La France vit depuis plusieurs semaines une révolte sociale aux allures d’une guerre civile. Le mécontentement social massivement incarné par les Gilets jaunes, tantôt violemment exprimé, tantôt sévèrement réprimé, est le signe d’une France irrémédiablement fracturée : d’un côté les Riches et les Bobos ; de l’autre la classe moyenne et ceux qui domptent la queue du diable pour survivre. Les français issus de l’immigration font majoritairement partie de ce dernier bloc. Mais les jeunes des banlieues, parmi eux les Noirs et les Arabes, souvent stigmatisés comme des fauteurs de troubles et des ennemies de la République, se sont abstenus de participer aux manifestations des Gilets jaunes et aux violences qui vont avec. Leur inertie, peu abordée par les media, témoigne d’une double fracture sociale sur fond de discrimination systémique.
Si les Gilets jaunes étaient des jeunes Noirs et Arabes des Banlieues, ils seraient probablement karchérisés sous le gouvernement de Nicolas Sarkozy.
Imaginons un instant ce que serait la réaction des français si, par un mouvement de jeunes français Noirs et Arabes, des autoroutes sont bloquées, des péages détruits, une préfecture incendiée, des commerces saccagés et pillés, l’Arc de triomphe dégradé, l’avenue des Champs Elysées et ses prestigieux commerces bloqués pendant les week-ends les plus rentables de l’année, le président Macron jugé et fictivement décapité par son effigie, des policiers agressés avant prendre la fuite en moto. Les racistes, xénophobes, négrophobes, arabophobes et autres sympathisants de l’extrême droite seraient ravis de pouvoir les diaboliser davantage, et de déverser leur bile sur eux. Ils sont certainement déçus de voir que ceux qui pillaient des magasins lors des manifestations des Gilets jaunes n’étaient pas ces jeunes Noirs et Arabes des banlieues. Si c’étaient eux, l’indulgence des autorités serait-elle pas la même ? Si les Gilets Jaunes étaient des Noirs et des Arabes, le président français aurait gagné des points d’opinions favorables s’il donnait l’ordre aux force de l’ordre briser farouchement leur mouvement.
Sarkozy aurait promis aux français de les débarrasser de cette « racaille », avec son fameux « karcher » qui n’a jamais fonctionné, sinon pour s’éclabousser lui-même. Xavier Lemoine, qui fut maire de Montfermeil en Seine-Saint-Denis lors du mouvement des jeunes des banlieues en 2005, aurait pris un arrêté municipal interdisant aux jeunes de cette banlieue de sortir le soir. Philippe de Villiers, icône aigrie de l’extrême droite non assumée, qui assimilait la révolte des jeunes des banlieues en 2005 à une « guerre civile ethnique » et exigeait le rétablissement de la double peine, aurait envoyé l’armée les bastonner jusqu’à leurs caves. Florent Philippot, arriviste opportuniste de l’extrême droite assumée, aurait encore fantasmé sur la question migratoire et culpabilisé l’extranéité afro-musulmane des jeunes Noirs et Arabes des banlieues, pour draguer l’électorat xénophobe. Tous les partisans d’un nationalisme exacerbé auraient constitué un front de guerre contre ces jeunes Noirs et Arabes.
Si les Gilets jaunes étaient des jeunes Noirs et Arabes des Banlieues, ils seraient probablement déchus de leur nationalité française sous le gouvernement de François Hollande.
A plusieurs reprises, Manuel Valls qui a été ministre de l’Intérieur et premier ministre français, a exprimé des idées xénophobes et islamophobes. C’est lui qui disait au marché d’Evry qu’il faut « blanchisser » la population car il y avait trop de Noirs et d’Arabes. Manuels Valls, français par naturalisation issu de l’immigration espagnole, moins français que tous les jeunes Noirs et Arabes nés en France, a voulu, avec une hargne déconcertante, déchoir de leur nationalité française les jeunes délinquants étrangers. C’est aussi lui qui proposait de fermer des mosquées en France au titre de la lutte contre l’Islam politique. C’est encore lui qui, obsédé par son désir de pouvoir et son envie de devenir maire de Barcelone après avoir été chassé du pouvoir par les français, défendait publiquement en Espagne que l’Islam était un problème en France.
Cette haine décomplexée est de plus en plus exprimée et incarnée par des néo-français comme Manuels Valls, prêts à manger à tous les râteliers, et à passer à la balustrade d’une autre étable politique, quand le foin se raréfie. Si le mouvement des Gilets jaunes était mené par des jeunes Noirs et Arabes des banlieues, et que Manuel Valls était le ministre de l’Intérieur, il aurait probablement envoyé l’armée les matraquer. Ensuite, il les aurait tous déchus de leur nationalité française. Mais aujourd’hui, qualifié de traitre par certains français pour avoir tutoyé la citoyenneté française, c’est la déchéance de sa propre nationalité française qui est en jeu.
Si les Gilets jaunes étaient des jeunes Noirs et Arabes des Banlieues, ils seraient probablement accusés d’antisémitisme sous le gouvernement d’Emmanuel Macron.
Les politiques et les media français sont désemparés face au mouvement de contestation des Gilets jaunes, dont l’ampleur et la durée ne pouvaient être prédites par aucun expert des questions sociales. Malgré les multiples tentatives pour discréditer et éteindre leur mouvement, les Gilets jaunes sont encore là. Désemparés, des politiques et des media se livrent alors à manipuler la prohibition de l’antisémitisme pour donner un coup fatal aux Gilets jaunes. Des media abrutisseurs comme BFTV, CNEWS, rebattent que le mouvement est infesté d’antisémites, afin de rabattre l’élan des Gilets jaunes. Ils vont jusqu’à se livrer à une induction ahurissante : à partir du moment où une dame juive a entendu des propos antisémites lors d’une manifestation des Gilets jaunes, ce mouvement est alors devenu antisémite. Or, dans tous les mouvements exprimant une colère sociale, on peut entendre des énergumènes marginaux proférer des propos haineux contre les Blancs, contre les Noirs, contre les Juifs, contre les Arabes, contre les chinois, contre les homosexuels, etc.
Sauf que, par les temps qui courent, brandir le rejet de l’antisémitisme est à la mode, et profitable. Ce raccourci politico-médiatique est insultant pour les honnêtes français qui réclament une justice sociale en portant des Gilets Jaunes. Il est aussi insultant pour les juifs de voir qu’on manipule les injustices dont ils ont été victimes, pour briser un mouvement social inédit. Si les Gilets jaunes étaient des Noirs et des Arabes, ce raccourci honteux aurait plus de répercussion médiatique, et serait récupéré par de piteux politiciens. La morale politique étant aux abois, ces politiciens seraient montés au créneau pour exiger, de l’assemblée nationale aux plateaux des media, des actions pénales contre les Noirs et Arabes qui seraient, selon eux, des antisémites en puissance. La théorie du complot ne peut plus servir de bouclier. Il s’agit d’une cynique pratique du complot !
Aliou TALL,
Président du RADUCC
Email : raducc@hotmail.fr