Dans un entretien accordé à un grand hebdomadaire d’informations, le Président français a porté des jugements sur un certain nombre de pays africains dont la Guinée. Concernant celle-ci, le Président français dit notamment qu’il a «eu plusieurs fois des discussions avec le Président Alpha Condé, des discussions très franches… ». Tant mieux dirons-nous que ces révélations soient faites par le Président Macron lui-même, car elles sont la preuve de la grande constance du Président guinéen sur la souveraineté de son pays, par ricochet sur les intérêts de celui-ci, et de son courage pour défendre ces droits devant n’importe quelle instance. En effet, en langage diplomatique, «des discussions très franches» signifient des discussions ardues, tendues où chacun campe sur sa position. Il ne s’agit donc pas de discussions cordiales où l’entente est parfaite. Imaginez que ce fut le Président guinéen qui eut rapporté ces entretiens avec le Président français : certains auraient dit que le Président guinéen fanfaronne, car il n’oserait pas tenir tête au Président français pendant «plusieurs discussions». Et pourtant le Président Alpha Condé a bien défendu, de façon intransigeante, avec le respect de l’interlocuteur qui le caractérise, la souveraineté de son pays en affirmant et réaffirmant, comme il l’a toujours dit en public, que c’est le peuple guinéen qui décidera de son sort à lui peuple de Guinée. Rien que pour cela, la Guinée est fière de son Président qui défend bec et ongles la souveraineté et les intérêts de son pays, cela commençant par l’application de l’acception «Démocratie», à savoir la souveraineté au peuple. Sous cet angle, «l’alternance ne se décrète pas» comme le disait Abdou Diouf, l’ancien Président du Sénégal, l’alternance s’acquiert auprès du peuple en respectant sa souveraineté. On comprend mieux l’adhésion du peuple guinéen au Président Condé avec qui il est sûr que sa souveraineté et ses intérêts sont défendus, contrairement à d’autres portés à la compromission sur ces attributs de notre peuple pour leurs intérêts crypto personnels. De ce fait, notre analyse peut s’arrêter là tant la probité, le sens élevé de l’intérêt supérieur de la Nation, le don de soi du Président Condé pour le développement harmonieux de son pays au profit de tous ses concitoyens, viennent d’être brillamment mis en lumière, même si ce n’était pas l’objectif visé par son interlocuteur qui n’aurait hésité un seul instant, comme il l’a fait pour les acteurs politiques libanais (voir ci-dessous), de souligner un quelconque écart entre ce que le Président Condé lui avait dit et ce qu’il aurait fait. On ne résiste cependant pas à constater que la Guinée n’est pas la seule à faire l’objet de mauvaises appréciations (d’autres parleraient d’ambitions démesurées) de la voix de la France, ce qui n’a pas empêché les pays concernés d’évoluer vers leur destin. Il en est ainsi du Liban par exemple.
La voix de la France voulant régenter le Liban : grosse déconvenue !
Dans la crise endémique qui secoue le Liban, et à la faveur d’un tragique accident résultant d’une explosion au Port de Beyrouth au mois d’août passé, le Président Macron avait mené dans ce pays des actions d’envergure pour amener la classe politique libanaise à former un cabinet de Ministres «compétents» et «indépendants», mais bien plus tard, c’est le Président Macron lui-même qui a dénoncé «la trahison» de cette classe politique au lendemain de l’échec de la mise en place d’un tel gouvernement. Les partisans d’une grande formation libanaise avaient alors reproché au Président Macron «d’avoir abandonné son rôle d’arbitre qui se tient à égale distance de tous les acteurs politiques libanais» et des déchainements de colère sont apparus avec le Hashtag «Macronrespectezvoslimites». Cet échec ne résulte-t-il pas de mauvaises appréciations de la situation ou alors de perception de parti pris par la France ! Le parallèle avec la Guinée, dans la méthodologie d’intervention de la France dans les affaires intérieures d’un pays francophone issu de sa sphère coloniale, confortent le peuple de Guinée dans sa sérénité à affirmer sa souveraineté autour de son Président Alpha Condé. On pourrait parler aussi du parrainage de l’un des protagonistes de la crise libyenne par le Président français, mais la réalité du terrain libyen a été à l’encontre de ce protagoniste chaperonné par la France, et lorsque celle-ci a demandé une trêve sans conditions, le camp de l’autre protagoniste a accusé la France de faire «un double-jeu». N’est-ce pas là encore le résultat de mauvaises appréciations de la situation d’un pays sur fond de parti pris amenant à cette accusation de «double-jeu» ! On peut encore ajouter cette autre mauvaise appréciation de la situation spirituelle de nombreux pays musulmans s’étant considérés visés par un discours du Président français, qui a le droit d’affirmer les valeurs de son pays, mais qui l’a fait dans des propos équivoques amenant à interprétation d’offenses suprêmes, d’où les réactions en chaine d’hostilités envers la France avec velléités de boycott de produits français, d’où les tentatives de rattrapage du Président français sur ses propos en les clarifiant, mais en même temps en s’attaquant à la presse anglo-saxonne accusée de «légitimer» la violence, par leur traitement de la lutte contre l’islamisme radical en France ! Au total, la France par ses mauvaises appréciations, demeure chaque fois en décalage des réalités des pays dans lesquels elle tente de s’immiscer dans leurs affaires intérieures, comme en Guinée, et de façon légitime, ces pays réagissent comme en Guinée. Le cas le plus patent de ces mauvaises appréciations de situation d’un pays, confinant à du parti pris flagrant, comme l’ont souligné par exemple ces acteurs politiques libanais, reprochant à la France «d’avoir abandonné son rôle d’arbitre qui se tient à égale distance de tous les acteurs politiques…», c’est lorsque la France dit «ne pas mettre le cas de la Guinée et celui de la Côte d’Ivoire dans la même catégorie».
Guinée et Côte d’Ivoire pas dans la même catégorie, dixit la France : qu’en est-il ?
Précisons qu’on ne parle pas de la Côte d’Ivoire pour se mesurer à celle-ci, mais juste du fait de sa fonction de paramètre d’analyse que lui a conférée la France elle-même par rapport à la Guinée. Pour rappel, le Ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères de la France, lors d’une audition en janvier 2020 devant la Commission des Affaires Etrangères à l’Assemblée Nationale française, a déclaré notamment sur la Guinée, que «C’est la situation la plus sensible aujourd’hui et l’engagement du Président Alpha Condé à demander une réforme de la Constitution ne nous parait pas être obligatoirement partagé ni par sa population ni par ses voisins». Le même Ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères de la France, auditionné en octobre 2020 par la même Commission des Affaires Etrangères sur la Côte d’Ivoire (avant la Présidentielle) déclare : «Nous sommes très vigilants sur la manière dont vont se passer les élections. Il y a un processus démocratique, je ne suis pas chargé d’apprécier la nouvelle Constitution. Ce serait de l’ingérence. Le Président Ouattara a souhaité se représenter, c’est son libre choix». Edifiant ! D’un côté, c’est-à-dire la Côte d’Ivoire, le Ministre n’est pas chargé d’apprécier la nouvelle Constitution, car ce serait de l’ingérence. Le Président Ouattara se représentant, c’est son libre choix, il y a un processus démocratique. D’un autre côté, c’est-à-dire la Guinée, le Ministre n’hésite pas à faire de l’ingérence, le Ministre critique la nouvelle Constitution à venir, le Président Condé n’est pas libre de se représenter ! Le français Napoléon Bonaparte disait que «un bon croquis vaut mieux qu’un long discours», c’est-à-dire qu’un petit croquis en dit plus long qu’un grand discours. De ce fait, il n’est guère plus besoin d’en rallonger sur ce point d’analyse concernant «la Guinée et la Côte d’Ivoire pas dans la même catégorie», ce petit schéma permettant à chacun d’être édifié sur les critères d’appréciation de la France à géométrie variable !
Changement de Constitution uniquement pour garder le Pouvoir !
C’est une des critiques phares du Président Macron à l’encontre du Président Condé, puisque le Président français reconnait qu’il n’y avait pas de limitation de mandat en France jusqu’à la révision constitutionnelle de 2008 sous le Président Sarkozy, stipulant que «nul ne peut exercer plus de deux mandats consécutifs». Cela signifie donc que la non limitation de mandat n’est pas un critère empêchant la démocratie de s’exercer, notamment l’alternance. On s’aperçoit en même temps, à partir de ce cas d’école, que le changement ou la révision de Constitution notamment sur le point du mandat présidentiel, ne signifie ni ne garantit que le Président concerné pourra garder le Pouvoir. Pour preuve, le Président Sarkozy qui a initié la révision constitutionnelle de 2008 sur le mandat présidentiel, s’est représenté et n’a pas pu bénéficier d’un nouveau mandat car le peuple de France en a décidé autrement. Pour ce qui est de la Guinée, c’est ce même processus démocratique du pouvoir au peuple qui a été appliqué avec un référendum où le peuple s’est largement prononcé pour une nouvelle Constitution à la place de l’ancienne Constitution de consensus mise en place par une centaine de personnes non élues, donc non représentatives du peuple, et qu’il avait été convenu de changer avec l’avènement de la vie démocratique normale. Ce processus démocratique a abouti à la présidentielle du 18 octobre 2020 où le peuple, par la dévolution du Pouvoir qui lui appartient, a confortablement donné ses suffrages au Président Condé. Quelle est donc la critique objective qui peut résister à ce processus démocratique en Guinée ! Mais parlons-en de ce type de changement sur lequel le Président français a affirmé qu’ «il n’y a pas eu en France de changement des règles du jeu en cours de route pour se maintenir au Pouvoir» !
Elections européennes de mai 2019 : changement des règles du jeu en cours de route par l’Exécutif français !
Le scrutin des Européennes en France était basé sur des circonscriptions et le Président Macron a procédé à une réforme visant à baser ces élections sur des listes nationales. Les observateurs ont trouvé que «ce n’est pas une réforme technique, c’est très politique». En effet, un scrutin basé sur des circonscriptions demande un ancrage local, ce qui est peu adapté aux jeunes partis dont l’ancrage territorial est encore en construction, comme le parti «La République en marche» du Président français, qui avait plus à gagner avec un scrutin proportionnel sur listes nationales. N’est-ce pas là un changement des règles du jeu en cours de route, car c’était quasiment la mi-mandat pour le Président, pour se maintenir au Pouvoir à l’échéance présidentielle de 2022 ou alors échapper à la nécessité de dissoudre l’Assemblée Nationale en risquant de la perdre ! En effet, si les Européennes s’étaient mal passées pour le parti présidentiel avec les anciennes règles du jeu, nul doute que cela allait précipiter la désaffection du peuple à son égard avec des incidences négatives sur la conservation du Pouvoir aux probables (Législatives anticipées) et certaine (Présidentielle 2022) échéances électorales.
Municipales de mars 2020 : changement des règles du jeu en cours de route par l’Exécutif français !
Pour mieux comprendre cette partie de l’analyse, il faut savoir qu’il y a en France ce que l’on appelle le «nuançage», qui consiste à attribuer, à la discrétion des Préfets, suivant le seuil de population de la localité concernée, une couleur politique aux candidats ayant déposé une liste sans étiquette, par exemple étiquette «centriste», «divers gauche», etc. Le seuil de population était fixé à moins de mille (1000) habitants, d’où c’est le seuil de population en-deçà duquel les Préfectures n’attribuent pas de nuance politique à une liste déposée sans étiquette, ce seuil de 1000 étant valable depuis les Municipales de 2008. En d’autres termes, si une liste sans étiquette remporte par exemple 60% des suffrages dans une commune de moins de mille habitants, on ne comptabilisera pas cette liste gagnante comme une liste de droite ou de gauche par exemple (on se limite à ces 2 courants politiques), d’où on ne saura pas si dans cette localité c’est la droite ou la gauche qui a gagné. C’est dans ce contexte que l’Exécutif français a changé les règles du jeu en décembre 2019, en vue des Municipales de mars 2020, en relevant le seuil de «nuançage» de mille (1000) à neuf mille (9000) habitants, d’où toute liste sans étiquette dans une commune de moins de 9000 habitants ne sera pas comptabilisée, en termes de résultats électoraux, dans l’obédience politique droite ou gauche par exemple (on se limite à ces 2 courants politiques). C’est ce relèvement de seuil qui a provoqué une levée de boucliers de l’opposition qui dénonce «une manipulation des règles à l’avantage du Gouvernement». L’opposition accuse ainsi l’Exécutif «de vouloir, par cette manœuvre, atténuer la perception d’un possible piètre résultat pour La République en Marche». L’opposition enfonce le clou en disant notamment «Nous ne pouvons accepter, que par machiavélisme électoral, M. Castaner (le Ministre de l’Intérieur d’alors) rende invisible l’expression politique de 96% des Communes représentant 50% de la population française». Le manque d’ancrage territorial pour le parti présidentiel transparait à nouveau dans les motivations de l’Exécutif ayant entrainé les critiques de l’opposition dans ces élections municipales qui sont des élections de proximité. En définitive, avec une telle pratique décriée, on aboutit à la même conclusion que dans le chapitre des «Européennes» ci-dessus, c’est-à-dire un changement des règles du jeu en cours de route pour se maintenir au Pouvoir, en atténuant la défaite municipale pour éviter la désaffection porteuse de défaite présidentielle. Le Président Macron peut-il alors valablement accuser le Président Condé de changer les règles du jeu en cours de route pour se maintenir au Pouvoir ! Cet argument tombe de lui-même, mais avec l’intelligence qui caractérise le Président Macron et il faut le lui reconnaitre, sans doute qu’il finira par aller vers une évolution beaucoup plus en phase avec la réalité de la mobilisation du peuple de Guinée derrière son Président qu’il vient de conforter par une élection d’adhésion.
Des signes d’assouplissement ?
On peut entrevoir un tel bruissement de lecture, encore qu’il y a loin entre une apparence et une évidence, si on en juge par ce qui peut ressembler à des inflexions de la part du Président français, du genre «La France n’a pas à donner de leçons…Après ce n’est pas à moi de dire la Constitution doit prévoir x ou y mandat…C’est pour ça que je ne lui ai pas encore adressé de lettre de félicitations» (c’est nous qui soulignons en gras). Notre réaction citoyenne plaide pour que se consolident les bonnes relations entre les peuples français et guinéen, cela passant donc par la prééminence de ces peuples se traduisant notamment par le respect de leur choix. Dans ce cadre, le peuple de Guinée se félicite de la règle de conduite inhérente à son Président Alpha Condé dans le respect mutuel de peuples en coopération ainsi que de son constant esprit d’ouverture et de rassemblement envers toutes les citoyennes et tous les citoyens de notre pays, imbus de l’intérêt supérieur de notre Nation, pour amplifier ensemble les actions de développement au bénéfice de toutes les Guinéennes et tous les Guinéens sans exclusive.