Censure

Ces femmes qui triment pour gagner leur vie à Conakry

Avec tous les risques qu’elles encourent sur leur chemin, de nombreuses femmes Tomas, Koniankés et Guerzés font venir des marchandises de très loin, afin de les revendre les jeudis sur le marché Mayalon, dans la commune de Matoto, à Conakry. Ces femmes introduisent à Conakry trois types de produits : du riz du pays, de l’huile de palme et des bananes plantains (Aloko). Pour se procurer ces marchandises, la distance que parcourent ces marchandes donne le tournis.

Mama Koné, l’une d’entre elles, qui dit avoir près de 15 ans de pratique dans ladite activité, explique : ‘’Nous prenons ces marchandises dans trois lieux distincts pour les faire venir à Conakry (lors du marché hebdomadaire de Mayalon qui se tient chaque jeudi, ndlr). Certaines les prennent en Côte d’Ivoire, entre autres à Yὂrodou et Bhὂfὂ. Tandis que d’autres vont à Macenta et N’Zérékoré : Dandannὂ, Sérédou et Konka ‘’, nous explique-t-elle, ce jeudi 9 février 2017.

Ces commerçantes sont aussi victimes de nombreuses pertes enregistrées pendant leur activité. Ainsi, selon notre interlocutrice, elles sont rançonnées par certains agents malveillants pour lesquels elles constituent une source de revenus idéale.

‘‘On peut mettre plus de 10 millions Gnf sans pour autant parvenir à couvrir toute la somme investie’’, selon Mama Koné.

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Selon Mama Koné, servant désormais de point focal à ces nombreuses commerçantes, à Conakry : ‘’ Pour que ces produits arrivent à Conakry dans de meilleures conditions, il faut s’adonner à fond. Parce que certaines peuvent faire près de six jours sans embarquer leurs marchandises dont une partie peut pourrir, surtout les bananes aloko, qui ne doivent pas rester longtemps dans la chaleur. Mais si on a la chance d’avoir à temps un moyen de transport, pour arriver à l’heure à Conakry, sans tomber en panne, là on est sauvé. Parce que des fois, nous faisons quatre jours de route, afin d’être à notre point de vente ‘’, raconte-t-elle.

Pour arriver dans la capitale guinéenne, ces femmes louent certains moyens de transport à des prix qui coutent les yeux de la tête ; soit entre 5.000.000 Gnf et 6.500.000 pour un camion-remorque Magnum, pour lequel elles doivent s’associer, et 3.000.000 Gnf pour les mini-camions, notamment KIA.

‘‘Pour réussir dans ce commerce, il faut avoir un fonds de roulement de 20 millions Gnf’’, dit-elle.

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A en croire, Mama Koné, celles qui ont les reins solides peuvent à elles seules assurer les frais de déplacement d’une remorque Magnum.

Prenant l’exemple sur l’une des leurs, elle nous confie que ‘’ Madame Monique, par exemple, peut effectuer un achat d’une valeur de 13.000.000 Gnf. Sans compter les frais d’embarquement de Macenta et de débarquement sur le marché Mayalon, qui peut couter parfois 3.500.000 Gnf pour une seule remorque. Il faut aussi parler de la location des magasins dont le prix varie de 600.000 à 150 mille Gnf, selon la sécurité du lieu de conservation’’ révèle-t-elle, avant d’ajouter qu’elles sont victimes de nombreux cas de vols dont certains sont le fait de leurs propres clientes !

Et d’ajouter ‘’certaines viennent nous prendre des marchandises à crédit et elles disparaissent durant des mois. Mais, heureusement qu’on en retrouve certaines qui changent de fournisseurs. Car, elles pensent qu’on ne se concerte pas entre nous (rires). Mais, nous ne sommes pas dupes.’’

S’exprimant à propos de l’assistance de leur maris, Mama Koné a estimé que ‘’ c’est un travail de femme. Certes, nos maris nous assistent, mais ils ne peuvent pas assurer l’aspect commercial. Eux, ils nous aident au niveau de l’embarquement et quand il s’agit d’aller prendre les marchandises dans les villages, afin de les faire venir au centre-ville. A part cela, c’est impossible qu’ils fassent autre chose. Mais nous travaillons ensemble.

Après tous ces efforts, combien gagnent-elles sur chaque importation de produits ? En tout cas, ce n’est pas un bénéfice consistant, souligne Mama Koné. Elle s’est abstenue de détails concernant les bénéfices qu’elles et ses amies encaissent après les ventes. Mais, pour elle, il n’y a pas de raison valable pour se défaire de cette activité qui leur permet de garantir le fonctionnement de leurs foyers respectifs, en assistant leurs maris.

Ismaël Sylla pour Guinee7.com

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