Censure

La démocratie à l’africaine (Par Abdoulaye Barry)

Les pays africains francophones ont connu par le passé, de nombreuses crises d’ordre politique, social, économique et institutionnel qui ont abouti à des révolutions ou soulèvements populaires pire encore à des coups d’état, formes décriées d’accessions antidémocratiques au pouvoir.

L’édification d’une véritable démocratie est mise en mal par la persistance de considérations tribales, ethniques ou encore claniques. Il est important de s’affranchir du mythe selon lequel, en raison de leur organisation traditionnelle, les sociétés africaines seraient incompatibles avec la démocratie.

Si les années 1960 au contraire ont été considérées comme celles des indépendances et des régimes de partis uniques caractérisés par une gestion opaque, partisane ou clanique des affaires de l’Etat, les années 1990 au contraire ont rimé avec la démocratie, multipartisme et un cortège de conférences nationales.
“L’Afrique ne serait pas prête pour la démocratie !”
Ce propos prêté à l’ancien président français Jacques Chirac (1995-2007), choquant plus d’un africain sur deux, mérite encore toujours qu’on s’y intéresse pour analyser les arguments qui militent en faveur de cette croyance et en faire une contre analyse en démontrant que l’Afrique est déjà en marche vers la démocratie (sic).
Les fruits n’auront pas tenu la promesse des fleurs !

Malheureusement, en Afrique et en Guinée le constat reste toujours peu reluisant en 2019. Les débats qui se devraient d’être constructifs ont fait place aux mensonges, au despotisme, a la calomnie, aux discours haineux, voire tribaux. Ces évènements ont contribué à l’altération du climat politique, à l’accentuation des clivages personnels, politiques, voire ethniques, au maintien et à la radicalisation des régimes dictatoriaux issus des partis uniques qui sont devenus des partis forts qui n’ont rien à envier aux partis uniques d’antan avec en toile de fond une pluralité de petits partis pour la plupart sans envergure nationale.

Par la suite, les politiques ont brisé de facto le climat de confiance d’une part entre eux et la population du fait du jeu illisible des alliances contre nature qui se font et défont au gré des situations politiques tout en violant en permanence sans être inquiété les lois de la République (cas particulier des politiciens guinéens). La paix et la stabilité dans notre pays sont menacées au jour le jour à cause de toutes ces manœuvres politiciennes aux conséquences dévastatrices.
L’histoire mouvementée et récente du continent africain aux alternances difficiles nous confronte à une interrogation(?).
Faut -il réinventer “une démocratie à l’africaine ”et une vie politique qui inspire confiance et fierté ? Certes, à l’école de la démocratie, les Etats africains ont la triste réputation d’être de mauvais élèves.

Les Etats africains ont ils échoué dans la construction de leur nation ?
Manifestement OUI. On entend parler de nation, peuple que dans les discours politiques, la fibre patriotique et nationaliste ne sont palpables que lorsque des équipes nationales de football pour ne citer que celles-là (..).

La vie politique n’inspire plus confiance, surtout en prenant en compte le rôle prépondérant des armées et des forces de l’ordre à la solde des clans présidentiels, n’hésitant pas à retourner leurs armes contre leurs propres concitoyens, ou à renverser des présidents démocratiquement élus, au lieu d’être des armées impartiales et républicaines.
Tous ces éléments expliquent bien le climat délétère qui règne sur les pays africains en général et la Guinée en en particulier à l’approche des élections.

Un avertissement à nos compatriotes (spécialistes en révision de constitution, ou promoteurs des présidences à perpétuité) de se ressaisir et de comprendre qu’un « homme averti en vaut deux, et un peuple averti en vaut dix !».

En Afrique de l’ouest les guinéens et Ivoiriens doivent se mette ensemble pour éviter de tomber dans les pièges des chaos qui nous menacent, tout simplement en consolidation nos acquis démocratiques difficilement obtenus.

Cependant, nul n’a besoin de réinventer une démocratie et une vie politique, la démocratie est en construction, les propositions allant dans le sens et l’assainissement de la vie politique existent déjà(…).

Mais paradoxalement, l’adhésion des Etats africains aux instruments régionaux et internationaux allant dans le sens de la consolidation de la démocratie et de la sauvegarde des droits humains ne tarit pas, mais c’est leur application qui constitue donc le véritable enjeu sinon le vrai défi de la démocratisation des sociétés africaines.

« Enfin, à tous nos compatriotes de prendre leur destin en main, car aucun citoyen d’un autre continent viendra résoudre nos problèmes à notre place. Par exemple, les guinéens vivant à l’extérieur travaillent dure pour eux et les citoyens de leurs pays d’accueil, c’est à peine s’ils arrivent à soutenir leurs familles vivant en Guinée. La cherté de la vie est un phénomène mondial. Dans notre pays voler, mentir et corrompre sont entre autres : « notre dénominateur commun, l’intégrité est devenue par contre un comportement très rare et en voie de disparition (sic) ».

Les concitoyens doivent accepter enfin de changer leurs mentalités, car nos défis à relever sont immenses et le temps ne nous fera plus cadeau. Le discours du président Barack Obama prononcé au Ghana en 2010, lors d’une visite officielle disait : « L’Afrique en général et la Guinée en particulier au lieu d’avoir des hommes forts, doivent avoir des institutions fortes ».

Il y’a lieu de travailler à l’instauration d’une « culture de l’alternance », un principe sacro-saint de la démocratie. Réduire, les nombreux partis politiques à caractère tribaliste, sans assise nationale, voire sans idéologie politique claire et dirigé par des individus guidés par des intérêts inavoués. La moralisation de la vie politique est indispensable voire vitale, car « l’argent » est devenu le maitre absolu !

Cela doit passer par l’arrêt de la pratique répandue des achats de consciences et de votes, une véritable lutte contre l’impunité et la consolidation de l’Etat de droit. Enfin, la nécessité de la réinstauration des services militaires obligatoires dans notre pays ou des travaux d’intérêt général pour renforcer la fibre patriotique et inculquer des valeurs citoyennes se fait sentir pour parachever l’œuvre de création des nations, aux dimensions des Etats qui se sont imparfaitement constitués.

Abdoulaye Barry

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