Le député du Rpg-arc-en-ciel, Amadou Damaro Camara s’est prononcé sur plusieurs sujets après son passage à l’émission les « Grandes Gueules » le 1er juin 2017. Parmi les sujets évoqués dans l’émission, il y a le mariage du chef de file de l’opposition. Pour le président de la majorité présidentielle au Parlement, la loi interdisant la polygamie est désuète dans la mesure où elle n’a pas été appliquée depuis 50 ans. En ce qui concerne le budget alloué au chef de file de l’opposition, il a accusé Cellou Dalein d’être à la base de la polémique que cela a suscitée. Lisez
Bonjour, nous aimerions que vous réagissiez sur ce qui s’est passé du côté du Lambayi. Un jeune s’est fait bruler vif par une foule en colère ?
Oui ! Il faut regretter qu’il y a une certaine culture de la violence qui s’installe en Guinée et à tous les niveaux. On ne peut plus régler ni par la justice, ni par des conseils des sages, tout est violent.
C’est l’échec de votre gouvernance sur le plan de la justice?
Non ! Je crois que c’est un problème social même. Ecoutez quand des jeunes se retrouvent pour s’amuser parce qu’ils sont nombreux, ils partent casser, le palais du peuple, est-ce que c’est un problème de gouvernance ça ? Non !
Non, il y a le grand banditisme. Des jeunes innocents qui travaillent pour gagner leur vie se font égorger pour leur faire retirer leurs matériels et qu’à la suite l’acte se reproduise. Il y a des raisons que les gens se révoltent, viennent bruler des gangs qui sont connus. Pour vous, pensez vous que c’est un problème social au-delà du problème de manque de justice, et l’insécurité qui existe ?
Il y a un phénomène de criminologie dont il faut attaquer à la base. Imaginez vous avec tous les moyens, la force de l’Etat rien que pour cette année, on a déjà plus de 1000 assassinats dans la ville de Chicago avec tous les moyens qu’ils ont. Je dis que c’est un facteur criminologue dont il faut attaquer. Ce n’est pas toujours la force de la police ou sa présence, c’est au-delà de cela. Il faut aller en amont du phénomène de la criminalité. Qu’est-ce qui nous amène à cela, les forces de l’ordre, je dis que ça ne suffit pas, ce phénomène de criminalité. Pour quoi ? Je vous donne l’exemple de la police, la plus équipée, la plus puissante au monde, l’Etat le plus puissant mais qui enregistre rien que les cinq premier mois de l’année plus de mille assassinats dans une ville. Et puis de surcroit, la ville de Obama, donc ce n’est pas propre seulement qu’à Lambanyi.
Vous dites qu’il faut repartir sur la base des faits. Qu’est-ce qu’on attend pour y aller, parce que ce dernier temps c’est récurent. C’est un peu partout en Guinée. C’est à Siguiri, c’est à Macenta, c’est à Nzérékoré, c’est à la cimenterie ici qu’est ce qu’on attend pour revenir à la base pour faire ces études dont vous parlez?
C’est ce que je disais tout à l’heure, le phénomène social ici aujourd’hui en Guinée. Il y a Albert Camus qui disait que pour chaque génération, chaque génération croit qu’il a la tâche de refaire le monde mais que sa génération, elle avait la tâche plus grande, plus sérieuse, c’était d’empêcher le monde de se défaire. Nous, à notre temps, je disais qu’il y avait trois responsabilités : d’abord les parents, les parents sont devenus irresponsables. Moi, musulman quelle que soit la connotation, je n’accepterai mon enfant en rasta parce qu’il ne peut pas prier comme ça, rentrer chez moi. Je n’accepterai pas qu’une fille sorte nue et rentre nue. Vous avez tous changé de tenue pendant ce mois de carême. Donc vous savez ce qui est correcte et ce qui est incorrecte.
Ça, c’est un premier problème, un deuxième problème. La communauté qui participait à l’éducation de l’enfant a renoncé. On n’attendait pas de savoir la filiation de l’enfant qui est en faute. On le corrigeait en disant, c’est un enfant de la communauté. Troisièmement, c’est l’école qui vient, qui ne faisait pas que l’instruction. C’est pour cela qu’on l’appelait ministère de l’éducation qui éduquait. Aujourd’hui, vous croyez que ça commençait il y a sept ans. On ne s’arrête plus quand il y a l’hymne national. Vous savez que ça commencé il y a sept ans, on ne se lève plus dans un bus quand il y a une femme en grossesse.
Tout est un problème d’éducation à la base. Nous devons repartir à la base. Tout ne peut pas être au compte de l’Etat, ou de la gouvernance. C’est ce que je veux dire. Il y a problème social qu’il faut revoir à la base.
Honorable on parle de l’impunité
Oui ! L’impunité, je suis parfaitement d’accord avec vous et je l’ai dénoncé moi même pas seulement dans votre studio. On ne peut pas gouverner avec les sentiments, il faut punir et ça il n’y a pas de discussion là-dessus.
Est-ce que vous êtes d’accord avec bon nombre d’observateurs que le Pr. Alpha Condé n’a pas fait suffisamment d’efforts pour mettre fin à l’impunité dans notre pays?
Il ne punit pas, mais la criminalité n’est pas un phénomène propre à la Guinée. Il y a la criminalité dans tous les pays de la sous-région. Chacun croit que c’est chez lui qu’il y a beaucoup de criminalité. Ça, c’est une réalité.
Nous voulons que vous réagissiez à ce qui a fait débat, il s’agit de ce remariage du chef de file de l’opposition. Vous n’avez pas assisté à ce mariage du côté de Labé ?
Vous faites comme si la polygamie a commencé après le mariage de Cellou Dalein DIALLO, s’il m’avait invité, je serai là-bas. Je suis polygame et je lui souhaite bonne arrivée dans le club.
Vous violez donc la loi ?
Je ne viole pas la loi. Cette lois a été votée il y a à peu près 50 ans. Je crois que c’était en 1968 et quand une loi se heurte à son applicabilité, il y a trois solutions. On l’amande, on l’abroge ou on fait de la jurisprudence. Pendant 50 ans, cette loi a « interdit la polygamie », mais la polygamie depuis 50 ans a continué sans sanction. Ça veut dire que cette loi est désuète. C’est un aspect. Deuxième aspect, cette loi n’interdit pas les autres formes de mariage en Guinée.
On a le mariage religieux, le mariage coutumier, le mariage civil. Le code civil ne s’intéresse qu’au mariage civil. Il n’interdit pas que des religieux musulmans puissent faire leur mariage de leur façon, et les chrétiens puissent faire leur mariage de leur façon. Ce code civil s’est heurté dès qu’on l’a établi à son applicabilité. Donc c’est une loi désuète .Si vous me demandez pourquoi on l’a pas amandée pendant 50 ans, ça été une erreur des gouvernants depuis 50 ans. Mais cette loi ne s’est pas appliquée. Elle n’est pas appliquée parce que s’opposant à une réalité sociale.
Comment vous expliquez que les officiers de l’état civil acceptent de recevoir les dossiers de mariage des polygames?
Parce que tout simplement, la loi n’a pas été applicable, elle est désuète c’est aussi simple que ça. Quand une loi ne peut pas du tout s’appliquer, elle cesse d’être loi même si dans les textes elle est là. La simple loi n’est que dans les textes, elle n’a jamais pu s’appliquer. Elle est désuète et ensuite on ne se marie pas qu’à la mairie en Guinée. Quand mon père et ma mère se sont mariés, ils n’ont pas été à l’état civil pourtant je suis leur fils légitime ça ne change à rien à ma légitimité. On n’est pas obligé de se marier civilement.
Quelle est la légitimité des enfants qui naissent du deuxième mariage ? Est-ce qu’ils ont droit à l’héritage ?
Ils sont des enfants légitimes. Non seulement, ils ont droit à l’héritage c’est ce que je vous dis même si l’Etat est laïc, dans un pays à 80% musulmans jusqu’à présent, l’héritage se partage en fonction des préceptes de l’islam. Aucune loi n’y compris ce code-là n’interdit pas de procéder à son mariage selon la religion.
Pourquoi la Guinée a signé la convention de Maputo alors qu’on n’est pas prêt à s’engager sur cette piste?
Retenez que juridiquement une loi qui n’a pas pu s’appliquer pendant 50 ans est une loi désuète qui n’existe que dans l’écrit.
On va aller avec ce projet de code civil. Notre collègue en a parlé tout à l’heure. Qu’est-ce qui s’est passé honorable ? Pourquoi il n’a pas été programmé à cette présente cession de lois?
Je crois qu’il y a un phénomène auquel il faut qu’on s’habitue en Guinée. La culture parlementaire. Il n’est pas dit que chaque projet de loi ou proposition de loi amené à l’assemblée doit être examiné et adopté pendant la cession qui a suivi même pendant l’année. Il y a des projets de lois qui peuvent durer des années qui peuvent mêmes enjamber deux législatures.
Le code civil nous a été envoyé par le gouvernement. A ce niveau, c’est un projet de loi, même encore à ce niveau, il y a débat, il y a un groupe des magistrats qui est d’accord, il y a un autre groupe de magistrats qui n’est pas d’accord. Ça c’était un premier problème et cette loi retournée au gouvernement pour promulgation. Il n’y a pas entente déjà parmi les auteurs de la loi, ça c’est un premier aspect, le deuxième aspect, nous avons un problème de timing à cause de la complexité de la décision.
Il y a le problème de la polygamie. Il y a des exemples à côté. En Côte d’Ivoire, on a dit bon ! Ecoutez, il y a une femme légitime, la deuxième n’est pas légitime mais les enfants ont le même droit. Je veux dire que tous les enfants ont le même droit et ont droit à l’héritage. Il s’agit de cela l’héritage. Quand je me mariais pour la première fois, mon beau-père a dit: moi j’ai fini mon mariage, j’ai donné ma fille à la mosquée si vous voulez aller au palais du peuple après, c’est votre problème.
Mais je sais que c’est par soucis de garantir l’héritage mais on ne sait pas si c’est ma fille toi qui va mourir la première ou c’est ton mari qui va mourir le premier. Ça été la leçon qu’il nous a donnée. Ça voudrait dire apte ou pas ce n’était pas à ce jeu, une garantie de mariage.
Donc le code civil actuellement à l’assemblée, il y a débat. Il a été programmé, après nous nous sommes inquiétés. Nous allons faire ce travail et l’envoyer au Sénégal. On dit vous choisissez le registre, monogamie ou polygamie ? En Côte d’Ivoire, je viens de vous donner l’exemple. Nous avons la possibilité de réfléchir et de connaître au moins une position claire de l’auteur de ce code civil qui est le gouvernement. Ce n’est pas encore clarifié et il y a un problème de timing aussi pour pouvoir le faire.
C’est à cause de la complexité du dossier et la décision qui doit être prise que vous l’avez retiré à cette première session ?
Ce n’est pas retiré, nous n’avons pas pu le programmer. Il a été renvoyé pour discuter
Renvoyez à quand ?
Peut-être à la prochaine session.
Session des lois où session budgétaire ?
Session budgétaire ça peut être discuté, ça peut ne pas être discuté pendant cette législature. Il faut qu’on accepte qu’il y ait des projets ou des propositions des lois.
Vous dites qu’il a deux groupes de magistrats. Leurs oppositions, c’est sur quel point essentiellement du code civil?
Sur beaucoup de points. Il y en a qui nous disent : on a été envoyé, le débat n’était pas terminé. Il y en a qui nous disent oui le débat est terminé. Sur le point, le choix sociétaire, interdit ici aujourd’hui la polygamie, ce serait ridicule; dire aujourd’hui plus de polygamie après la promulgation, son applicabilité sera pour des années après.
Donc c’est un faux débat. Il ne faut pas faire de procès à El hadj Cellou Dalein Diallo, il n’a pas violé ?
Franchement, c’est une affaire totalement privée. Ça n’a absolument aucune incidence sur la gestion de l’Etat.
Alors est-ce que vous entendez le cri de cœur de certains qui souhaiteraient que la loi se plie à cette tradition, à cette coutume pour que la polygamie soit légalisée ?
Ecoutez au Mali par exemple, il y a eu deux codes civils là-bas. Il y a deux ans. Il y avait des points tous les députés les avaient éliminés. Tout le monde était d’accord, parce que les religieux ont appelé, ont rempli le stade, ont dit ça ne correspond pas à notre Mali. Ce sont les blancs qui vous ont dit de mettre ça dans votre loi.
Vous êtes favorable ou pas à la polygamie?
Absolument, la pratique sociétaire est une source de norme de droits. On ne peut pas faire fi à nos réalités pour dire tout simplement parce que c’est beau, ça se passe en France, il faut l’imposer ici.
Donc vous êtes favorable à la légalisation de la polygamie?
Oui ! Moi je suis déjà dedans, donc c’est le meilleur choix, la meilleure voie.
La question de 500 millions GNF qui a fait débat dans la cité, quel est votre point de vue là-dessus en tant que parti au pouvoir? C’est un projet qui devait retourner afin que ça soit validé par les députés. Ce qui n’a pas été le cas. Est-ce que ça vous a choqué?
Non ce n’est pas vrai, il y a une résolution qui dit que les avantages du chef de file de l’opposition doivent être négociés avec le ministère en charge du Budget et le bureau de l’assemblée. Le bureau de l’assemblée a désigné le président qui a désigné Amadou DAMARO pour le négocier. Ça ne devait pas être voté. C’est Cellou Dalein lui-même qui a créé la polémique. D’abord il a eu peur, il a cru que c’est de l’argent d’Alpha Condé dont il ne devait pas toucher. Sa première réaction a été que : « on me l’a notifié mais je n’ai pas touché a un kopeck » comme s’il ne devrait pas toucher. C’est pourquoi j’ai réagi en disant : si tu ne veux pas retourne, on peut renoncer même à son salaire.
Il faut notifier quand l’assemblée nationale vote une loi qui dit que le chef de file en tant qu’institution doit bénéficier de certains avantages quel est l’esprit derrière ça ? Il faut qu’on sécurise, qu’on encadre l’activité politique. C’est pourquoi, il y a une loi pour les partis politiques pour ne pas que certains partis politiques soient pris en otage par des bailleurs de fonds avec de l’argent sale. C’est ainsi qu’on essaie de dire à la presse que la subvention, c’est pour assurer leur indépendance. Tout le monde connait que Cellou Dalein par exemple ce n’est pas un secret, on croyait que c’était des commerçants de certaines communautés qui finançaient son parti, qui lui dictaient ce qu’il devait faire. Mais avec cette indépendance financière qui ne suffit pas pour ces activités, le rend un peu plus indépendant de ces sources de financement.
Pourquoi vous avez tardé à la mise en place de ce droit?
On a fait ça en fin décembre 2014. En 2015-2016, je lui ai dit, tu es chef de file quand tu as un président de la République devant toi qui t’invite, qui te demandes à te voir pour pouvoir discuter des affaires de l’Etat, quand tu ne reconnais pas ce Chef d’Etat, tu n’es pas chef de file. On ne va pas te donner de l’argent pour ne pas que tu discutes avec quelqu’un qui est devant toi et que tu ne reconnais pas, c’est aussi simple que ça. Quand il l’a reconnu, il a commencé à le rencontrer. On n’est chef de file que quand il y a un président interlocuteur que tu reconnais mais quand tu le reconnais pas, tu n’es pas chef de file.
En 2015, il n’a pas reconnu le président de la République. Il n’a jamais salué, il n’a jamais félicité. Il a dit ça sur RFI alors que Soumaïla Cissé, (le chef de file de l’opposition malienne) au soir de l’élection a pris sa famille pour aller féliciter IBK. Ensuite, à chaque fois qu’il a son budget, il invite l’opposition, il l’informe, il forme son nouveau cabinet. Un chef de cabinet avec des conseillers. Est-ce que M. Diallo a fait ça ? C’est vrai que notre loi est muette là-dessus, elle-même incomplète en la matière parce que cette loi aurait dû donner aussi de l’argent au parti au pouvoir.
Qu’est- ce qu’on peut retenir sur les chiffres. Combien doit-il recevoir normalement par an?
Mais on a dit combien de fois? Il a 5 milliards qui lui sont donnés, comme toutes les institutions. Trimestriellement je crois que c’est un milliard 250 millions. Mais quand je l’ai entendu dire oui, on m’a notifié après il y a eu un arrêté, après il y a eu un compte bancaire, non, on n’ouvre pas un compte bancaire à son insu.
Pour vous, il n’a pas été responsable ? Il n’a pas reconnu?
Non ! Il n’a pas reconnu, l’a pas géré, il l’a pas assumé. C’est de cela qu’il s’agit, il devrait le faire.
Une synthèse d’Alpha Amadou et Aïssatou (L’Indépendant)