Censure

Traverser l’Afrique jusqu’aux côtes méditerranéennes, le calvaire des migrants

Des milliers de migrants meurent ou subissent les pires violences au cours de leur périple à travers l’Afrique vers les côtes méditerranéennes, selon un rapport mercredi de l’ONU, qui estime que 72 personnes en moyenne ont péri chaque mois ces deux dernières années.

« Pendant ce voyage, personne ne se préoccupe de savoir si vous vivez ou si vous mourrez »: le rapport du Haut Commissariat de l’ONU aux réfugiés (HCR) et centre des migrations du Conseil danois des réfugiés détaille les souffrances et sévices subis par les migrants aux mains des passeurs, des trafiquants et des milices armées.

Au moins 1.750 personnes sont mortes dans ce périple en 2018 et 2019, ce qui représente 72 morts par mois en moyenne, « une estimation basse, la partie émergée de l’iceberg », a commenté l’envoyé spécial du HCR pour la Méditerranée centrale, Vincent Cochetel, lors d’une conférence de presse virtuelle.

« Cela en fait une des routes les plus mortelles du monde pour les réfugiés et les migrants », souligne le rapport.

Ces morts s’ajoutent à celles de ceux qui périssent ensuite en Méditerranée dans leur tentative de gagner l’Europe (plus de 1.200 en 2019 selon l’Organisation internationale des migrations).

Près d’un tiers des migrants meurent en tentant de traverser le Sahara. Les autres périssent dans le sud de la Libye ou le long de la route ouest-africaine incluant Bamako au Mali et Agadez au Niger.

Les femmes mais aussi les hommes, « risquent le viol et les abus sexuels », particulièrement aux check-points et aux frontières, ainsi que lors de la traversée du désert.

Quelque 31% des réfugiés interrogés ont été témoins ou ont subi des violences sexuelles dans plus d’un endroit tout au long de leur voyage.

Un autre facteur inquiétant selon M. Cochetel, est que près de la moitié des violences (47%) sont le fait de membres des forces de sécurité. « Les Etats ont une responsabilité », a-t-il martelé.

A leur arrivée en Libye, pays plongé dans le chaos et dernière étape avant l’Europe, les migrants se retrouvent la plupart du temps aux mains de trafiquants et milices agissant en toute impunité.

Beaucoup de ceux qui tentent la traversée vers l’Europe sont interceptés par les garde-côtes libyens. Plus de 6.200 migrants ont été renvoyés vers les côtes libyennes en 2020, et sont souvent détenus arbitrairement dans des centres de détention officiels ou clandestins, selon le rapport.

« Une action décisive et concertée doit être menée par les Etats de la région, avec le soutien de la communauté internationale, pour mettre fin à cette cruauté, protéger les victimes et juger les criminels », a déclaré le Haut Commissaire aux Réfugiés, Filippo Grandi, cité dans le rapport.

Aucun trafiquant visé par des sanctions de l’ONU n’a été arrêté depuis deux ans, et aucun nouveau nom n’a été inscrit sur la liste du comité des sanctions, a déploré M. Cochetel.

« Pourquoi ne suivons-nous pas les flux d’argent? Pourquoi ne poursuivons nous pas sérieusement ces gens? Nous sommes fatigués d’écrire rapports après rapports, d’entendre toujours les mêmes témoignages de victimes », a-t-il poursuivi, avant de conclure: « Les Etats aujourd’hui ne peuvent pas dire qu’ils ne savent pas ».

AFP

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