La signature de l’accord-cadre entre le consortium Winning Consortium Simandou (WCS) et le géant minier Rio Tinto, le 25 mars 2022, a certes entrouvert des perspectives pour le développement de l’immense réserve de fer du Simandou, mais elle a également posé le problème de la faisabilité d’un projet que chacune des entreprises voulait, à priori, réaliser séparément.
WCS, qui est arrivée le dernier sur le site, après avoir remporté l’appel d’offre international en 2019, devant le géant Fortescue, a démarré de grands chantiers pour notamment creuser des tunnels nécessaires au « Transguinéen » (ligne de chemin de fer de 670km entre Kérouané et Forécariah) et débuter la construction du port en eau profonde du côté de Moribariyah (Forécariah).
C’est en plein travaux que les règles du jeu ont changé, obligeant le consortium, seul promoteur actif dans l’aménagement des infrastructures, à arrêter les chantiers sur injonction de la junte militaire guinéenne, avant de les redémarrer quelques jours plus tard, suite à l’accord-cadre.
De son côté, le groupe Rio Tinto-Simfer, présent en Guinée depuis au moins 25 ans, avait « abandonné » le projet en 2016, sous le Chief Executive Officer (CEO), Jean-Jacques Sébastien, en plein conflit entre l’Etat et la compagnie israélienne Beny Steinmetz General Resources (BSGR), suite au retrait du Simandou nord (blocs 1 et 2) sur des accusations de corruption, quand le géant minier était quasiment tout seul dans la zone, plus précisément au sud du Simandou (blocs 3 et 4).
Rio Tinto n’est revenu qu’en 2021, soit deux années après l’octroi du Simandou nord à un « concurrent sérieux » qui avançait sur fonds propres, avec l’appui d’investisseurs essentiellement chinois.
Entretemps, Sébastien a été remplacé par Jakob Stausholm, l’ancien responsable des finances du groupe anglo-australien, qui a aussitôt confié les rênes du projet au Mongol, Bold Baatar (CEO Cooper et Simandou).
Cette valse des décisions a fait un moment douter de l’engagement du géant minier dans le cadre du développement de sa concession minière du côté de Beyla, et le fait qu’aucune ligne budgétaire substantielle ne soit consacrée au projet, dans ses prévisions de 2022, avait rendu certains experts encore plus dubitatifs.
Côté WCS, le ralentissement du projet, environ sept mois après le coup d’état qui a renversé le régime d’Alpha Condé, a sans doute donné à réfléchir à ses responsables.
Il ne serait d’ailleurs pas étonnant que les investissements avancent désormais prudemment, en attendant de voir beaucoup plus clair par rapport à la suite.
Quoiqu’il en soit, le signal brouillé, lancé en direction des deux entreprises, et plus généralement à l’ensemble des promoteurs miniers, qu’ils soient en phase de recherche ou d’exploitation, laisse clairement deviner que la plupart d’entre eux attendent des gages irréversibles par rapport à la préservation de leurs intérêts inclus dans leurs conventions.
Côté Etat, il est compréhensible que l’on veuille conforter sa position dans le but évident de garantir des emplois décents pour les Guinéens et générer plus de ressources permettant de financer les projets de développement dans le pays.
Reste à savoir si WCS et Rio Tinto pourront finaliser leurs « négociations discrètes » (voir WESTAF MINING édition numéro 30 du 30 Avril 2022) pour clarifier les points de désaccords qui font que les deux compagnies ont des visions si différentes du mégaprojet Simandou. A pile ou face ?
Avec Westaf Mining