Censure

La libye ou le symptôme d’une Afrique qui sacrifie ses enfants (Par Naïny Bérété)

Les images publiées par la chaine de télé américaine CNN la semaine dernière montrant une vente de migrants aux enchères, ont causé une vague d’indignation sur le continent et dans le monde entier.

Des politiques, des hommes d’Etat, des artistes, des sportifs en pensant par des personnes anonymes sur les réseaux, tous ont exprimé leur indignation face à ces actes abjects d’une autre époque

Si au-délà des condamnations et des manifestations qu’on a pu voir ça et là, quelques actes ont été pris notamment le rappel d’ambassadeurs, de chargés d’affaires par certains pays d’Afrique, l’annonce de  l’ouverture d’une enquête par le gouvernement libyen… mais de quel gouvernement en réalité? Il est temps de faire le vrai diagnostic sur le sujet.

La situation en libye est en effet assez révélatrice d’un mal assez profond dont les causes sont la conjonction de plusieurs facteurs en réalité, qui vont des facteurs endogènes aux facteurs exogènes.

La pauvrété, la misère et les conflits comme facteurs endogènes de ce phénomène migratoire.

Après la grande vague de migration liées à la seconde guerre mondiale, l’on a assisté dans les années 2000 à une autre vague de migration dans le monde, liée aux politiques interventionnistes et belliqueuses de ce qu’on considère comme la communauté internationale, l’axe américano-européen en réalité. Ces interventions étaient le résultat de politiques érigeant certains Etats comme ‘’l’axe du mal’’ formés par de pays voyous, jargons diplomatico-bellicisme Etasunien, dans le sillage des attentats du World trade center. Ces interventions pour la plus part, illégales et contraires au droit international, ont sémé le chaos et sont aujourd’hui à l’origine de la naissance de réseaux djihadistes et terroristes dans ses bastions les plus éloignés.

L’Afrique a connu des conflits armées qui ont endeuillé des milliers de familles et ont favorisé le phénomène migratoire. Ces conflits stupides, encore d’actualité aujourd’hui dans certains pays du continent, ont aussi produits des effets auxquels le continent est entrain de subir de plein fouet. Ce sont : l’aggravation de la pauvrété, la misère qui s’installe durablement, l’augmentation exponentielle des épidemies liée aux mouvements de population avec l’absence de structures de soins adéquates.

Et pour ne rien arrangé à une situation dejà catastrophique, le continent africain a des dirigeants en manque complète de répères. Les dirigeants africains au lieu d’être des espoirs pour la jeunesse majorité de la population africaine , ils se sont faits les gourous de clans aux intérêts à l’antipodes des aspirations d’une jeunesse sacrifiée. Il faut bien se le dire, la jeunesse n’a jamais été la priorité des dirigeants du continent. Malgré le fait qu’elle soit craint quand elle se soulève, d’ailleurs qualifiée de poudrière pour certains si elle n’est pas entendue. Au delà de tous les beaux discours ô combien magnanime et ambitieux, aucune action concrète n’a été initiée pour la jeunesse africaine.

Des milliers de jeunes sortants chaque année des institutions d’enseignement supérieur, au lieu d’entrevoir l’avenir sous de meilleurs auspices, craignent plutôt que le pire reste à venir, des milliers d’autres préférants abandonnés les études car elles ne servent plus à rien. Diplômés ou non diplômés, tous sont destinés au chômage, à la précarité, en un mot à être des damnés d’un système impitoyable qu’est la gouvernance en afrique.

Une gouvernance dont la seule efficacité reste la corruption, les détournements de fonds publics ; le seul mérite des conflits d’intérêts, la démagogie ambiante ; la seule caractéristique la léthargie, l’immobilisme, la bureaucratisation ; pour principe l’ethnocentrisme, le communautarisme et en fin pour cycle des élections truquées qui ne sont que des moments de déclaration d’amour à la jeunesse pour pouvoir lui sucer après. Voilà les raisons qui font que la jeunesse africaine désespère, et prenant acte de cet état de fait lamentable, n’a d’autre choix que la route de l’exil à la recherche d’hypothétiques meilleurs cadres de vie.

C’est à cause des politiques de mépris que les jeunes africains n’ont plus foi en leur dirigeant et fuient le continent, c’est à cause de l’impatriotisme de nos dirigeants que les jeunes africains meurent en libye et dans la méditerranée. Qui n’aime pas en réalité réussir chez soi et devant les siens? Qui n’aime pas rester dans son pays pour gagner le respect par le travail? la réponse est personne. Travailler bien chers dirigeants, responsabiliser les jeunes, éradiquer les corruptions, écouter les, respecter en fin cette jeunesse vous allez voir qu’elle est digne, vous allez voir que cette jeunesse est responsable, qu’elle est dynamique et qu’elle sera à la hauteur des défis du développement du continent, vous verrez qu’elle a l’amour du panafricanisme.

Si les africains doivent balayer d’abord devant leur porte, il faut aussi regarder chez le voisin.

En effet, des causes exogènes sont à l’origine de ce chaos libyen.

L’intervention des entrepreneurs d’ « humanité » ou plutôt des porteurs de malheurs à l’origine du chaos

D’abord, l’intervention malencontreuse de la communauté internationale, l’axe américano-européen sous la houlette du bourreau de la paix, Sarkozy en 2011 pour a-t-on martelé, défendre les libertés, les droits de l’homme et la démocratie, a contribué à faire de ce pays aujourd’hui une poudrière aux portes du continent. L’absence de l’Etat depuis la chute du guide libyen, la constitution de milices en guise de gouvernements pluriels révèlent le malaise d’une communauté internationale aux abois fortement gênée par la situation, et un héritage de désolation pour des africains totalement désemparés.

Ensuite, en plus du chaos qu’ils ont occasionné en Libye, avec les flux de migrants qui tapent chaque semaine à leur porte, pour éviter de nourrir le fonds de commerce électoral d’une partie de la classe politique exprimant un nationalisme exacerbé voire la haine des étrangers. Les européens se sont trouvés alors coincés et pris à leur propre piège. Du coup, pour tarir ce flux de migration, l’Union Européenne a signé des accords financiers avec certains pays pour maitriser la situation. L’italie abondant dans ce sens, étant le premier pays concerné par la migration, a signé un accord controversé l’été dernier avec les milices libyennes en échange du fait qu’elles allaient juguler les traversées vers l’Italie. Les migrants continuant à affluer vers les côtes libyennes, les milices se sont alors converties cette fois dans de nouveaux trafics comme l’esclavage, le trafic d’armes, de drogues.

Si le courage du président guinéen est à saluer qui a rappeler cet état de fait devant son homologue français à l’Elysée ce mercredi, il faut également dire qu’il l’a fait dans un sens unique evidemment, oubliant de passage les responsabilités qui sont celles des leaders africains dans cette triste histoire.

Si la survenance d’un évènement est toujours consubstantielle à la réunion de plusieurs éléments, nous devons d’abord et avant tout recherché pour y rémédier, à faire notre auto-critique, à balayer devant notre propre maison, à cet égard l’Afrique apparait plutôt comme un continent qui sacrifie ses enfants.

Le sommet UA-UE d’Abidjan prévu à la fin de ce mois sonne comme l’occasion pour les chefs d’Etat africains de prendre enfin des actions concrètes en faveur de la jeunesse. Il est temps que le continent se réveille.

Par Naïny BERETE, étudiant africain à l’université de Nantes

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