Censure

Détention d’Ousmane Gaoual et Cie : Les avocats craignent «l’instrumentalisation à outrance de la Justice à des fins politiques»

Le collectif des avocats de l’UFDG et de l’ANAD ont animé une conférence de presse, ce jeudi 19 novembre, à Conakry. L’objectif était de dénoncer les « violences de procédures lors de l’interpellation et de mise en détention de leurs clients, Ousmane Gaoual Diallo, Cellou Baldé,  Étienne Soropogui et Abdoulaye Bah ». 

« De la même manière, les enquêteurs ont foulé aux pieds les dispositions de l’article 1257 du Code de procédure pénale relatives au droit à l’information de la personne mise en cause. En outre, les règles relatives à la garde à vue n’ont pas été observées. En plus de la violation manifeste de leur droit à la présomption d’innocence, cet acte qui rappelle un passé sombre était destiné à humilier et à saper le moral des intéressés. Il traduit aussi la haine et le zèle de certains enquêteurs à leur endroit », a lu dans la déclaration, Me Modibo Camara, un des avocats. 

Selon lui, « plus grave, la police judiciaire, avant de présenter les mis en cause au magistrat instructeur, les a photographiés individuellement en les obligeant à tenir une ardoise sur laquelle on pouvait lire le nom de l’intéressé et la mention ‘‘complot’’ ».

Malgré les violences des procédures, « le collectif des avocats de la défense entend œuvrer à la manifestation de la vérité en usant de tous les moyens légaux. Il craint tout simplement l’instrumentalisation à outrance de la Justice à des fins politiques », a poursuivi, Me Modiba Camara. Lire ci-dessous l’intégralité de la déclaration.

Communiqué de presse des Avocats de

la defense de ousmane gaoual diallo, etienne soropogui, ibrahima cherif bah, abdoulaye bah et mamadou cellou balde

Par une commission rogatoire en date du 14 Octobre 2020, le doyen des Juges d’instruction du Tribunal de première instance de Dixinn a saisi la Direction Centrale de la Police Judiciaire à l’effet de procéder à un certain nombre d’actes d’instruction, notamment de rechercher, interpeller les personnes soupçonnées d’avoir participé de près ou de loin à la commission des infractions prévues aux articles 846 et suivants, 282 et suivants, 784 et suivants du code pénal, de procéder à toutes visites domiciliaires, perquisitions et saisies nécessaires à la détermination des circonstances de commission desdites infractions dans les quartiers et alentours de Kakimbo, Wanidara, Cimenterie fofomèrè et lambagni canadien, de dresser l’inventaire de tous objets saisis.

Ensuite, le mardi 10 novembre 2020, le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Dixinn, se fondant sur les dispositions de l’article 8 du Code de procédure pénale, a fait une déclaration en affirmant entre autres que : «L’officier enquêteur poursuit, dans le strict respect des règles de procédure, l’exécution de la commission rogatoire en recherchant, activement, certaines personnes, dont Ousmane Gaoual Diallo, Mamadou Cellou Baldé, Chérif Bah, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui, Sékou Koundouno, qui ont proféré des menaces de nature à troubler la sécurité et l’ordre publics.» 

Le mercredi 11 novembre 2020, Monsieur Ibrahima Cherif BAH, Vice-Président chargé des relations extérieures de l’UFDG, a été enlevé à son domicilie et conduit dans les locaux de la Direction Centrale de la Police Judiciaire.

Pour éviter d’exposer Ousmane Gaoual DIALLO, Etienne Soropogui, Mamadou Cellou BALDE et Abdoulaye BAH aux brutalités auxquelles se livrent habituellement les forces de sécurité lors des interpellations de citoyens, le collectif des Avocats de la défense a demandé et obtenu de la Direction Centrale de la Police Judiciaire l’établissement de convocations en bonne et due forme à charge pour lui de présenter les personnes concernées. C’est ainsi que, le Jeudi 12 novembre 2020, Abdoulaye Bah, Etienne Soropogui et Ousmane Gaoual DIALLO se sont présentés à la Direction Centrale de la Police Judiciaire en compagnie de leurs Avocats. Il en a été de même pour Mamadou Cellou BALDE le vendredi 13 novembre 2020.

Curieusement, à la Direction Centrale de la Police Judiciaire, ils ont été entendus sur des faits qui n’étaient visés ni par la commission rogatoire, ni par les convocations qui leur ont été adressées. Les questions des enquêteurs ont porté essentiellement sur des propos qu’ils auraient tenus avant, pendant et après le scrutin du 18 octobre 2020.

Au cours de l’enquête de police, il n’a été à aucun moment question des infractions de fabrication, acquisition, stockage, détention, usage d’armes légères, de guerre, de détention de munitions, de menaces et d’association de malfaiteurs. D’ailleurs, aucune arme, aucune munition n’ont été présentées aux intéressés. De même, il n’a été fait mention d’aucune perquisition, visite domiciliaire ou saisie relative à ces infractions.

Le lundi 16 Novembre 2020, Ousmane Gaoual DIALLO, Etienne Soropogui, Mamadou Cellou BALDE et Abdoulaye BAH ont été conduits devant le Doyen des Juges d’instruction qui, après les avoir inculpés des infractions de fabrication, acquisition, stockage, détention, usage d’armes légères, de guerre, de détention de munition, les a placés en détention provisoire. Il est important de rappeler que Ibrahima Cherif BAH été, quant à lui, placé sous mandat de dépôt le 13 Novembre 2020 pour les mêmes infractions.

Au regard des dispositions du code de procédure pénale, le Collectif des Avocats de la défense relève plusieurs irrégularités portant atteinte aux droits fondamentaux des personnes poursuivies.

En effet, dans sa déclaration radiotélévisée, le Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Dixinn a soutenu qu’Ousmane Gaoual DIALLO, Etienne SOROPOGUI, Mamadou Cellou BALDE et Abdoulaye BAH « sont activement recherchés ». Or, ce sont des personnes dont les domiciles sont connus et qui n’avaient reçu aucune convocation. Cette déclaration du chef du parquet de Dixinn, n’avait d’autre but que de les diaboliser et de justifier éventuellement leur arrestation violente.

Par ailleurs, les convocations qui leur ont été adressées n’indiquaient pas les motifs pour lesquels ils sont actuellement poursuivis, ce en violation des dispositions de l’article 82 du Code de procédure pénale.

De la même manière, les enquêteurs ont foulé aux pieds les dispositions de l’article 1257 du Code de procédure pénale relatives au droit à l’information de la personne mise en cause.

En outre, les règles relatives à la garde à vue n’ont pas été observées.

Plus grave, la police judiciaire, avant de présenter les mis en cause au magistrat instructeur, les a photographiés individuellement en les obligeant à tenir une ardoise sur laquelle on pouvait lire le nom de l’intéressé et la mention « complot ».

En plus de la violation manifeste de leur droit à la présomption d’innocence, cet acte qui rappelle un passé sombre était destiné à humilier et à saper le moral des intéressés. Il traduit aussi la haine et le zèle de certains enquêteurs à leur endroit.

En réalité, cette procédure, qui ne repose sur aucun élément tangible, vise tout simplement à détourner l’attention de l’opinion nationale et internationale sur les graves crimes commis sur des citoyens après le scrutin du 18 octobre 2020, à affaiblir, voire anéantir l’opposition politique en intimidant ses leaders et en entravant leurs activités sur le terrain.

En tout état de cause, le collectif des avocats de la défense entend œuvrer à la manifestation de la vérité en usant de tous les moyens légaux. Il craint tout simplement l’instrumentalisation à outrance de la Justice à des fins politiques.

Certains faits troublants semblent malheureusement donner raison au collectif des Avocats : le réquisitoire introductif d’instance du procureur de la République et la commission rogatoire du Magistrat instructeur ont été établis le même jour, soit le 14 Octobre 2020, et bien avant l’élection présidentielle du 18 Octobre 2020. Ce qui laisse apparaitre une volonté évidente de procéder à des arrestations sans aucune infraction. En d’autres termes, ces agissements ne sont ni plus, ni moins qu’une démarche qui consiste à interpeller d’abord et inventer les infractions par la suite.

Le collectif déplore cette situation !

Le Collectif entend également œuvrer pour le rétablissement de l’Etat de Droit et au respect des droits fondamentaux des citoyens.

Fait à Conakry le 19 Novembre 2020.

Le Collectif des Avocats de la défense

Bhoye Barry pour guinee7.com

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