L’honorable Ousmane Gaoual Diallo, député de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) était l’invité de la radio Espace Fm, le 19 octobre dernier, dans l’Emission les Grandes Gueules. Dans cet entretien accordé à nos confrères, le député dénonce la malgouvernance, qui se caractérise par la corruption dans les secteurs miniers, notamment.
Un commentaire sur la crise à la Suite à la fédération guinéenne du football ?
Oui c’était prévisible parce que l’élection quand elle s’est déroulée, on a suivi tout ça, c’était quasiment l’élection présidentielle entre guillemet. Ça a pris des proportions inhabituelles. Du sportif, et de plus en plus la politique s’est initiée dans le monde du sport. Moi-même j’en étais un acteur, 18 ans de pratique de haut niveau ici je connais très bien la maison de la jeunesse non du judo de la lutte des (,,,,,). Aujourd’hui on voit que c’est les acteurs politiques qui décident de la pratique du sport. Ça veut dire que le sport est de plus en plus relégué au-delà du spectacle des hommes politiques, c’est ce qui fait qu’aujourd’hui on ne parle pas du sport, on ne parle pas de la politique sportive, du développement des activités du sport populaire, du sport scolaire, on parle plutôt des hommes qui animent le sport, et donc les crises de la société se transfèrent immédiatement dans le monde sportif.
Forcément de l’extérieur, vous avez suivi toutes ces agitations qui ont quand même secoué un certain nombre de préfectures de la Guinée. Le dernier cas c’est à Beyla où les populations sont sorties hier (jeudi 19 octobre, ndlr) pour réclamer un minimum d’infrastructures, et même des enseignants dans les écoles, qu’est-ce que ces situations depuis Boké jusqu’à Beyla, en passant par Kérouané, Kolaboungni et Kamsar. Qu’est-ce que ces différentes situations vous inspire, honorable ?
Disons que pour nous, c’est le résultat d’une politique d’un gouvernement qui se soucie peu de l’impact de ses actions en bien être pour les populations guinéennes, et que nous dénonçons à chaque loi de finance, à chaque fois que nous avons l’occasion d’être face à un gouvernement, nous disons attention le tout n’est pas d’annoncer des chiffres de croissance, le tout n’est pas de dire nous vendons de la terre sous forme de bauxite, l’essentiel est que les populations sentent l’amélioration de leur niveau de vie. Or, tout ce qui se passe aujourd’hui nous avons le sentiment que les ressources guinéennes sont accaparées par un petit clan qui vit au-dessus de tout, qui peut se permettre d’acheter des terres, des terrains de construction à 600.000 dollars à Conakry, de construire des immeubles a 1.000 000 de dollar us à Conakry, alors à côté oui nous souffrons d’un manque d’enseignants, oui des femmes continuent de mourir en donnant de la vie, oui les enfants ne peuvent pas aller à l’école faute de moyen, faute d’infrastructures scolaires, faute d’enseignants, ces réalités-là, forcément elles rattrapent, et puis on ne parle même pas d’infrastructures routières et de l’absence de développement dans le pays. Donc forcément d’un moment à l’autre, on demande des comptes à ceux qui sont en charge de gérer nos biens publics et malheureusement cela éclate par subversion, et je pense qu’il est encore temps pour le gouvernement de faire face et d’écouter les gens, et réagir positivement à leurs attentes, au lieu de dire tout le temps que ce sont des instrumentalisations.
Ça traduit quoi ? Des zones comme Boké, Kérouané, Beyla qui ont voté à des proportions extrêmement importantes pour le RPG arc –en-ciel et son champion, ça traduit quoi pour vous ? ça envoie quoi comme message politique, ces remous sociaux venant de ces fiefs du RPG arc –en-ciel?
Ça veut dire qu’on est entendu parce que nous, nous faisons régulièrement les tournées en haute guinée. Moi-même j’ai fait 4 fois le tour à Kérouané, pour aller dire aux populations ‘’attention’’, vous choisissez un homme mais regardez les résultats. J’ai mis 4 heures pour faire Kankan- Kérouané, c’est une route très courte dans des conditions extrêmement difficiles. Nous avons pris des raccourcis, par moment on peut mettre 5heures ou 6heures pour rejoindre Kérouané, quand on sait que les ressources minières qui sortent de cette région entre Kérouané centre et Banankoro c’est l’enfer, c’est extrêmement difficile de parcourir Banankoro Siguiri Baro, Damaro revenir vers Beyla. C’est une des routes impraticables et difficiles, à expliquer pour des populations qui voient tous les jours les richesses sortir de leurs terroirs et partir. Ils ont un atout a Kérouané, ils ont l’eau mais l’eau ce n’est pas l’état qui leur donnent, ça vient de la montagne. Donc automatiquement les populations du centre-ville ont de l’eau. Mais il n’y a aucune infrastructure. Kérouané est plus délabrée que Macenta ou on est ne tire pas de ressources naturelles.
Jacks le disait tantôt que des nouvelles promesses vont venir enterrer les anciennes promesses qui ont été tenues, parce qu’il suffit de venir tenir un beau discours pour faire des nouvelles promesses à ces populations, qu’aux prochaines élections les populations ne vont pas hésiter à voter encore pour le RPG arc-en-ciel. Quelle alternative avez-vous. On dit que s’il y avait une opposition vraiment forte, elle aurait pu se servir de cette situation pour faire une sorte de retournement de situation en sa faveur?
La situation est déjà en notre faveur, rassurez-vous les populations vont exiger une élection plus transparente parce que la conséquence aussi c’est la mauvaise élection c’est à dire que le RPG a fait croire à toute la Guinée par la fraude que ces régions étaient acquises, et que les populations votaient librement plus à 99 % pour Alpha Conde, ce qui n’est pas du tout vrai.
Qu’est-ce que vous proposez pour changer la méthode de gouvernance aujourd’hui, avec ce qui est en place qui ne permet pas assez aux populations d’espérer ?
Il y a des préalables pour une bonne gouvernance. Il y a une justice objective et soutenue par des lois, il y a des lois dans notre pays, il y a une impunité qui est garantie depuis qu’Alpha Conde est là, on voit que la justice part tous les jours à côté et l’absence de la justice fait que le monde des affaires est inquiet. Toutes les entreprises qui venaient investir se sont inquiétées et sont reparties, on a aujourd’hui que de petits trafiquants qui viennent prendre la terre. Mais il n’y a pas de gros investissements qui viennent parce que le monde des affaires est un monde qui ne croit pas quand -il n’est pas rassurer par une justice indépendante, forte dans un pays, ils ne viennent pas il faut déjà rétablir la justice, ensuite être vertueux dans la gestion des affaires publiques. On a vu combien de scandales de corruption ont éclaté depuis que les 13 milliards ont disparu entre M. Kerfala Yansane qui était ministre de l’économie, jusqu’au détournement des centaines, de milliers l’affaire (asperbras), de l’énergie, il y a des centaines et des millions de dollars qui se volatilisent chaque année, sans que personne ne soit inquiété. Ça veut dire que les Guinéens ne croient pas, le gouvernement actuel ne rassure pas.
Aujourd’hui on ne croit plus aux politiques…
C’est facile de dire qu’on ne croit plus aux politiques, c’est normal aussi parce que c’est des hommes politiques qui gèrent les destinées de la Guinée, c’est normal qu’il y ait les mauvais comportements, les mauvaises attitudes de ceux qui gouvernent rejaillissent sur ceux qui sont en attente de gouverner, c’est un raccourci qui est acceptable mais qui n’est pas juste.
Comment comprenez-vous qu’Alpha Conde vire 3 ministres et que vous les reprenez de l’autre côté, dans le cabinet du chef de file de l’opposition? Comment ça se fait ?
Peut-être qu’il les a virés parce qu’ils sont trop bons pour lui, on ne choisit pas qui est dans l’opposition, on ne choisit pas en fonction des qualités, qui est dans l’opposition, l’opposition c’est ceux qui s’opposent au gouvernement par rapport à la loi et à partir du moment vous êtes dans le même camp, vous partagez des responsabilités, vous partagez tout. Si vous êtes au pouvoir vous choisissez librement ceux qui sont bons parce que vous avez le libre avis de le faire, vous avez la loi en votre faveur vous les choisissez, mais lorsque vous êtes dans l’opposition vous composez avec toutes les composantes indépendamment des qualités intrinsèques avec les uns et les autres. Mais vous partagez une valeur commune qui est celle de faire en sorte qu’il y ait une alternance politique, c’est à cause de ce travail-là, que ceux qui sont dans l’opposition s’unissent pour avancer.
Vous êtes opposant en même temps député à l’assemble nationale, qu’est-ce que vous avez fait pour demander des comptes au gouvernement, compte tenu de la délivrance de certains permis miniers à certaines sociétés qui agissent du côté de Boké. Vous faites quoi dans l’application de la loi de façon rigoureuse, mais aussi les différentes localités à l’intérieur du pays qui se plaignent, vous savez qu’une bonne partie du budget leur est alloué, qu’est-ce que vous faites pour que ça soit transparent dans la gestion sur place et l’exécution de certains travaux d’intérêt publics au bénéfice des populations de ces différentes zones ?
J’ai envie de dire que ce que nous faisons n’a pas encore d’échos sur la population, ce n’est pas visible parce que lorsque nous avons entendu parler de la société minière de Boké la SMB qui exploite la mine, nous avons diligente une enquête parlementaire. Aujourd’hui il y a 4 lois de résolutions qui attendent d’être votées pour déclencher des enquêtes parlementaires, que la mouvance refuse, la mise en place de ces résolutions dépendent de la mouvance, parce qu’on a besoin de la majorité pour en faire des lois et rendre obligatoires les enquêtes. Mais on n’arrive pas. Nous ne sommes que 47 députés de l’opposition, la mouvance refuse qu’on examine ces sujets. Normalement dans un parlement lorsqu’un parlementaire envoie une proposition de lois, cette proposition est discutée en plénière, et on vote pour la rejeter ou l’adopter. Mais même les mettre en programme, ils refusent parce que dans le bureau du parlement, il y a 13 personnes qui décident du calendrier parlementaire. Et 2 sont de l’opposition et 11 de la mouvance. Donc même notre ordre du jour il est dicté par Sékhoutoureya. Le parlement ne joue pas son rôle, nous avons même été incapables de débattre de notre propre budget au parlement parce que le bureau de l’assemblée a refusé qu’on débatte de cela et comme le parlement, on a que des mots comme armes, on n’arrive pas à faire bouger en tapant sur leur intelligence, malheureusement quand ils viennent à l’hémicycle, ils laissent leur intelligence à la maison et on n’arrive pas à discuter clairement des sujets nationaux, on est désarmé à l’assemblée nationale.
Depuis 2013 vous manifestez, on a pratiquement pas de résultats, vous n’avez pas d’autres alternatives pour obtenir la mise en application des différents accords?
Disons qu’il y a très peu d’alternatives, le problème est que quand on est dans un pays ou même quand vous mobiliser 1 million de personnes, ça laisse insensible au pouvoir, vous voulez faire quoi ?on ne va quand même pas prendre des armes. Nous n’avons que les manifestations ou les protestations publiques que nous faisons à travers vos médias, à l’assemblée nationale, nous prenons la parole, on fait des manifestations.
On fait des villes mortes, on parle dans les radios, on interpelle à l’assemblé nationale, quels autres moyens nous disposons ? Oui, nous voulons changer, nous aurions souhaité voir un élément qui est capable de faire infléchir le gouvernement de prendre conscience de la situation de notre pays mais hélas ! Nous avons que ces manifestations pour le faire, parce que on a quand même constaté qu’à chaque grande manifestation, on a avancé d’un pas, cela montre qu’Alpha aime les manifestations, parce qu’il les sollicite, les suscite et les encourage.
Parlant de cet accord cadre, comment vous appréciez cet effort du gouvernement, du président de la république et comment est-ce que vous entrevoyez tout ça dans l’avenir du pays ?
Cet accord cadre me fait peur. La Chine dit si vous avez des projets pour faire une route on le finance, dans les conditions normales lorsque la Guinée a besoin de faire une route, il fait son projet et il soumet à la concurrence, les entreprises font des offres, et on regarde le plus intéressant du point de vue économique, du point de vue de la dette et du point de vue du résultat on choisit par voie d’un appel d’offres. Mais là lorsque vous dites que quand vous avez un projet de route, qui va décider que le km de route coûte 1 million de dollars us, ou 1million 5 cent ou 5 cent mille, il n’y a pas de concurrence, c’est l’Etat chinois qui va décider. On va surendetté les générations futures, c’est extrêmement grave, c’est inquiétant. Il faut que l’Etat guinéen sorte de ces types d’accords. Oui si la Chine veut nous prêter de l’argent, qu’elle nous prête. Mais qu’elle nous laisse choisir le mieux disant pour nos infrastructures, c’est très important d’ouvrir nos projets à la concurrence, ce qui permettra d’abaisser les coûts et d’avoir de meilleurs résultats. Si vous faites ces accords-cadres tels que c’est apparu dans la presse, parce qu’on attend encore de voir le dossier, c’est inquiétant, 20 milliards de dette, ce n’est quand même pas en 50 ans que la Guinée va les rembourser, ça veut dire qu’on va surendetter les prochaines générations. J’attends de voir le document pour donner de meilleures appréciations sur son contenu.
Une synthèse d’Aicha Diallo (Le Démocrate)