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Censure

Quand les clans dictent leur loi et angoissent à Conakry et sa banlieue

L’insécurité gagne du terrain dans la capitale Conakry, allant des attaques contre les citoyens à la terreur semée par les clans dans certains quartiers de la haute banlieue, réputés sensibles. Les citoyens, inquiets, ne savent plus à quels saints se vouer face à un phénomène qui ne cesse de croître.

Un reportage réalisé par Guinee7.com et Ndimba Radio a permis de recueillir le ressenti des habitants de Demoudoula, un quartier de la banlieue de Conakry, et de Tobolon, situé à la sortie de la capitale guinéenne.

Dans ces deux quartiers, des troubles sont enregistrés quotidiennement. Des confrontations entre clans ou des attaques perpétrées par des individus, parfois mineurs, conduisent souvent à des pertes en vies humaines.

Nos interlocuteurs, craignant pour leur sécurité, n’osent pas témoigner à visage découvert.

Aujourd’hui, ce sont des enfants de moins de 15 ans qui règnent en maîtres la nuit

Hassimiou, habitant de Demoudoula, un quartier de Conakry réputé pour son insécurité, a décrit leur calvaire : « Je me souviens qu’avant, les gangs et clans dans la zone étaient composés de grands gaillards ayant abandonné les études et sans emploi, cherchant protection et suprématie. La violence se manifestait souvent lors des tournois de football et des soirées en boîte de nuit. Aujourd’hui, ce sont des enfants de moins de 15 ans qui règnent en maîtres la nuit. Ils attaquent tout ce qui bouge. Certaines zones, comme Bantounka 1 et Cosa, sont devenues inaccessibles à 2h ou 3h du matin. Ils te voient, te font arrêter et te dépouillent de tous tes biens. Si tu ne fais pas attention, ils te bastonnent. »

L’État trouve un certain avantage dans cette délinquance

Selon lui, la démission des parents et les positions politiques sont, entre autres, les raisons de la formation de ces gangs. « Je peux dire que, d’un côté, c’est politique. L’État trouve un certain avantage dans cette délinquance, car plus un jeune tombe dans la violence et la drogue, moins il est capable de réfléchir ou d’avoir des projets pour changer les choses. Les politiques les utilisent avec de petites sommes pour manifester ou accomplir des tâches malhonnêtes. Du côté des familles, un homme marié avec deux femmes et jusqu’à six enfants dans un appartement de deux chambres ne peut pas bien gérer ses enfants. Pour leurs besoins intimes, les parents demandent aux enfants de sortir, ce qui les pousse à passer la nuit ailleurs. Ces enfants dorment souvent dans des salons sans aucun contrôle, et dès minuit, ils peuvent sortir attaquer des gens, prendre leurs téléphones, leur argent ou leur moto, et revendre ces biens », a-t-il soutenu.

La pauvreté joue aussi un rôle important

Hassimiou regrette également que les parents aient du mal à prendre leurs responsabilités : « Ces mêmes parents voient des objets de valeur avec leurs enfants et ne questionnent pas leur provenance. C’est une question de complicité. La pauvreté joue aussi un rôle important. »

Ma femme devait prendre des chemins détournés

Paisible en apparence, mais devenu le nid d’un clan appelé « 250 éléments », le quartier Tobolon a connu des journées noires, comme le confie un cadre de l’administration qui y vit depuis deux ans avec sa famille. « Même ma femme, qui travaille à Kagbelen, avait des difficultés à y aller. Elle devait prendre des chemins détournés. Il y avait deux clans opposés à propos d’un terrain, d’autres disaient que c’était une querelle entre les Peuls et les Soussous. Il y a eu des morts. Nous avons vécu des jours difficiles. Les parents ont manqué à leurs devoirs, poussant les enfants à agir ainsi. En deux ans, c’était la première fois que nous assistions à des cas d’insécurité. »

c’était entre voisins

Sa nièce, que nous appellerons Tewa, revient sur la mauvaise tournure que pourraient prendre les événements si cela se passe entre communautés. « Les membres des gangs étaient partis car les forces de l’ordre avaient procédé à des arrestations. Mais c’était entre voisins. Nous ne pouvions pas sortir, ils avaient des pierres. Ce n’était vraiment pas beau à voir. Normalement, les habitants du quartier doivent ensemble combattre les menaces externes. Si c’est entre eux, ce n’est pas beau à voir », a-t-elle regretté.

‘250 éléments’ est maintenant présent partout à Conakry

À quelques pas de sa maison, Mohamed Fall explique que le clan cité haut s’est étendu à d’autres endroits. « J’ai entendu parler du groupe nommé ‘250 éléments’ qui sème la terreur. Même avant-hier, il y a eu un cas à Dubreka. Nous apprenons que ce groupe est maintenant présent partout », a-t-il informé.

En fin, « nous avons peur et sommes inquiets. Je demande aux autorités de jouer leur rôle. Dans les normes, c’est leur responsabilité de garantir la sécurité et la protection civile », a-t-il précisé.

Toutes nos tentatives pour obtenir des déclarations des autorités locales sont restées vaines. En attendant de trouver une solution à ce phénomène d’insécurité grandissante, les habitants de ces zones vivent dans la peur, ne sachant plus à quel sauveur se vouer.

Abdou Lory Sylla pour guinee7.com

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