.
D’abord parce qu’il sera question de la Présidence de l’institution pour l’année en cours et que notre pays est en lice pour en prendre la tête, mais aussi parce qu’il faudra désigner le nouveau Président de la Commission et également décider de la réintégration du Maroc au sein de la grande famille de l’UA.
Ainsi, après les médiations réussies en Guinée-Bissau et en Gambie, le Président de la République, Alpha Condé, qui était appuyé dans ses initiatives par ses pairs de la CEDEAO, de l’Union Africaine et des Nations Unies, sera, une nouvelle fois, au cœur de ce grand rendez-vous continental.
Présidence de l’Union Africaine : Alpha Condé, comme une évidence ?
Par son charisme, son aura et son engagement tout au long de son parcours personnel et politique, Alpha Condé a démontré qu’il est un panafricaniste convaincu. Ses prises de position récentes ancrent davantage sa stature d’Homme d’Etat et de Paix du continent. De la Fédération des Etudiants d’Afrique Noire en France (FEANF) à la Présidence de la République, en passant par la députation nationale, l’homme a toujours défendu cette idée selon laquelle une Afrique unie, éduquée et ambitieuse constitue notre force et notre salut.
C’est donc en toute logique qu’en décembre dernier, à Abuja, ses pairs de la CEDEAO lui ont accordé leur confiance en l’investissant comme candidat à la Présidence de l’UA pour 2017. Un choix qui devrait être confirmé dans quelques jours. La Présidence de l’institution panafricaine revenant à l’Afrique de l’Ouest cette année.
Commission de l’Union Africaine : qui pour succéder à Nkosazana Dlamini-Zuma?
Après cinq (5) années passées à la tête de la Commission, Nkosazana Ndlamini-Zuma, probable future candidate de l’ANC aux élections présidentielles sud-africaines, doit passer la main au cours d’un vote auquel doivent prendre part les cinquante cinq (55) Etats représentés (si le Maroc est réintégré avant la séance) au sein de l’UA.
Reporté en juillet dernier après sept tours de vote -aucun des trois candidats d’alors n’avaient pu/su rallier les deux tiers des voix à son projet-, le scrutin pour désigner le successeur de Ndlamini-Zuma aura lieu le 31 janvier prochain. Cette fois ci, un vainqueur pourrait bien sortir des urnes. Les Chefs d’Etat votant auront le choix entre 5 candidats déclarés. Parmi les prétendants à ce poste stratégique, on note deux candidats déjà présents en juillet dernier à Kigali, deux femmes, trois cinquantenaires et quatre ministres des Affaires Etrangères en activité.
Si aucun guinéen n’a brigué la présidence de cette commission cette année, il n’en demeure pas moins que notre pays, par la voix du Chef de l’Etat, a son mot à dire ; en témoignent les audiences accordées par Alpha Condé à certains des challengers au cours des derniers mois et sa forte implication dans la prise de décision sur les thèmes majeurs consacrés au continent. De plus, il faut noter la candidature de Kadiatou Bah au poste de Commissaire en charge des Infrastructures et de l’Energie. Ce sont, en tout, huit (8) commissions qui changeront de leadership à l’issue de cette session.
A cela, il faut ajouter la présence de guinéens à des postes de décision clef à travers plusieurs organisations telles l’Organisation de la Mise en Valeur du Fleuve Sénégal (OMVS), l’Union du Fleuve Mano (UFM), les Nations-Unies (Représentation du Secrétaire Général des Nations Unies en Afrique Centrale), etc. Comme un symbole du renouveau de notre diplomatie en à peine quelques années sous la vision éclairée du Chef de l’Etat.
Les forces en présence
Ils étaient déjà là en juillet 2016
Pelonomi Venson-Moitoi (Botswana), 65 ans, Ministre des Affaires Etrangères ;
Agapito Mba Mokuy (Guinée Equatoriale), 51 ans, Ministre des Affaires Etrangères ;
Les nouveaux
Moussa Faki Mahamat (Tchad), 56 ans, Ministre des Affaires Etrangères ;
Amina Mohamed (Kenya), 55 ans, Ministre des Affaires Etrangères ;
Abdoulaye Bathily (Sénégal), 69 ans, Ancien Représentant de Ban Ki-Moon pour l’Afrique Centrale.
Le Maroc de retour « à la maison » ?
Après avoir quitté l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA) en 1982 à Nairobi –alors qu’il était pourtant l’un des membres-fondateurs-, le Royaume chérifien a officiellement entamé, depuis juillet dernier, le processus de réintégration de l’instance panafricaine. Un retour qui pourrait être effectif au cours de ce 28e Sommet d’Addis-Abeba.
La décision de réintégrer le Maroc ou non sera débattue probablement au cours des premiers échanges de ce 28e sommet. A l’heure actuelle, difficile de se prononcer quant à l’issue de ce vote. Les dirigeants marocains eux continuent de rencontrer les différents dirigeants africains ; en témoigne la récente visite du chef de la diplomatie chérifienne, Salaheddine Mezzouar, à Conakry.
Des défis immenses pour le continent sur le plan politique, sécuritaire et économique
Pour arriver à bout des défis qui ne manquent pas sur le continent, le tandem que formera le nouveau Président de l’UA et celui de la Commission, devra déployer tout son talent pour faire entendre la voix de l’Afrique sur les questions essentielles que sont la lutte contre le chômage des jeunes et leur émigration clandestine, la résolution de conflits, l’amélioration de l’accès à l’eau potable et à l’énergie et enfin la construction d’infrastructures à travers le continent.
Sur le plan politique, par exemple, plusieurs incertitudes planent autour des pays tels que la Libye, la République Démocratique du Congo, le Sud Soudan, etc. Il s’agira, le cas échéant, de tester la capacité de nos pays à rechercher des solutions africaines et pérennes, en favorisant la voie du dialogue et de la concertation comme ce fut le cas récemment à Banjul.
Sur le plan sécuritaire, c’est un euphémisme que de dire qu’il s’agit là de l’un des plus grands défis auxquels nous sommes confrontés. L’Afrique devra se doter de moyens suffisants pour contrecarrer la menace terroriste grandissante sur le continent. Le lancement de la construction du siège du Comité Africain des Services de Renseignement et de Sécurité (CISSA) répond certainement à cette volonté d’accentuer les efforts sur la prévention des attaques.
Sur le plan économique, il s’agira de proposer aux Etats, voire d’impulser, des politiques et approches innovantes, avec l’appui et les conseils d’organisations continentales telles que la Banque Africaine de Développement (BAD), la Commission Economique Africaine des Nations Unies (CEA) et d’autres, dans le but d’accentuer la lutte contre la pauvreté sur le continent.
Parallèlement, ce nouveau départ peut être l’occasion de remettre sur la table la problématique du financement de l’institution panafricaine. L’on se rappelle que plusieurs propositions avaient été avancées afin de rendre l’institution davantage indépendante économiquement. Parmi elles, une mesure phare semblait retenir l’assentiment de la majorité : le prélèvement de 0.2% des importations des Etats membres. Celle-ci paraît toutefois tarder à se matérialiser.
Autant de sujets qui rythmeront les douze prochains mois –et probablement les prochaines années- de vie de l’institution. Nul doute que la Guinée y jouera un rôle prépondérant.
Source : Cellule de Communication du Gouvernement