(Discours) Il me plaît d’adresser tout d’abord au Professeur Tijjani Muhammad Bande mes chaleureuses félicitations pour sa brillante élection à la 74ème Session de notre assemblée et lui assurer de mon soutien pour le succès de son mandat.
Je tiens également à rendre un hommage mérité à Madame Maria Fernanda Espinosa Garcés pour le travail remarquable accompli durant son mandat que l’on retiendra comme une Présidence réussie. Son dynamisme et son efficacité font honneur à toutes les femmes.
Monsieur le Président,
Nous vivons dans un monde plein de défis de toute sorte :
Inégalités, conflits armés, terrorisme et extrémismes violents, réchauffement climatique, catastrophes naturelles, intolérances, phénomènes migratoires.
Un monde plus juste, plus inclusif et solidaire a toujours fait partie de mes rêves.
D’abord comme jeune étudiant révolutionnaire, puis comme militant politique dans une époque où l’aspiration pour un monde meilleur était le moteur et la raison même de notre existence.
Souvent, je pense avec nostalgie, à cette période où on mettait la personne humaine, son devenir et sa condition au centre de nos préoccupations. Le sens éthique et les considérations d’ordre moral étaient fondamentaux dans nos règles de valeurs.
Tout est différent de nos jours. On se demande pourquoi et comment on a pu perdre ainsi nos valeurs pour arriver à ne plus avoir de respect pour rien et pour personne. La situation que nous vivons aujourd’hui est le reflet de cette transformation. Quand on voit comment on traite nos semblables qu’ils soient migrants, minorités ethniques ou religieuses, on se demande ce qui nous est arrivé. Nous oublions que nous sommes tous de passage et que nous avons comme mission et devoir de protéger et respecter notre prochain et préserver cette terre que nous avons héritée de nos ancêtres et que nous devons transmettre à notre tour aux générations futures.
Nous devons reprendre conscience de nos valeurs.
Tout ne sera sans doute pas parfait mais si chacun de nous fait une action, un geste avec comme objectif d’améliorer les conditions dans lesquelles nous vivons avec nos frères et sœurs, un monde meilleur est possible.
Pour ma part, j’ai essayé de donner ma modeste contribution au courant de ma vie mais en particulier depuis mon élection à la magistrature suprême de mon pays.
En effet, tout au long de ma vie, j’ai eu pour ambition de contribuer concrètement à une Guinée plus juste et solidaire, où chaque citoyen indépendamment de ses origines et de son statut social puisse s’épanouir dans un environnement sain.
Les premières années ont été très difficiles. Les caisses de l’Etat étaient vides et notre pays n’avait plus d’écoute ni de crédibilité au sein du FMI, de la Banque Mondiale et des Organisations internationales. Il a fallu prendre le bâton du pèlerin pour négocier, convaincre. On a réussi à annuler la dette, faire les réformes qui s’imposaient. On a dû par exemple envoyer plus de 4000 officiers de l’Armée à la retraite. Il a fallu faire des choix difficiles. Donner du courant au pays dans un contexte de l’émergence de l’Ebola. Nous avons eu une période très difficile qui a été surmontée grâce à la responsabilité et à la collaboration de tous les Guinéens auxquels je rends hommage. C’est un grand peuple, croyez-moi qui a toujours su se relever avec courage.
Monsieur le Président,
Remettre la Guinée sur la carte des investisseurs n’a pas été non plus facile mais aujourd’hui nous assistons enfin à une forte croissance des investissements privés en Guinée et ce dans tous les secteurs.
En ce qui concerne la lutte contre la pauvreté, le Gouvernement guinéen a créé l’Agence Nationale de Financement des Collectivités Locales et l’Agence Nationale d’Inclusion Economique et Sociale qui permettent une meilleure répartition des richesses. Notamment l’allocation de 15% des recettes minières aux collectivités locales ou encore des transferts directs aux populations vulnérables dans les zones reculées du pays.
Ayant dédié mon mandat aux jeunes et aux femmes, leur participation au processus de décision, est au centre des actions du Gouvernement. La mise en place du programme de micro crédit a permis d’allouer aux femmes plus de 100 milliards de francs guinéens sous forme de crédit revolving. Des centres d’autonomisation moderne des femmes ont été construits et des milliers de femmes bénéficient de formation dans toutes les filières. Dans le domaine de l’emploi pour le moment 6.857 femmes ont été recrutées dans la fonction publique pour la période 2010-2018.
Dans le secteur agricole 3314 paysannes ont été formées en techniques améliorées de production agricole. Naturellement ces mesures bénéficient aussi aux porteurs d’handicap qui sont encouragés à participer à la vie active.
Sur le plan environnemental et la lutte contre le réchauffement climatique, la Guinée s’est engagée à réduire de 13% les émissions de gaz à effet de serre. Un vaste programme de reboisement de 2 millions d’hectares sur toute l’étendue du territoire guinéen est prévu d’ici à 2030.
Monsieur le Président,
L’égalité du genre est une des priorités de mon Gouvernement. En plus du respect de la parité dans les effectifs scolaires et universitaires ainsi que l’élimination du mariage précoce et d’autres pratiques discriminatoires, on pourra mettre l’accent sur des projets qui permettront une autosuffisance économique de la femme et le maintien scolaire des filles et leur accès aux filières techniques et scientifiques.
Pour combattre le chômage, nous avons aussi mis en place des programmes de partenariats publics/privés au service des jeunes et des femmes qui ont atteint pour le moment 140 millions de dollars d’investissements, mais que nous prévoyons augmenter sensiblement.
Monsieur le Président,
Il a été possible de lancer beaucoup de projets dans le domaine des infrastructures qui ont changé le visage de la Guinée. Et nous avons le programme avec la participation de nos partenaires publics et privés en vue de lancer prochainement d’importants projets de construction de logements sociaux, d’infrastructures routières, ferroviaires, portuaires avec la mise en place de zones économiques spéciales qui permettront enfin à la Guinée de devenir un pays exportateur de produits finis.
Monsieur le Président,
Lors de Cop 21, a été lancée l’Initiative Africaine pour les Energies Renouvelables -AREI.
Puis, sous ma présidence à l’UA, un engagement ferme de tous les pays africains de faire de cette initiative un modèle pour tous quand l’Afrique parle d’une seule voix a été prise et un conseil d’administration installé.
Ainsi, cette initiative de transformation initiée et menée par l’Afrique pour accélérer, intensifier et exploiter l’immense potentiel africain de sources d’énergies renouvelables.
Le Développement durable et le respect du climat sont les mots d’ordre de cette initiative.
Née avec beaucoup de scepticisme, dans un contexte général où nous avons pris l’habitude de ne jamais respecter les objectifs temporels fixes, j’ai le plaisir et l’honneur d’annoncer à cette assemblée que le conseil d’Administration de l’AREI du 23 septembre dernier a pu prendre acte et confirmer que l’objectif de financement de 10 giga watts d’électricité pour le continent qui avait été fixé pour fin 2002 sera largement dépassé ayant déjà atteint à la date d’aujourd’hui le financement de plus de 200 projets énergétiques équivalents à une puissance de 9.99 GW.
Ainsi à New York nous avons adopté 78 projets représentant 4.77 GW pour un investissement avec nos partenaires au développement de 6.436 milliards d’Euros.
Et j’ai le plaisir de vous informer que 92 autres projets sont en évaluation technique et en cours d’approbation ce pour une puissance totale à 24,76 GW.
Ceci permettra de donner de l’énergie propre à des millions de foyers repartis dans toutes les régions géographiques du continent.
Nous pouvons donc dire que l’Afrique avec cette initiative en matière d’énergie renouvelable est en action pour la lutte climatique tant pour notre continent que pour la planète.
Monsieur le Président,
Les 2/3 des Africains n’ont pas accès à l’électricité. Je lance ici un appel pour encourager et solliciter l’implication de plus de partenaires publics et privés du monde entier à investir dans le secteur des énergies renouvelables en Afrique. Ceci permettra à notre continent d’exploiter plus efficacement ses ressources et y rendre la vie plus agréable et plus attractive à nos jeunes pour qu’ils puissent enfin considérer l’émigration un choix et non une contrainte inévitable.
Quand l’Afrique gagne c’est le monde qui gagne, car l’Afrique est l’avenir du monde.
Je vous remercie.