Le 14 Février dernier, c’est une page importante de l’histoire de l’Afrique du Sud qui s’est tournée. Après 9 ans passés à la tête de l’ancienne première puissance économique de notre continent, Jacob Zuma, 75 ans, premier Zulu à la tête du pays, a été contraint à la démission par son parti : l’African National Congress (ANC).
Ces neuf années de gestion ont surtout été marquées par une succession de scandales de corruption, de conflits raciaux, d’une certaine instabilité politique mais surtout par un accroissement de la pauvreté et un net recul des principaux indicateurs économiques. Un cocktail détonnant qui a emporté celui qui, en 2005 déjà (!!), faisait face à des accusations de corruption dans une affaire de vente d’armes et qui aujourd’hui encore doit répondre de 783 chefs d’inculpation pour corruption, fraude fiscale et extorsion de fonds. Rien que ça…
Au delà de l’avènement du richissime Cyril Ramaphosa à la tête du pays (il trône à la tête d’une fortune estimée à 450 millions de dollars en 2015 selon Forbes), c’est l’hégémonie de l’ANC sur l’échiquier politique sud-africain qui est en jeu. En plus des nombreuses affaires judiciaires pendantes, un des signaux forts adressés par la population a été la cuisante défaite du parti créé par Nelson Mandela, lors des dernières élections municipales de 2016 (symbolisé par la perte des grandes villes que sont Port Elizabeth, Prétoria et Johannesburg). Depuis lors, des voix s’étaient élevées pour réclamer une refonte et un nouveau leadership à la tête du parti centenaire; la perspective de perdre la prochaine présidentielle étant dans tous les esprits. Depuis, un congrès a été organisé et des têtes sont tombées. L’heure serait donc à l’action et à l’unité au sein du parti. Cela changera t-il la donne à un an des présidentielles? Rien n’est moins sûr.
Un destin à la Lula
Membre influent et très actif de l’ANC dès les premières heures de lutte contre le régime de l’Apartheid, celui que Madiba himself avait pressenti comme son successeur, a un parcours assez atypique. Tour à tour syndicaliste, homme politique, homme d’affaires, Cyril Ramaphosa est de nouveau dans l’arène politique depuis 2014, année à laquelle il a été élu vice-président du pays. Un parcours qui ressemble quelque peu à celui de Luiz Inácio Lula da Silva, ancien Président brésilien. En lui souhaitant une toute autre fin.
Réputé pour sa patience et son sens de la diplomatie, autant d’atouts qui ne seront sûrement pas de trop pour relancer la machine économique de ce pays, le nouvel homme fort de l’Afrique du Sud devra faire face à une économie moribonde dont le taux de chômage est estimé à environ 28% en 2017 couplé à une croissance quasi-nulle ces dernières années.
Après avoir hérité de la tête de l’ANC en décembre dernier dans un duel ultra serré avec son adversaire (à peine une centaine de voix les sépare), l’ancienne présidente de la commission de l’Union Africaine, Nkosazana Dlamini Zuma, l’homme a principalement axé sa stratégie autour d’un discours de rupture. Il a clairement laissé transparaître sa détermination à améliorer la gouvernance économique et surtout à mettre fin à la corruption qui gangrène le pays. Des intentions qu’il faudra traduire par des actes concrets, au risque de se retrouver sur la touche au profit d’une opposition agressive dont l’électorat semble en constante progression comme le montre les derniers résultats électoraux et les sondages parus dans la presse locale. Autant dire que les prochains mois s’annoncent donc décisives et l’Afrique du Sud pourrait connaître, pour la première fois depuis 1994, une alternance démocratique. A suivre.
Soul