A la faveur de la prise du pouvoir le 3 avril 1984 par le Comité Militaire de Redressement National (CMRN) suite au décès du Président Ahmed Sékou TOURE le 26 mars, le pays s’ouvre davantage au monde extérieur.
Nos compatriotes résidents à l’étranger pour une cause ou une autre qui en avaient les moyens et la volonté ont rejoint le bercail. Pour les uns, un retour définitif et une visite à la famille pour ceux ayant pris la décision de s’établir à extérieur. Le retour de tous les guinéens s’est passé dans la plus grande normalité et de la façon la plus ordinaire sans aucun bruit.
Il a fallu que l’avion transportant l’enfant terrible de Mafanco atterri sur le tarmac de l’aéroport international de Gbéssia pour que tout Conakry soit informé de l’arrivée d’un passager indésirable pour le régime militaire en place.
Il était attendu ce jour par une foule de sympathisants qu’il avait mobilisé à sa cause dans la clandestinité comme il sait le faire pour avoir passé le clair du temps d’exil à éviter les tentatives d’enlèvement qui planait sur lui suite à une condamnation par contumace.
Privé de tout document de voyage par les autorités de l’ambassade de Guinée à Paris, l’audacieux débarque à Conakry avec son extrait de naissance comme un citoyen qui rejoint la terre de ses aïeux n’a pas de permission de qui qu’il soit.
Le policier chargé de la vérification des documents de voyage l’injurie en soussou. A la grande surprisse de l’officier, l’intrépide passager le rétorque violemment dans la même langue qu’il sait manipulé mieux.
Après plusieurs altercations, le passager qui n’est pas le bienvenu pour le régime franchi la barrière de la police pour rejoindre ses sympathisants qui ont hâte de l’accueillir dans la ferveur et l’allégresse. Comme si cette rentrée forcée au pays ne suffisait pas, l’imperturbable leader continu a défié le régime militaire en organisant un meeting non autorisé au stade municipal de Coléah, le dimanche 19 mai 1991. Ce meeting forcé fut dispersé par une pluie de gaz lacrymogène.
Le Pr Alpha CONDE quitte les lieux par la petite porte du stade qui s’ouvre sur la cité des fonctionnaires. Malgré cette sortie régulière, il reçoit le nom de « Alpha le grimpeur » par le journal satirique « Le Lynx ». Pour échapper à une arrestation, il se refugie à l’ambassade du Sénégal à Conakry. Après une longue négociation au bénéfice de son carnet d’adresse bien rempli, le Pr Alpha CONDE rejoint la France son pays d’accueil pour continuer son combat politique.
La date du 17 mai 1991 doit être retenue comme le début de la fragilisation du régime militaire et le départ de la démocratisation en Guinée. Car avant cette date le CMRN prévoyait le bipartisme et le Pr Alpha CONDE clamait haut et fort sur les antennes des radios que les guinéens formeront autant de partis politiques qu’ils voudront.
Ainsi dit ainsi fait, en 1992 le multipartisme intégral devient une réalité et dans la foulée plusieurs partis politiques sont autorisés d’exercer leur activité sur toute l’étendue du territoire guinéen. C’est dire qu’il a fallu l’acte courageux du Pr Alpha CONDE le 17 mai 1991 que le PUP de Lansana CONTE, UNR de Bâ Mamadou, RPG de Alpha CONDE, PRP de Siradio DIALLO, UPG de Jean Marie DORE, PPG de Charles Pascal TOLNO etc. furent créés.
Il apparaît clairement que l’acte posé par le Pr Alpha CONDE le17 mai 1991 a profité tous les partis politiques de toutes tendances. Ce qui revient à dire que ramener la commémoration de cette date au seul cercle du RPG, c’est restreindre sa portée. Même si les sympathisants qui ont accueillies le Pr Alpha CONDE ce jour sont tous devenus par après les militants du RPG, mais à cette date aucun parti politique n’existait en Guinée.
Une précision est importante à savoir. Dans la lutte politique en Guinée, tout ce qui est Alpha CONDE n’est pas RPG pour avoir commencer le combat politique bien avant, mais tout ce qui est RPG est Alpha CONDE car il est à la base de la création et est toujours de tous les combats que ce parti mène.
Le RPG peut prendre l’initiative de la commémoration de cette date mais en associant tous les autres partis politiques afin que dans la ferveur et l’enthousiasme la main dans la main les guinéens enterre leur adversité politique pour partager un plat en ce jour symbolisant l’ouverture d’une nouvelle ère en Guinée, celle du multipartisme.
Les feux BÄ Mamadou, Siradio DIALLO et Jean Marie DORE accepteraient une telle initiative. Mais je crains fort qu’elle ne prospère aujourd’hui tant notre adversité politique emprunt de haine ce qui n’honore ni nos leaders politiques ni le peuple de Guinée. Nous devons comprendre qu’un peuple qui ne s’aime pas n’a pas d’avenir.
La commémoration de cette date par l’ensemble de la classe politique guinéenne contribuera à la formation politique des générations montantes, en les démontrant que l’adversité politique se situe au niveau des idéologies des partis mais que nous ne sommes pas des ennemis.
La lutte politique telle qu’elle est menée maintenant en Guinée est très inquiétante car elle ne repose pas sur l’idéologie mais sur l’appartenance ethnique. Ce qui fait qu’il n’y a pas de militants indécis chacun étant cloitré dans son camp et l’attachement à son leader est proportionnel non à son programme de société mais à la haine qu’on éprouve pour l’adversaire politique. Le combat politique devient de facto violent et la négation de ce que dit ou fait l’autre.
La célébration de cette date par toute la classe politique guinéenne ne fera qu’ajouté à la gradeur de notre peuple et prouvé à la face du monde que nous sommes capable de sursaut positif comme le 28 septembre 1958 quand tous les partis politiques avec le PDG-RDA en tête avaient donné la consigne de vote pour le « NON » au projet de Communauté proposé aux colonies françaises.
Que Dieu bénisse la Guinée et les guinéens
Sékou CAMARA, DG/Office Guinéen des Chargeurs
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