Censure

Remaniement ministériel / Les vérités de Tibou Kamara

Annoncé le 8 mars dernier, à l’occasion de la commémoration de la fête internationale de la femme, la question du « remaniement ministériel » a été l’un des sujets sur lesquels le ministère d’Etat conseiller personnel du Président de la République, Tibou Kamara, s’est exprimé dans l’émission « Les Grandes Gueules » de la radio Espace FM, hier mercredi.

Qu’est-ce qu’on peut attendre de ce remaniement ?

Je pense qu’on ne fait pas un gouvernement par rapport à une échéance électorale. Il ne faut pas lier les actes posés à l’intérieur du pays à des calculs politiques ou à des visées électorales. Aujourd’hui, est-ce que la Guinée a besoin d’un gouvernement nouveau pour reprendre confiance et espoir ? Je dis oui ! Ce que le Président va faire, cela est à sa discrétion, mais je sais qu’il a entendu les cris qui se sont élevés dans le pays et il est conscient de l’attente légitime de la population qui veut avoir un gouvernement beaucoup plus volontariste, beaucoup plus pragmatique.

Mais avec quelle marge de manœuvre, quand on sait que le mode de gouvernance qui est en place enlève pratiquement tous moyens aux ministres ?

De toutes les façons,  le chef de l’Etat reste le chef de gouvernement en réalité, parce que c’est lui qui est élu. C’est lui qui délègue une partie de ses pouvoirs à ses collaborateurs, à commencer par le Premier ministre, et les autres ministres. Déléguer veut dire avoir un droit de contrôle, mais cela ne veut pas dire une immiscions au quotidien, sinon à la limite, il aurait cumulé toutes les fonctions à son niveau et les aurait exercées tout seul ; mais s’il décide de déléguer, cela veut dire faire confiance, parce que vous ne déléguez que quand vous faites confiance. Maintenant, il ne faut pas confondre le fait qu’on n’utilise pas cette confiance pour remplir son mandat à une velléité du Président à empiéter sur les prérogatives des ministres.

Vous avez pris l’exemple de Kassory, vous avez dit que Kassory se comporte en homme libre et indépendant, lorsqu’il s’agit de conduire ses dossiers, mais ce que vous ne savez pas, il les conduit, comme vous le dites, mais sous l’autorité et l’impulsion du chef de l’Etat. Pourquoi l’autorité du Président paraitrait plus chez d’autres que chez lui ? Moi je pense que c’est une question de personnalité et de volonté d’être utile ; parce que la plupart des collaborateurs du chef de l’Etat, puisque le plus souvent ils ne sont pas dans le vrai, donc n’ont pas l’indépendance et la liberté de conscience d’agir comme ils devraient le faire.

Lorsque tous les pouvoirs du ministre sont rognés ou récupérés ?

Il y a ce conflit qui est permanent, et qui ne concerne pas que la seule Guinée, qui est celui de l’autorité du Président et de la liberté des ministres. Je viens de vous donner un exemple ; en France, lorsque le conflit entre Chirac et Nicolas Sarkozy a atteint un niveau, Chirac a tranché en direct, ce qui n’est pas dans la courtoisie républicaine reconnue à la France, en disant j’ordonne et j’exécute. Je veux dire qu’un ministre ne peut pas prétendre à une liberté ou à une indépendance absolue, mais peut faire preuve de responsabilité dans l’exercice de ses fonctions. Mais s’il estime qu’on n’est pas dans les conditions de faire le travail qui nous a été confié, on ne peut pas le réussir, on démissionne ou on se tait.

Donc normalement, tous les Premiers ministres d’Alpha Condé devraient démissionner ?

Bien sûr, s’ils estiment qu’ils ne sont pas dans les conditions pour travailler. Ce que je n’ai pas entendu pour l’instant, il n’y a que la presse et l’opinion qui se plaignent de la difficulté des Premiers ministres, alors c’est à qui la faute ? Au Président de la République ou à eux ?

Moi je pense que, c’est une expérience personnelle, chaque fois qu’un chef d’Etat a été élu ici, on a toujours dit que c’était ses collaborateurs d’abord qui étaient le problème, ensuite on a évolué dans le jugement, en finissant par dire que ce sont eux mêmes le problème. Je vais vous dire, ce qui est le plus important, moi, quand on dit que le Président est un problème, moi je le ne le crois pas. Parce qu’il n’y a pas d’exercice solitaire du pouvoir possible, surtout à notre époque et dans les contextes de démocratie. Mais il y a des collaborateurs qui pensent que, je ne dirais même pas qu’ils sont dociles, puisque cette docilité dont on parle, c’est en fonction de leur intérêt et dont ceux du chef de l’Etat lui-même, il faut qu’on soit claire. Aujourd’hui, il est facile de dire que le chef de l’Etat nous écrase ; en réalité beaucoup pensent que la loyauté à un chef de l’Etat, c’est flatter son égo, et de vouloir manipuler son opinion, et pour cela, il faut lui plaire, moi je ne suis pas de cet avis.

Une  synthèse de Abdou Lory Sylla pour Guinee7.com

Obtenez des mises à jour en temps réel directement sur votre appareil, abonnez-vous maintenant.