Aboubacar Camara, ministre de l’Energie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures et Elhadj Gandho Barry, directeur général de la société Électricité de Guinée (EDG) étaient face à la presse, jeudi 17 octobre. L’objectif de la rencontre qui s’est déroulée dans un réceptif hôtelier de Conakry, était l’ouverture d’une collaboration entre les deux entités.
Les deux cadres ont également apporté des précisions sur les problèmes qui assaillent le secteur de l’électricité et les solutions préconisées.
Au compte des problèmes, le ministre a fait savoir : «depuis longtemps dans notre pays la vérité elle est là. On essaye de monayer les devoirs des gens à travers le consensus. L’électricité a un coût. Les gens de l’intérieur n’en n’ont pas. Tu achètes un truc à 10 mille et tu vas revendre à 850 francs? Comment tu peux investir ? Tu ne peux pas. Les lignes de transport qu’on a aujourd’hui de l’extérieur, c’est des projets intégrés sous-régionaux. La ligne de l’OMVS, la ligne de l’OMVG, …
On n’a pas de ligne de transport interne. Il n’y a pas de courant à Faranah, il y a un groupe thermique. À Gueckedou, Macenta et Kissidougou aussi. Même Boffa qui est à côté. Les gens de ces préfectures se plaignent qu’ils ont le courant que six heures par jour. Mais comment se fait-il que vous preniez le courant vous vendez le courant au Sénégal, à la Gambie? On n’a pas de ligne de transport. Il y a la ligne qui transporte le courant de Mamou à Faranah. Nous avons deux choix : soit on verse l’eau et chaque goutte, c’est de l’électricité. Soit on verse de l’eau et on perd le dollar parce que nos populations de Faranah n’ont pas d’électricité soit on vend le volume d’eau excédentaire à un pays et cet argent on le récupère pour commencer à investir dans les lignes de transport.»
Par rapport aux solutions envisagées, il a indiqué que l’ouverture du secteur aux privés s’impose. « L’État ne peut pas tout faire. On trouve des opérateurs, des particuliers, des entreprises qui vont construire des lignes. Et, ils se font rembourser à travers le transport d’énergie. C’est ce qu’on fait. Le courant qu’on envoie au Liberia, au Sénégal ou en Gambie, la ligne par laquelle on envoie ne nous appartient pas. On fait partie d’un cercle de réseau. Le transport de ce courant vers ce pays là, la ligne qui est utilisée, il y a des redevances à payer. On veut des privées qui vont réaliser la boucle de Guinée, permettant que les populations qui sont aujourd’hui sur le thermique puisse avoir l’électricité. Il faut aller sur des contrats BOT, il faut aller vers des contrats EPCF», a-t-il soutenu.
« A peu près un million et quelques personnes ne paient pas l’électricité »
D’autres problèmes ont également été signalés par le ministre : «à combien l’Etat guinéen achète l’électricité ? Je ne dis pas ailleurs, mais même au paradis avec la situation actuelle on ne s’en sortira pas. Le kilowattheure est acheté à 1700 ou 1800 parfois. On vend à des tranches de populations à 107 francs à 300 et quelques francs ou 400 francs. Il n’y a que l’Etat qui paie là différence.»
Pour le ministre, le Guinéen doit prendre conscience et contribuer à l’essor de ce secteur. «C’est notre faute à nous tous. On paye le courant. Un seul jour, une seule personne ne s’est pas levée pour aller à EDG et aller dire moi j’étais au Sénégal, je payais le kilowattheure (kWh) à tel montant et le montant que j’ai ici est trop bas, augmenter ma facturation. Mais tout le monde sait que ce qu’on paie là, on va tout droit vers le mur», a-t-il prévenu.
Le ministre de l’Energie en a appelé à la responsabilité des uns et des autres : «on est tous responsables de la situation dans laquelle on se trouve. D’Amadou à Zaoro. Pour la fraude sur le terrain, il n’y a pas de corrompu sans corrupteur. Il y a quelqu’un qui dit toujours, vous pouvez biphaser ma ligne. Ceux qui font ça ce sont des frères. Malheureusement, des personnes honnêtes qui paient l’électricité, paient pour ceux qui consomment et ne paient pas. On a, à peu près un million et quelques personnes qui ne paient pas l’électricité. D’autres le paient. Mais à qui?»
À l’endroit des cadres de la société EDG, le ministre a conseillé : «je l’ai toujours dit, la situation d’EDG, c’est une situation qui est entretenue. La fraude. Ce n’est les gens qui sont dehors qui le font. La fraude est accoutumée depuis des années. Vous avez vu que le prix du kilowattheure ne fait qu’augmenter (…) Si nous mêmes, on ne change pas de comportement vis-à-vis de ceux que nous gérons, ça va être difficile que les messages de sensibilisation que nous sommes en train de faire passer, ils y croient. Sur le terrain, ce sont les chefs de zones, ce sont les responsables au niveau de la facturation. Le problème, c’est nous. C’est tout le monde.»
Les compteurs prépayés, une option envisagée
La campagne d’installation des compteurs prépayés a également été évoquée. À ce propos, le directeur général de EDG, a donné des informations. «Aujourd’hui, EDG, c’est moins de 700 mille abonnés. Est-ce que vous pensez que ce chiffre est exact ? C’est la où on parle de pertes. L’un des avantages du compteur, c’est nous aider aussi à décharger. Parce que si les gens consomment le courant, ils n’ont pas de compteurs, on a aucune possibilité de savoir ce que chacun consomme. Parce que c’est certains qui payent pour d’autres. Il n’y a aucune justice à ce niveau. Les compteurs vont être déposés en fonction de certains critères. Aujourd’hui, nous mettons la priorité sur les lignes surchargées», a souligné Elhaj Gandho Barry.
Enfin, ces responsables ont demandé à la presse de faire des «critiques constructives» en tenant compte des «réalités» et de venir à la source.
Abdoul Lory Sylla pour guinee7.com