Depuis quelques années, les journalistes guinéens subissent de multiples violences à l’occasion de la couverture des assemblées générales des partis politiques. Cette pratique malsaine pour notre démocratie suscite de nombreuses interrogations sur les rapports entre nos hommes politiques et les medias, sur la pertinence des règles de droits et sur la réaction de l’opinion publique, en particulier les mesures de l’indignation. Ces questions dépassent de loin le cadre de l’actualité récente au siège du RPG arc-en-ciel. L’assassinat du journaliste koula au siège de l’UFDG le montre assez.
Pourtant, tous les partis politiques adulent la presse à l’occasion des consultations électorales. Qu’ils soient du pouvoir ou de l’opposition, leurs dirigeants en font un espace privilégié pour défendre le régime ou le critiqué. Alors pourquoi ces partis politiques cautionnent la violence à l’égard des journalistes qui ne font que leur travail ? Quelle triste réalité !
Pas de démocratie sans une presse libre
Sans une presse libre et dynamique, la démocratie reste un vain mot. Car, le droit à l’information est unanimement célébré comme un marquer de l’approfondissement de la démocratie. En guinée, ce droit est constitutionnellement reconnu. Aussi, les délits de presse sont dépénalisés. Malgré tout, les journalistes sont inquiétés. Ils subissent de violences verbales, morales et psychologiques. Parfois de la part des plus hautes autorités. C’est souvent le cas du président Alpha Condé qui dispose d’ores déjà d’un permis d’humilier à octroyer aux journalistes. Et pourtant, le président de la république doit montrer l’exemple. D’ailleurs lui est totalement redevable à cette même presse qu’il voue aujourd’hui aux gémonies. Comment voudrait-il que notre presse soit professionnelle si au même moment il diminue la subvention allouée à celle-ci ?
Impossible de croire que ce n’est pas la démocratie qui est visé par le harcèlement des journalistes. Egalement, nous ne devons pas aussi être étonnés si la note de notre pays chute dans le prochain classement de la liberté de presse de reporters sans frontières.
L’indépendance de la presse, l’affaire de tous
Nous étions nombreux dans les années antérieures à dénoncer le monopole de l’Etat sur les radios et la télévision. Mais voilà qu’un autre monopole, encore plus strict tente de lui succéder : la dictature des partis politiques. Véritable glaive contre le monde médiatique. Le plus inquiétant est le silence assourdissant des responsables politiques. Certes, ils sont Charlie ; mais quand il s’agit de leurs compatriotes journalistes, leur indignation se fait outrageusement silencieuse. Pour eux, le journaliste est comme l’indiquait Césaire cet homme-insulte : on peut tout lui faire subir sans avoir de compte à rendre à personne, sans avoir d’excuses à présenter. Malheureusement, c’est à cette effroyable réalité que les journalistes guinéens sont confrontés.
Que faire ?
Maintenant commence l’essentiel. Car il faut refuser, malgré les tentatives et intimidations de capituler intellectuellement. Au contraire, il nous faut gagner la bataille de la liberté. C’est pourquoi, en démocrate convaincu, nous devons tous résister à la moindre atteinte à la liberté d’expression. Ce combat n’est pas que celui des journalistes. Chaque républicain doit en faire sien. Car, le danger est sérieux et lourd. Alors, journalistes, syndicats, ONG, organisation de défense des droits humains, tous fédérons les énergies pour l’indépendance de la presse. Belle cause à défendre !
Par Amadou Tidiane Barry, acteur de la société civile.
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