Censure

Et Cellou zigouilla l’UFDG ! (Par Ibrahima S. Traoré)

Quand l’heure du bilan sonnera – elle arrivera forcément ! – Cellou Dalein n’aura pas qu’à justifier son inaction pour stopper le remplissage du cimetière de Bambéto ; il devra aussi dire comment il a réussi, lentement, mais surement, à tuer le parti qui lui a été ‘‘confié’’ en vue de conquérir le pouvoir.

Cellou, pour faire plaisir aux politiques qui s’agitent sur les réseaux sociaux, décide de priver son parti des élections législatives. Parce que, selon lui, comme s’il faisait une ‘‘géniale découverte’’, les dés sont ‘‘pipés’’. Et pourtant, lui rétorque un des amis de l’opposition, Mamadou Bah Baadiko pour ne pas le nommer, le ‘‘fichier actuel n’est pas pire que 2015 ou 2013. Et pourtant, ils n’avaient pas boycotté les précédentes élections. Il n’y a pas plus d’anomalies aujourd’hui qu’il y en avait à l’époque, on n’en parlait moins à l’époque. Donc on ne peut gagner une guerre en refusant de la mener’’.

Les conséquences du boycott des législatives pourraient être fatales au principal parti de l’opposition pour des raisons ci-dessous.

1-Finances. D’abord une anecdote. Tout jeune reporter, en début des années 2000, je vins interviewer Siradiou Diallo à Coléah. En marge de l’interview, il me dit qu’un politicien averti en Afrique, ne boycotte jamais les législatives. Il aurait appris cette leçon de ses nombreux amis chefs d’Etats africains. Parce qu’avoir un député c’est de trouver un job pour un militant ; et s’assurer du soutien de toute sa famille (dans le sens africain du terme). Mieux, les députés participent au financement du parti (à l’UFDG, c’est 30% du salaire). Les députés guinéens gagnent au bas mot, 25 millions GNF mensuels. Ce qui, au regard du SMIG (440 mille GNF), est mirobolant en Guinée. Dalein en refusant d’aller aux législatives, coupe à son parti et à de nombreux militants une manne financière. Récemment, la pagaille organisée par les députés de son parti réclamant au président de l’assemblée, des primes relevait plus de la nécessité que du principe. Il aurait dû prendre la graine ; hélas !

2-Politiques. L’autre enseignement que j’ai eu de Siradiou Diallo, était qu’aux frais de l’Etat, le député s’octroie un espace pour défendre les idéaux de son parti ; aux frais de la princesse, il s’offre des voyages pour vendre la bonne image de son parti et à contrario clouer au pilori, la gouvernance avec plus de légitimité. Etre absent d’un tel espace, et pendant cinq ans, n’augure sans nul doute pas des lendemains meilleurs. Privé de parole au sein d’un des principaux piliers institutionnels de l’Etat, l’UFDG risque de se retrouver en lambeaux.

3. Logiques. On ne fait pas la politique uniquement avec des intentions mais plutôt avec des choses concrètes qui permettent légalement de toucher une grande partie de la population. Croire, par on ne sait quelle opération du saint esprit, dans un pays miné par les divisions politiques et ethniques, qu’on peut imposer sa volonté à un pouvoir qui dispose de tous les moyens de coercition, c’est s’éloigner dangereusement de la réalité. Bâ Mamadou, en son temps, l’a appris à ses dépens, lui qui par la rhétorique enflammée empêchait le régime de Lansana Conté de trouver le sommeil. Un de mes grands frères dans le journalisme me raconte comment, après avoir passé des mois au gnouf, le courageux leader de l’Union pour la Nouvelle République (UNR), a catégoriquement refusé de verser dans la ‘‘polémique inutile’’ (en fait une simple demande d’interview). Que dire du mot d’ordre de boycott actif lancé par les opposants au projet de changement constitutionnel en début des années 2000 ? Ils se sont retrouvés tous isolés et incapables d’influencer le cours des choses, jusqu’à trouver des moyens de réaction… 5 ans plus tard.

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