Le président de la plateforme nationale des citoyens unis pour le développement (PCUD) a évoqué dans un entretien qu’il a accordé à la radio Lynx fm, la semaine dernière, la dernière mission du Fonds monétaire international qui a séjourné à Conakry pour entamer les négociations d’un nouveau programme qui pourrait être soutenu par FMI à travers la facilité élargie. Il a également abordé le drame de Dar es salam en situant les responsabilités. Lisez.
Quel est votre regard sur le drame qui s’est passé la semaine dernière à Dar Salam de votre ?
Abdourahamane Sanoh : Je voudrais avant de répondre à cette question douloureuse m’incliner devant la mémoire des disparus, exprimer notre compassion et notre solidarité aux familles éplorées et aux blessés. Maintenant en ce qui concerne la question ça a été très dure de vivre cette tragédie en raison du fait qu’on a eu des compatriotes qui ont été touchés avec des dégâts matériels importants et des disparus, et tout cela mais. Si on a été profondément touché c’est parce que ce c’étaient des choses qui pouvaient être évités. C’est ce qui fait mal dans cette affaire.
Donc on l’a vécu avec beaucoup de douleur, le cœur complètement meurtri. On aurait pu quand même éviter que ce genre de catastrophes se produisent dans notre pays, parce qu’il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle, il s’agit de quelque chose humainement presque provoqué.
On a entendu des responsables politiques qui se rejettent les responsabilités, pour le pouvoir ceux-là qui ont géré ne sont pas été suffisamment responsables pour débarrasser la capitale de cette décharge. L’opposition indexe rapidement le pouvoir qui n’a pas pris ses dispositions pour que cette décharge quitte la capitale. Quelle est la réaction de la PCUD, qui vous mettez en cause ?
C’est une fuite en avant dans la mesure cette polémique aurait pu ne pas se retrouver au centre de ce drame. L’Etat bien entendu est responsable, l’Etat est une continuité, les ordures là, on a commencé à les amasser, il y a des dizaines d’années. Donc il est difficile que ceux qui sont passés disent qu’ils n’ont pas la responsabilité là-dedans, tout comme il est difficile que ceux qui sont au pouvoir de dire qu’ils n’ont pas de responsabilités, c’est-à-dire que le problème ne se pose pas en ce terme. C’est un débat qui vraiment n’honore pas la sphère politique. On devrait éviter ce genre de débat autour d’une question aussi difficile à supporter que celle que nous avons vécue, la dernière fois.
On a vu certaines organisations de la société civile qui ont envoyé des missions pour enquêter sur ce qui s’est réellement passé à la décharge de Dar es salam pour d’abord situer les responsabilités et éventuellement pour porter plainte contre l’Etat, le cas de la PCUD ?
Nous ne savons pas en quoi une enquête doit faite, pour savoir ce qui s’est passé, ce qui s’est passé on le sait. Ça fait des dizaines d’années qu’on a fait de ce site là un dépotoir, et les ordures ne font que s’accumuler au fil des jours au fil des années, tout le monde est au courant de cela, ce n’est pas du tout caché. La deuxième chose : c’est que le site dont il s’agit tout le monde a vu déjà que de plus en plus c’était en train de devenir un quartier populaire autour du périmètre, et quand vous allez voir les concessionnaires, ceux qui y habitent vous verrez que la majeur partie, ont des documents officiels de l’Etat.
La troisième chose c’est que s’il y avait de l’anticipation dans la gouvernance des affaires publiques notamment dans ce secteur précis, on aurait pu quand même depuis très longtemps faire en sorte que cette décharge soit délocalisée. Mais l’Etat a failli lorsqu’on voit un peu les structures qui sont mêlées dans les questions d’assainissement, des questions des ordures où on les voit souvent à travers des conflits d’attributions d’intérêt tout simplement et surtout chaque fois qu’il y a de l’argent qui est débloqué pour essayer de gérer ce problème-là à Conakry. Nous n’avons jamais réussi en tout cas ces derniers temps là je ne suis même pas sûr qu’on ait une véritable politique en la matière, en tout cas si elle existe, elle n’est pas suffisamment prise en compte dans le cadre des allocations budgétaires, chaque fois qu’on a alloué de l’argent, très malheureusement il arrive que les services concernés passent plus de temps à savoir qui gère l’argent que de se préoccuper des véritables problèmes de santé publique liée à cette affaire d’assainissement ; de cadre de vie lié à cela, de l’image du pays liée à cela, personne ne s’en occupe. Donc moi je ne sais pas en quoi une telle initiative pourrait être utile, peut être que je suis mal placé parce que je ne suis pas à la place non plus de ceux qui ont initié cela pour savoir un peu quels sont les raisons.
On dit qu’il y avait des agents du service de transfert des déchets qui étaient là alors qu’il pleuvait, et qui ont commencé à toucher les ordures et subitement les ordures se sont détachées, pour tomber sur des maisons et c’est ce qui aurait entrainé ce drame ?
Non ! Ça c’est trop facile. Ecoutez ça fait des décennies qu’on a fait de ce site un dépotoir. Et il y a quelques années le service spécialisé disait que Conakry produit par jour 600 tonnes d’ordures, certainement ce n’est plus le cas aujourd’hui. C’est beaucoup plus aujourd’hui. Officiellement on a fait de cet endroit un site dès lors que le site est devenu un lié d’habitation, se trouve au centre d’un quartier populaire, il fallait dans le cadre d’une bonne gouvernance anticiper la délocalisation pour qu’on ait pas à vivre ce qu’on a vécu la dernière fois.
Alors récemment une structure a été créée à cet effet mais il manque également de moyens, selon son premier responsable. L’autre actualité c’est cette dernière mission du Fonds monétaire international en Guinée, la mission a séjourné à Conakry récemment, afin d’entamer les négociations d’un nouveau programme qui pourrait être soutenu par le FMI à travers la facilité élargie de crédit, apparemment les missionnaires ne se sont pas entendu ou compris avec le gouvernement ?
Oui, effectivement il y a eu une mission du Fonds monétaire qui a séjourné ici au mois de juillet, notamment dans la deuxième quinzaine de mois de juillet. Nous avons eu en tant que société civile, à rencontrer cette mission là parce qu’elle a rencontré la société civile, rencontrée les secteurs privées puis aussi elle a rencontré les différents services techniques de l’Etat, de différents ministères, le premier ministre tout cela. Les discussions qui avaient été entamées, vraiment il y avait un premier problème, il vous souviendra qu’il y avait déjà en 2016 lorsqu’on est arrivé à la fin du premier programme, on voulait complètement se dédouaner du Fonds monétaire, et on voudrait plus avoir à faire au Fonds, on pensait que après cet étape-là maintenant on avait la liberté d’aller faire la levée de fonds sur le marché financier international.
Et donc pratiquement six mois après, on s’est retrouvé le 08 avril, précisément adresser un courrier au Fonds pour le dire, il faut revenir, c’est-à-dire que six mois plutôt on était en train de dire on en veut plus, six mois après on écrit pour dire au Fonds de revenir. Il y a à se poser la question, qu’est-ce qui s’est passé en partant, qu’est-ce qui s’est passé? Pour qu’on écrive et nous demandions au Fonds de revenir. Le Fonds répond en disant que y a pas de problème nous venons pour négocier avec vous ; un programme élargi de crédit (UNIFEC) mais ce que cela signifiait, c’est comme si on vous disait vous avez doublez à votre premier examen pour le premier programme parce qu’en principe si le premier programme était très concluant en termes de résultat, on devrait passer à une autre étape très malheureusement, nous avons été retenus encore comme si on redoublait la classe.
C’était sur la base de cette position du Fonds monétaire qu’il a eu déjà une première mission qui est venue, je crois vers mois de Mai et à l’issu de la mission, ils ont fait leurs mémoires qu’on a laissé au gouvernement, ils ont déjà soulevé un certain nombre de problèmes et donc on a laissé au gouvernement qui pourrait servir éventuellement de base pour les discutions avenir. Au cours de cette mission dont vous parlez, les discussions avaient commencé vraiment avait évolué et puis à un moment donné le gouvernement guinéen a posé d’autres problèmes que le Fonds a jugé vraiment pas possible d’accepter.
Quels sont ces problèmes?
Vous savez on est engagé dans la réalisation du projet Souapiti, donc on a eu à bénéficier d’un prêt non concessionnel d’environ un milliard trois auprès de gouvernement chinois. Et au passage il faut signaler que l’opérateur chinois qui est au centre est un opérateur blacklisté par la Banque Mondiale, mais là n’a pas été le problème, sauf que pour nous guinéen c’est quelque chose qui n’est pas de nature à conforter notre image dans les milieux financiers internationaux.
Le Fonds avait accepté le principe que déjà c’est parti avec Souapiti, donc nous ne posons pas de problème, vous avez contracté un prêt, cela représente environ 12% du PIB, il faut aller, ça c’est un conseil, on vous l’accorde, c’est un acquis. Et ils ont continué la négociation à un moment donné la Guinée a pensé à dire au fonds au moment où il partait à quelque jours de la fin, on a soulevé un autre prêt qu’on est en train de contracter avec la Chine pour un certain nombre d’infrastructures, notamment l’extension du port de Conakry, des projets d’autoroutes, et puis quatre universités dans les quatre régions naturelles, et d’autres projets qui dépassaient aussi un milliard quatre et plus.
Alors c’est là où ça a coincé, parce que le fonds trouvait que déjà avec Souapiti on est dans une zone de risque par rapport à la soutenabilité de la dette, si on va au-delà, on va créer des situations compliquées et on risque de se retrouver à un niveau à haut risque. Déjà ce que nous avons concédé nous sommes d’accord avec ça, et on peut faire passer ça au niveau du conseil d’administration probablement mais quelque chose d’autre en plus, ce n’est pas possible.
Alors les négociateurs de part et d’autres se sont retrouvés assez coincés parce qu’il est vrai aussi que dans ce processus-là la décision finale est politique même le fonds monétaire, la banque mondiale, c’est des instruments qui sont dans les mains des politiques. Mais des grandes puissances internationales qui sont les principaux actionnaires dans les pays, là aussi dans les pays la dernière décision est toujours politique. Donc les négociateurs ont été pratiquement coincés à ce niveau-là. Et finalement les deux parties ne sont pas arrivées à une conclusion parce qu’en ce qui concerne le nouveau prêt, si ça doit être concessionnel, le fonds allait peut être accepté d’examiner, mais un prêt non concessionnel vraiment ils ont trouvé que nous n’avons pas une très grande capacité à pouvoir garantir la soutenabilité d’un tel volume d’endettement, et donc les parties ne se sont pas entendues.
Mais très malheureusement comme cela se fait ici en 2011, la semaine dernière encore il y a eu des coups de fil qui sont passés ou en tout cas une initiative de la part de l’Etat guinéen pour voir comment ils peuvent éviter la rupture. L’Etat guinéen était même prêt à envoyer une mission à Washington, c’est-à-dire ils ont passé 15 jours ici, durant les 15 jours, ce qu’on aurait pu obtenir maintenant il faut prendre l’argent public aller aux USA, pour aller finaliser, je ne sais pas à quel niveau depuis la semaine dernière où se trouve être les négociations. Ici quand même que le mercredi dernier à la banque centrale, il y a eu une rencontre entre les représentants du gouvernement qui sont impliqués dans ces dossiers et les autorités de la banque centrale pour examiner avec le fonds monétaire les nouvelles propositions de la Guinée.
Mais après tout est-ce que la Guinée ne risque pas gros dans cette affaire si le fonds monétaire international décide d’abandonner la Guinée?
C’est pour ça que j’ai demandé, qu’est ce qui s’est passé entre l’année dernière lorsqu’on arrivait vers fin novembre ou vers la fin du mois d’octobre début novembre à la fin du programme et ce dont on se félicitait parce qu’on se disait que c’était la première fois que la Guinée arrive à mener un programme. Ça a été très laborieux.
On a entendu dire le chef de l’Etat qui fait des éloges que c’est la première fois que la Guinée conclut un programme avec le fonds monétaire international.
Mais le résultat n’était pas la conclusion, ce n’est pas là le problème, c’est qu’il faut savoir quand il y a des programmes, il y a des reformes qui s’opèrent et souvent certaines de ces réformes ont des conséquences assez douloureuses, pour les populations c’est-à-dire que lorsqu’on nous fait reprendre un programme au même niveau qu’en 2011 c’est encore une fois ce que je disais tout de suite, si on avait redoublé notre classe, et comme si on avait vainement fait faire aux citoyens des sacrifices et c’est ce qu’il faut éviter parce que ça a des conséquences extrêmement graves.
Chaque que fois que les citoyens sont confrontés à des sacrifices de ce genre, ils serrent la ceinture par rapport au besoin du manger, par apport aux besoins de se vêtir, par rapport aux besoins de se soigner, par rapport à beaucoup de choses. Parce qu’on restreint la possibilité d’améliorer le pouvoir d’achat.
Et lorsque cela paraît comme nul et qu’on dise on va vous faire reprendre encore à la case de départ c’est souvent extrêmement difficile surtout que lorsqu’on voit de mémoire, on voit aussi que si l’accord devrait aboutir, il faudrait s’attendre à beaucoup de sacrifices.
Par rapport à la crédibilité de la gestion de l’économie le fonds est le chef de file parce que lorsqu’il vient dans un pays, on ne voit pas que les autorités locales, il voit aussi les institutions d’aides au financement, des institutions financières internationales comme l’Union Européenne, comme la banque mondiale, la BAD, il se concerte avec les partenaires financiers aussi qui suivent de près ce qui se passe raison pour laquelle lorsqu’on voit ce qui se passe dans notre pays, on voit que la majeure partie de ce que nous réussissons à glaner vient à côté de la Chine hors la dangerosité de cette destination, c’est que le projets que la Chine s’engage à financer en Guinée sont des projets dont les études sont réalisées par les Chinois, par les entreprises chinoises qui bénéficient de l’exécution du projet, et souvent il y a beaucoup de surfacturations, à ce niveau-là, et très malheureusement on n’a pas les compétences pour souvent faire les études appropriées. Nous nous privons des institutions qui peuvent financer des études adéquates.
Nous, nous n’avons pas les moyens de nous procurer les expertises qui peuvent nous aider à faire des études appropriées ou même à nous accompagner dans les négociations, et finalement nous nous engageons sur des projets dont le coup est surenchéri. Et après comme c’est des dettes, il faut bien rembourser, ce sont les populations de maintenant et les générations futures qui se mettent à rembourser des dettes pour lesquelles déjà il y a une bonne partie du coût qui est passé dans le lien de la corruption.
Est-ce que ce n’est pas paradoxal qu’on dise que la Guinée a une croissance réelle attendue autour de 6,7% en 2017 soutenue selon le gouvernement par une activité dynamique dans le secteur minier et une bonne production agricole qu’on dise également l’inflation moyenne modérée tourne autour de 8,5% en 2017 ?
C’est sont les chiffres officiels qui sont attestés par le fonds monétaire. La croissance 6,7% pour 2017 effectivement l’inflation 8,5% qui est déjà pas mal élevé. La Côte d’Ivoire qui a une croissance de 8% depuis maintenant que Ouattara est venu au pouvoir pratiquement en 2011, et qui a une économie costaud plus que nous, c’est l’un des meilleurs taux de croissance dans le monde aujourd’hui ne parvient encore à décliner cette croissance sur les populations.
La Cote d’Ivoire c’est près de 40 milliards de dollars en 2016 ou 30,5. La Guinée c’est autour de 6,5milliards non ?
Maintenant lorsqu’on arrive à la question que vous posez par rapport à la Guinée, ce n’est pas parce qu’il y a croissance qu’il y a amélioration de condition de vie des populations, qu’il y a amélioration de pouvoir d’achat des populations pendant qu’il y a croissance si on n’investit pas trop dans les secteurs comme par exemple dans l’agriculture où nous avons environ 60 à 70% de nos populations qui exercent leurs activités, et donc dès qu’on investit ça peut toucher environ cette proportion de la population, et du coup ça peut aussi améliorer, le volume de production réalisé à travers ces activités là et permettre finalement à travers la mise en marche des produits et du surplus des produits permettre aux populations agricoles de pouvoir améliorer leurs revenus.
La constance dont on parle est une croissance de notre point de vue appauvrissant, ce n’est pas une croissance qui enrichit. On parle de croissance par rapport au volume des productions améliorées de bauxite, mais on voit ces bauxites-là, c’est-à-dire le calcul est dans les bureaux à Conakry ici d’une augmentation de volume mais au même moment on sait que cette bauxite-là est mise sur bateau pour être envoyée ailleurs, aucune valeur ajoutée n’est créée ici à travers la transformation. Donc c’est une croissance exportée dans une très large majorité, dans une très large part, il s’agit d’une bauxite qui est exportée, qui n’enrichit pas.
Et puis lorsqu’on voit un peu ce que cela est en train de faire parce que toute la concentration de cette position se trouve dans la zone Nord- Est de la Guinée vers Boké Etc. Nous avons dans cette zone la production d’anacarde, et parfois il arrive que les concessions qui sont données, couvres des superficies où nous avons des plantations d’anacardes. Un tonne de bauxite varie dans l’ordre de 30 à 55 dollars, c’est-à-dire que le grand maximum c’est 55 dollars. Donc entre pratiquement 270mille fg si on prend le cours du dollar vraiment au cours du marché parallèle, 270 à 500mille fg environ pour une tonne de bauxite mais la concession là, si dans la concession il y a une plantation, le propriétaire de la plantation est dédommagé ? J’ai vu cela déjà à Kintiya dans Siguiri où la SAG, il y a une base de calcul vraiment assez modique et à travers laquelle on dédommage les populations.
L’anacarde, la tonne, récemment lorsque les prix ont connu une flambée, il n’y a pas longtemps en Guinée, c’était dans l’ordre de 17 mille de fg à 16 mille fg le kg, une tonne produit alors 16 millions de francs guinéens. Comparez qu’on décime une plantation d’anacarde qui peut produire des noix dont la tonne se vend à 16 millions, en faveur de la bauxite dont la tonne varie entre 270 et 500 mille francs guinéens, sans compter maintenant lorsqu’on achète l’anacarde on prend l’argent là on le donne directement au planteur ou au paysan, alors que l’autre on prend la richesse on envoie non elle n’est pas renouvelable, mais elle dégrade l’environnement. Voilà la problématique de la croissance dont on parle. Et que nous ne croyons pas assez.
Une synthèse d’Alpha Amadou Diallo