A l’occasion de la célébration de la 26ème journée mondiale de la liberté de la presse, nous avons rencontré, ce vendredi 3 mai, la journaliste Mariam Diallo. Intéressée par la présentation à la télévision, cette jeune fille d’une vingtaine d’années se sent stigmatiser dans le milieu des médias, du fait de son mode vestimentaire. Cependant, elle se bat pour avoir sa place. (INTERVIEW)
Guinee7.com : bonjour Mariam, d’où proviennent selon vous les stigmatisations que vous subissez ?
Mariam Diallo, journaliste : Depuis 2011, j’ai mis le voile. J’étais en classe de 11ème année. Mais de là, j’ai eu de sérieux problèmes. Parce que pour mes professeurs du lycée, j’allais gâcher un talent que j’avais en moi en prenant le voile. Parce que la route me serait barrée plus tard. Je leur ai dit que non ! Si réellement la société m’accepte tel que je suis, c’est la compétence qui va compter et donc je pourrais exercer le métier que je voudrais.
J’ai passé le BAC. Je suis allée à l’université. Mais je remarquais souvent que partout où je suis, j’étais la seule à me couvrir la tête. Et souvent quand il s’agissait de présentation ou d’autres choses de ce genre, on ne m’y mettait jamais. Et je me disais pourquoi ne pas briser cette barrière qui existe entre nous et les autres ? c’est comme cela j’ai continué. Arrivée en licence 3, nous avons finis et j’ai déposé des demandes dans plusieurs organes, quelques uns m’ont appelé. Mais dès le premier entretien, la première question était, pouvez-vous exercer avec ce mode vestimentaire ? je disais, mais bien sûr. A partir du moment qu’on recherche la compétence, si j’ai ce qu’il faut, pourquoi ne pourrais-je pas l’exercer ? On me disait non, nous sommes dans un pays laïc. Il ne faut pas exposer sa foi religieuse. Il y a même d’autres organes qui m’ont proposé d’ôter carrément le voile pour la présentation et remettre après si je le voulais. Je me suis dit, mais si j’ôte le voile devant le monde entier, pourquoi me couvrir par après ?
Je suis allée ensuite vers un autre organe. Là ils m’ont dit lors de l’entretien, qu’ils évoluent dans l’évènementiel, et de savoir qu’avec ce mode vestimentaire là, tu peux interviewer des artistes, aller à des concerts. J’ai dit que s’il le faut pour le besoin du travail, je le ferais. Je me mettrais dans la peau de celle-là pour faire ce que j’ai envie de faire. Lui, il m’a accepté pour un essai. Voir l’avis des téléspectateurs, s’ils m’acceptent avec ce mode vestimentaire et apprécient ce que je fais pour eux ; je pourrais être engagée et dans le cas échéant, je serais obligé de me séparer. Donc c’est dans cette situation je suis actuellement. Et je rappelle que depuis l’université, j’ai été auprès de 5 médias qui m’ont tous refoulé.
Quel est votre état d’âme face à ce jugement, à cette stigmatisation ?
Je suis frustrée. Parce que depuis toute petite, je rêvais d’être présentatrice télé. Pour moi c’était un choc. Parfois même après l’entretien, je fonçais directement à la maison où je fondais en larme. Et même en parler maintenant, les larmes me montent aux yeux, parce que je suis vraiment atteinte. Il y a eu un moment où j’ai voulu vraiment démissionner, me retirer du monde de la presse. Mais j’ai accepté et je continue jusqu’à présent malgré tout.
Victime vous-même, quel est votre message à l’endroit des femmes qui subissent le même sort ?
Je dirais à toutes les femmes qui veulent réaliser leurs rêves, de ne pas voir le voile comme un obstacle. De persister dans le travail, de se former et que tôt ou tard, même si à présent on ne t’accepte pas, plus tard on se dira qu’on a besoin de tes compétences, donc nous pourrons briser cette barrière et être ce que nous voulons être.
Merci Mariam !
A rappeler que notre interlocutrice n’est pas la seule dans ce cas de stigmatisation, beaucoup d’autres personnes en sont victimes et cela pour la même ou d’autres raisons. Une mentalité qu’on devrait combattre pour l’émancipation et l’évolution de la corporation.
Interview réalisée par Abdou Lory Sylla pour Guinee7.com