Le Président ALPHA CONDE a hérité d’un réseau routier dégradé à plus de 81% ; très peu de voiries urbaines étaient construites et la densité routière était en dessous de la moyenne sous régionale.
Face à cet état des lieux peu reluisant, il a fallu revoir la politique de développement des infrastructures pour asseoir des organes de gestion et de fonctionnement plus structurants et des réformes fortes pour lancer une nouvelle dynamique.
Une dynamique qui nous amènera à :
- Favoriser la compétitivité de l’économie avec la construction des routes d’intégration pour soutenir la croissance,
- Désenclaver une grande partie des agglomérations rurales,
- Maintenir en bon état au moins 60% du réseau routier national en priorisant les préfectures n’étant pas été desservies par les axes bitumés,
- Procéder au désenclavement interne et externe,
- Faciliter l’intégration régionale et sous régionale.
C’est ainsi qu’un accent a été sur les grands travaux de construction, de reconstruction et de réhabilitation, du réseau routier de notre pays en faisant des choix judicieux et utiles sur les tronçons.
Par exemple, les critères ont porté sur l’importance des routes dans l’économie nationale et sous régionale, leur degré de fréquentation, autrement dit le débit de la circulation et le degré de dégradation.
Plusieurs chantiers sont ouverts et l’ambition du Pr Alpha CONDE est de doter la Guinée d’infrastructures de qualité.
PLUS DE 520KM DE ROUTES EN RECONSTRUCTION ENTRE COYAH-DABOLA-KOUROUSSA EN PASSANT PAR KINDIA ET MAMOU ?
Moustapha NAÏTE : Le socle de la vision du Chef de l’État, le Pr. Alpha CONDÉ pour le secteur des infrastructures routières est clairement défini. Il s’agit, certes, de construire des routes pour faciliter la mobilité des populations mais aussi et surtout d’inscrire les projets routiers dans une logique de développement socioéconomique.
C’est dans cette vision globale que s’inscrit la reconstruction de la RN1 Coyah-Mamou-Dabola-Kouroussa sur 521 km. Qui se fait par des lots différents. Coyah-Mamou-Dabola (370km) et également les tronçons Dabola-Cissela (68km) et Cissela-Kouroussa (83km). Des travaux qui ont démarré depuis 2019.
Retenez fondamentalement que l’axe Conakry-Coyah-Kindia-Mamou-Dabola-Kouroussa, une fois les travaux achevés, va rejoindre la route Kankan-Siguiri-Kourémalé, c’est à dire la frontière du Mali. Vous savez, le Port naturel du Mali est le Port de Conakry. En dépit des longs trajets vers les Ports de Dakar et d’Abidjan, les transporteurs maliens s’évitent l’option plus courte vers Conakry. Pourquoi ? À cause du réseau routier ! Au-delà même des procédures ou frais portuaires, c’est l’état de notre réseau routier qui cause cette perte d’opportunités pour les échanges entre les deux pays. Qui voudrait faire circuler ses camions gros porteurs et conteneurs de marchandises sur des routes dégradées avec les risques d’accidents, de pannes, de perte de temps etc. ? Lorsque le Président de la République ayant été bien inspiré, enclenche une dynamique de modernisation et de développement du Port de Conakry qui va permettre d’accueillir des bateaux gros porteurs et donc d’accroitre le volume des échanges au bénéfice des opérateurs économiques nationaux et régionaux, il s’assure également de ce que les infrastructures routières de qualité accompagnent la dynamique.
C’est en cela que l’axe Conakry-Coyah-Kindia-Mamou-Dabola-Kouroussa-Kankan-Kourémalé (frontière du Mali) une fois les travaux terminés, permettra à la Guinée d’offrir sécurité et célérité dans le transport des marchandises vers le Mali voire le Burkina Faso.
Conakry absorbera bien plus que les 3% de sa part naturelle des échanges commerciaux avec le Mali.
SUR L’AXE COYAH-MAMOU-DABOLA (370KM), QUELS SONT LES DONNEES TECHNIQUES A RETENIR ?
Moustapha NAÏTE : Depuis la construction en 1992 de cette route, les dégradations occasionnées par l’augmentation du trafic, combinées à une insuffisance de l’entretien, ont accéléré la détérioration de la route qui ne répond plus aujourd’hui aux exigences géométriques et techniques des routes nationales. Le projet débute à Coyah, à 50 km au nord-est de Conakry et rejoint Dabola en passant par Kindia et Mamou. Il comprend une quarantaine de ponts, près de 400 ouvrages de franchissement de diverses tailles. Une analyse technique et des travaux d’ingénierie prenant en compte le relief et l’historique de la sécurité routière, nous a amené à appliquer des corrections sur le tracé faisant passer le linéaire total de 370 à 354,719 km. Le coût total du projet est de 357 302 942€ hors taxes dont 85 % issus du mécanisme de l’Accord-Cadre sino-guinéen et 15% du Budget National de Développement (BND).
ENTRE LE MINISTERE, LA MISSION DE CONTROLE EGIS ET L’ENTREPRISE CRBC ? QUI FAIT QUOI ? QUELS SONT LES AVANTAGES ET DIFFICULTES LIES A VOTRE COLLABORATION ?
Le contrat commercial en vue de la réalisation des travaux a été attribué à l’entreprise chinoise, China Road and Bridge Corporation (CRBC). L’Administration de Contrôle des Grands Projets (ACGP), structure rattachée à la Présidence de la République et Maitre d’œuvre Public a retenu le Bureau de Contrôle français EGIS INTERNATIONAL pour assurer la mission de contrôle et d’évaluation des travaux. C’est à ce dernier que revient la validation des études, des plans d’exécution et des travaux.
Avec la Direction Nationale des Routes Nationales qui suit le projet au quotidien, le Ministère reste le Maitre d’Ouvrage.
Comme c’est le cas pour quasiment tous les contrats ou projets routiers, cette collaboration contractuelle permet à la fois une exécution efficace et efficiente du contrat dans ses délais, le respect de la qualité des travaux, des normes contractuelles en somme. Jusqu’à ce jour, soit plus de 12 mois après le début des travaux, les difficultés sont quasiment inexistantes. Si elles existent, elles sont plutôt externes aux parties et concernent le plus souvent, le déplacement des populations, les aléas climatiques naturels et malheureusement les manifestations sociopolitiques comme il en existe énormément en Guinée.
LA FIN DES TRAVAUX SUR L’AXE COYAH-MAMOU-DABOLA EST PREVU POUR QUAND ? POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DU NOMBRE DE GUINEENS EMPLOYES DANS CE PROJET ?
Moustapha NAÏTE : Les travaux ont effectivement démarré début Mai 2019 pour une durée contractuelle de 33 mois donc une fin prévue pour Février 2022. De ce délai, nous devons déjà accepter un retard de plus de 8 mois suite notamment à la pandémie COVID 19 et à la longue saison des pluies diluviennes que connait chaque année notre pays. En effet, près de 1900 personnes sont employées en permanence sur ce chantier dont environ 400 chinois et 1440 guinéens. Cet effectif a été considérablement réduit depuis avril et jusqu’à présent et ce dans le cadre des mesures prises pour la lutte contre la propagation de la pandémie Covid-19. Nous avons entamé les discussions avec l’entreprise, l’ACGP et la Mission de Contrôle pour éventuellement trouver la solution pour rattraper ce qui est possible à rattraper.
QUEL EST L’IMPACT ATTENDU DE CES TRAVAUX SUR LE TRAFIC, LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE, ET AGRICOLE EN PARTICULIER ? LES ECHANGES AU NIVEAU NATIONAL ET OUEST-AFRICAIN ?
Moustapha NAÏTE : Cette route a été construite en 1992 et depuis le trafic a considérablement accru. Outre les véhicules légers, ce sont les véhicules poids lourds qui ont été mis en évidence dans la réalisation des études afin de projeter une durabilité plus accrue de l’ouvrage qui sera aux normes routières de la CEDEAO avec l’élargissement de la plate-forme et l’optimisation du tracé de certaines sections.
Le trafic escompté en poids lourds à l’horizon du projet, c’est-à-dire vers 2035, est estimé entre 1 190 000 et 2 290 000 de véhicules poids lourds. Les impacts sont multiples. La nouvelle route va favoriser la compétitivité de l’économie guinéenne car la RN1 est le cœur de l’ossature routière du pays ; soutenir la croissance avec les échanges commerciaux ; améliorer les conditions de vie des populations en réduisant considérablement les délais de voyages entre Conakry l’intérieur du pays ; procéder au désenclavement interne et externe et faciliter l’intégration régionale et sous régionale comme je l’ai présenté plus tôt pour le cas du Mali.
ACTUELLEMENT, LES USAGERS SE PLAIGNENT DES CONDITIONS DE CIRCULATION. QU’EN DITES-VOUS ?
Moustapha NAÏTE : Nous comprenons ces plaintes. Elles sont légitimes. Et elles s’accentuent surtout avec les pluies diluviennes qui s’abattent sur la Guinée chaque année entre Aout et Octobre et le pic des mécontentements, c’est la période des fêtes de la Tabaski où une grande majorité quitte Conakry pour l’intérieur du pays et donc prennent par une bonne partie de la RN1 de Coyah à Kankan en passant par Kindia, Mamou, Dabola etc.
Il faut savoir que conformément aux obligations contractuelles, l’entreprise CRBC a l’obligation d’entretenir et de maintenir le tracé objet du projet dans un état de praticabilité acceptable même durant les travaux et la saison des pluies. Mais en réalité, cet entretien permanent est difficile à assurer tout le temps. D’une part, vous avez l’afflux instantané du nombre de véhicules, de marchandises et d’usagers sur des tracés en cours et avec les pluies, la boue s’installe ; avec l’état très souvent défectueux des poids lourds qui vienne soit s’engluer dans la boue, soit tomber en panne ou carrément se renverser sur la route. Conséquence, vous vous retrouvez avec des km de bouchons sans compter l’incivisme et l’impatience des usagers. Je ne justifie pas les conditions déplorées mais j’essaie d’expliquer comment tout ceci se forme et on en arrive à passer des nuits entre par exemple Coyah et Mamou. Mais il faut noter qu’au fur et à mesure, les dispositions ont été toujours prises afin que la circulation et la praticabilité de la route soient optimum. Pour ma part, j’essaie de voir le verre à moitié plein. Les difficultés actuelles seront bientôt conjuguées au passé car l’ouvrage une fois fini, offrira le bonheur de circuler aux populations qui je l’espère, continueront d’accepter de subir les désagréments actuels en attendant la fin des travaux. Mais avec l’entreprise, le Ministère des Transports, la gendarmerie Nationale, les autorités des contrées traversées etc.., nous travaillons chaque jour pour minimiser les désagréments aux usagers. Ce n’est pas facile !
QUEL BILAN TIREZ-VOUS DES EFFORTS GOUVERNEMENTAUX EN MATIERE D’INFRASTRUCTURES ROUTIERES DEPUIS 2010 ?
Moustapha NAÏTE : En 2010/2011, le Président de la République a hérité d’un réseau routier dégradé à plus de 80% ; très peu de voiries urbaines étaient construites et nous avions une densité routière en dessous de la moyenne sous régionale. Connaitre ce taux de dégradation est important pour comprendre, apprécier à sa juste valeur ce qui a été fait et ce qui se fait depuis 2011.
Dans un premier temps, il a fallu revoir la politique de développement des infrastructures et asseoir des organes de gestion et de fonctionnement plus structurants et des réformes fortes pour lancer une nouvelle dynamique. Sous la conduite du Président de la République et des différents Premiers Ministres, les Ministres en charge des Travaux Publics ont pu redéfinir une stratégie globale de développement axée sur la réorganisation des structures, des maitres d’ouvrage, de la protection de nos infrastructures, de la gestion des ressources, des modes de financements etc.
Au regard de l’état du réseau routier, la priorité était de remettre en état ce qui était très important dans l’existant avant de se lancer dans de nouveaux projets. On ne peut pas abandonner l’existant dégradé et commencer de nouvelles constructions. Les ressources disponibles à l’époque ne permettaient pas non plus de faire les deux simultanément. Dans l’urgence, le Gouvernement a donc mis l’accent sur les grands travaux de réhabilitation et du réseau. Mais au regard du taux élevé de dégradation, il fallait faire des choix judicieux et utiles sur les tronçons à réhabiliter et ou à reconstruire. Par exemple, les critères ont porté sur le degré de dégradation, l’importance de la route dans l’économie nationale et sous régionale, le degré de fréquentation des routes, autrement dit le débit de la circulation.
Par exemple, des routes nationales y compris la RN1 en reconstruction actuellement, ont été réhabilitées pour maintenir la praticabilité durant entre 2011 et 2018.
Je voudrais encore une fois mettre l’accent sur ce que j’appelle « l’anomalie guinéenne » dont la réflexion doit s’imposer dans la critique et l’analyse de ce qui a été fait ou en cours sous le régime du Pr. Alpha Condé. Lorsque vous regardez par exemple les plus de 500 km de la RN1 en cours de reconstruction actuellement, l’on est en droit de se dire qu’en réalité, ces 500 km devraient être 500 km de nouvelles routes nationales construites ailleurs dans le pays par exemple l’axe Kindia-Télimélé-Gaoual qui fait environ 280 km et Kankan-Kérouané-Beyla qui fait 245 km. Pour illustrer mes propos, le guinéen prend souvent l’exemple du Sénégal ou de la Côte d’Ivoire et aime comparer les travaux routiers entrepris par les Présidents Macky Sall ou Ouattara à ce qui se fait chez nous en Guinée. Mais, nous ne nous demandons pas ce que ces dirigeants ont trouvé sur place en venant au pouvoir. Les fondamentaux routiers existaient et s’ils étaient abimés, ne l’étaient pas à plus de 80%. Si l’un avait hérité d’un réseau en bon état et a pu continuer aisément avec la construction de nouvelles autoroutes, c’est parce qu’il n’avait pas besoin de réhabiliter ou reconstruire les axes principaux avec les ressources disponibles ; l’autre pouvait construire de nouveaux ponts à péage à Abidjan parce que l’existant le permettait.
À ce jour, en cours, c’est plus de 800 km de routes nationales en construction. En complément du projet Coyah-Mamou-Dabola sur lequel nous échangeons, j’ai rappelé tantôt Dabola-Cissela et Cissela-Kouroussa. Sur la RN4, nous avons Coyah-Kouleté (35km) et Koulété-Farmoreah frontière avec la Sierra Léone (40 km) sur financement de la Banque Africaine de Développement et de l’Union Européenne. Sur la RN7, Kankan-Mandiana-Fleuve Sankarani (83KM) dont le financement est assuré en partie par le Budget National de Développement. Sur la RN2, Guéckedou-Kondembadou (35KM) et Kissidougou PK63-Guéckédou (18KM) sur financement de la Banque Islamique de Développement, du Fonds Koweitien et de la BADEA ; la suite du bitumage de Lola-Danané avec la BID et nous sommes en pleine procédure d’appel d’offre sur financement BAD et UE pour Boké-Dabiss (45km) qui est la phase 1 de Boké-Québo frontière Guinée Bissau long de 86km avec deux grands ouvrages de franchissement et des projets socioéconomiques annexes dont des marchés. Également, depuis 2011, de nombreux ouvrages de franchissement ont été construits comme le Pont Kaaka.
Au titre des voiries urbaines, quasiment toutes les capitales régionales bénéficient de construction ou de réhabilitation d’une partie de leurs voiries urbaines. Il faut préciser que certains projets ont été déjà réalisés depuis 2011 et d’autres encore en cours actuellement.
Par ailleurs, un accent particulier a été mis sur la Capitale Conakry avec la réhabilitation non seulement de la voirie sur plus de 200 km mais aussi la construction de nouvelles voies d’environ 88 km depuis 2011. De nouveaux travaux seront bientôt lancés dans Conakry tant sur de nouvelles routes que sur des échangeurs par exemple à KM36 et Kagbelen dont les financements sont bouclés.
En dépit de tous ces efforts considérables consentis, l’état global du réseau routier national reste néanmoins peu reluisant. C’est un euphémisme que de le dire. Ce qui prouve toute l’envergure de ce qu’il y a à faire pour que l’on n’imagine que tout cela est possible en 10 ans.
Ce qui est également extrêmement important à faire savoir, c’est le cycle de réalisation d’un projet routier. Il est assez long et chronophage. Entre la conception du projet, la recherche de financement, les procédures d’appel d’offre et de lancement des travaux, ce sont des mois voire des années qui s’écoulent. Le citoyen n’est content et ne reconnait le mérite de ce qui est fait que lorsqu’il voit le bitume sur lequel sa voiture roule. Ce n’est que la dernière étape de la chaine de réalisation. Lors des missions de suivi travaux que j’effectue moi-même, nous demandons de la patience à nos concitoyens. Une fois tous ces travaux réalisés, ce sont des infrastructures de qualité qui seront livrés. Et ce sera un pas de plus vers le développement de notre pays.