Censure

Pollution à Fria : Des solutions, selon des agents de l’usine Rusal/Friguia

Ce mardi, 17 décembre, de fines couches d’alumine sont encore visibles sur des feuilles d’arbres dans la plupart des quartiers de Fria. C’est d’ailleurs le cas sur toutes les surfaces. Même si à l’usine, on assure que le four qui a été à la base de la fuite d’alumine dans la nuit du dimanche 17 au lundi 18 novembre et jours suivants, a été arrêté et réparé ; l’atmosphère n’est pas encore assainie et ‘‘on continue de ressentir des picotements dans les narines’’, témoigne M. Barry, cache-nez fixé à l’endroit. C’est dire que le problème est loin d’être résolu…

Arrêter le processus de calcination et exporter l’hydrate

Que faut-il faire ? Nous avons posé la question à un responsable du service contrôle et régulation de procédé qui a préféré garder l’anonymat. ‘‘Si Rusal Friguia ne peut pas contrôler les émissions de la poudre d’alumine à la calcination via les électrofiltres, il serait temps qu’elle arrête le processus de calcination et exporter l’hydrate (produit semi-fini). Car cette poudre n’est pas complètement dépourvue de la soude caustique appelée dans l’unité, la liqueur forte. A la sortie de chaque ventilateur de tirage des fours, sont installés des électroaimants puissants capables d’attirer les particules d’alumine allant vers les cheminées ; en aval, sont aussi installés des électrofiltres pour les résidus’’, a-t-il répondu.

Exporter de l’hydrate ne serait pas inédit. Les Américains de Reynolds pour des besoins strictement commerciaux -l’industrie cosmétique utilise l’hydrate comme intrant et en vendant au même prix que l’alumine calcinée, on fait une belle économie sur le prix de revient-, l’ont fait à un moment de l’histoire de l’usine de Friguia (entre 1999 et 2002.

10 à 15% de la production s’envolent

Un autre agent de l’usine, lui aussi sous le saut de l’anonymat, estime que la meilleure des solutions est ‘‘de réparer les électrofiltres. Et pour cela, il faut des ressources financières et humaines. Les techniciens qui réparaient ces appareils ont tous quitté. Et ne veulent pas revenir, compte tenu de la situation précaire des agents de Rusal/Friguia.  C’est déjà 10 à 15% de la production qui s’envolent.  C’est une perte énorme. Cet argent pouvait servir à faire face à beaucoup de problèmes’’.

C’est vrai qu’exporter l’hydrate réduit le champ de la clientèle car ‘‘ce ne sont pas toutes les fonderies qui disposent de fours pour calciner l’hydrate’’, mentionne notre interlocuteur. En attendant, les populations continuent de s’inquiéter sur ce que la présence massive de l’alumine peut causer sur leur santé.

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Sur la toxicité de l’alumine, voici ce qu’en dit Edouard Bastarache, Céramiste & auteur d’ouvrages sur la céramique et la toxicologie.

En général, les alumines sont efficacement éliminées des poumons et sont considérés comme poussières nuisibles ; leur rôle dans la maladie pulmonaire fibreuse n’est pas complètement élucidé. Des niveaux élevés d’aluminium (entre 400 et 1080 mg/kg de tissu pulmonaire humide) ont été trouvés dans les poumons de sujets exposés pendant 10 à 37 ans à des poussières d’alumine. Les expériences sur des animaux indiquent que l’inhalation prolongée d’alumine implique une élévation dans la concentration de l’aluminium dans le cerveau. Une étude de la littérature médicale (1957), de la toxicité pulmonaire de l’aluminium effectuée aux Etats-Unis a conclu que l’aluminium, l’oxyde d’aluminium et le hydroxyde d’aluminium Al(OH)3 ne causent pas d’effets pulmonaires ; les lésions ont rapporté par quelques auteurs résulteraient de la présence d’autres substances.

I-Pneumoconiose : Un certain nombre d’études épidémiologiques portant sur des ouvriers de fonderies d’aluminium ont confirmé une absence ou bien la présence d’une minime atteinte pulmonaire fibronodulaire, et aucune mortalité excessive liée à la pneumoconiose. Le risque lié à l’exposition chronique à la poussière d’alumine (Al2O3) n’est pas entièrement élucidé. Quelques auteurs pensent que l’alumine peut produire une pneumoconiose (aluminose) tandis que d’autres ont recommandé l’utilisation de l’alumine en poudre par inhalation comme méthode thérapeutique et préventive dans le cas de la silicose. Des études italiennes suggèrent que l’exposition chronique à des concentrations élevées d’alumine peut causer une légère réaction fibreuse pulmonaire et la présence de petites opacités sur la radiographie pulmonaire. Quelques cas de la fibrose dus à une exposition prolongée à l’alumine pendant la production d’abrasifs ont été rapportés. Il ne semble pas que ces ouvriers aient été exposés à la silice ou à l’amiante.

II-Fibrose Interstitielle : Les études semblent indiquer que, indépendamment des expositions à d’autres pneumotoxiques, l’inhalation massive d’aluminium ou d’alumine peut favoriser le développement d’une fibrose interstitielle.

III-Bronchite Industrielle : L’exposition prolongée et excessive à des poussières nuisibles de cette nature (100 mg/année pendant plus de 20 années) a été accompagnée de trouvailles correspondant à un degré mineur de bronchite industrielle chronique non spécifique.

IV-Asthma : Un syndrome asthmatiforme a été décrit parmi des ouvriers des salles de cuves attribué par quelques auteurs à l’exposition aux fluorures volatils. Un syndrome obstructif respiratoire a été également décrit parmi des ouvriers impliqués dans la fabrication du fluorure d’aluminium.

Ibrahima S. Traoré pour guinee7.com

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