Il est aujourd’hui évident que, dans une Guinée qui amorce un virage décisif vers l’exploitation minière pour soutenir la production agricole et bien d’autres secteurs vitaux de son développement, le pays a plus que jamais besoin de cadres confirmés, des hommes de la trempe de Saadou Nimaga. Cet homme, qui a pratiquement consacré toute sa carrière au domaine des mines, est un pilier de cette nation dans ce secteur. Ancien secrétaire général du ministère des Mines et de la Géologie, un poste aussi stratégique que technique, il a joué un rôle essentiel dans la préparation du projet Simandou bien avant qu’il ne soit officiellement sur les rails. Aujourd’hui, plus que jamais, il pourrait être d’une utilité cruciale, même en qualité de consultant, pour défendre les intérêts de la Guinée dans ce projet titanesque qui pourrait changer à jamais l’avenir du pays.
C’est pourquoi sa disparition soudaine – ou plutôt son enlèvement – plonge toute la nation dans une inquiétude profonde. Ce n’est pas seulement sa famille, ses proches ou ses collaborateurs qui sont bouleversés, mais tous ceux qui, en Guinée, croient en l’avenir de ce pays et prient pour qu’enfin, avec Simandou, le décollage tant attendu se concrétise. Plus que quiconque, l’État doit faire de son enlèvement une priorité absolue. Non seulement pour comprendre ce qui est arrivé à un de ses fils, mais aussi pour montrer que la Guinée ne tolère plus ce genre d’actes barbares dignes d’un Western de mauvais goût. Il est inconcevable que dans un pays qui aspire à la modernité, de telles pratiques impliquant des étrangers, semblables à celles des temps anciens, puissent encore avoir lieu.
Certes, une plainte a été déposée par l’avocat de Saadou Nimaga, mais sans une pression ferme et déterminée de l’Exécutif, il est peu probable que le Procureur Fallou Doumbouya, dont la réputation est en berne en ce moment au sein de l’opinion publique, donne à cette affaire la priorité qu’elle mérite. Ce même procureur, déjà noyé dans une jungle d’autres dossiers, doit comprendre que ce cas dépasse de loin une simple affaire criminelle. Il s’agit d’une question d’État, de souveraineté, de l’honneur même de la Guinée !
Il n’est pourtant pas nécessaire d’avoir l’acuité juridique d’un Luis Moreno-Ocampo pour comprendre qu’il faut immédiatement auditionner le nommé David Makongo, un opérateur minier semble-t-il, dernière personne à avoir rencontré Saadou Nimaga à l’hôtel Kaloum, juste avant que ce dernier ne soit enlevé par des individus en civil dans la cour du même établissement. Comment un étranger, aussi influent soit-il, peut-il échapper à l’interrogatoire dans une affaire aussi grave ? Comment peut-on accepter que, dans une Guinée en quête de justice ce Makongo reste introuvable lui aussi ?
Saadou Nimaga jouit d’une réputation irréprochable. Ceux qui le connaissent savent qu’il ne ferait pas de mal à une mouche. Il est impensable qu’un tel homme soit la cible d’aventuriers sans scrupules. La Guinée ne peut pas permettre que son avenir minier soit gangréné par des aventuriers attirés par le boum dans le secteur avec le projet Simandou, comme ils l’ont fait sous d’autres cieux. C’est pourquoi un appel vibrant est lancé au chef de l’État, le Général Mamadi Doumbouya, le seul à pouvoir intervenir directement dans cette affaire et réveiller tous ceux qui dorment dans les institutions, tant au niveau de la sécurité publique que de la justice. Le temps presse, la famille de Saadou Nimaga attend désespérément son retour. Madame, ses filles et ses jumeaux l’attendent…
Il y a des précédents. Il est en effet un secret de polichinelle que lorsque l’État veut résoudre une affaire, il le fait en un éclair. Alors, que cet éclair soit celui qui sauvera Saadou Nimaga ! Il n’est pas trop tard, mais chaque seconde compte. Ne laissons pas le temps jouer contre nous.
Par Abdoulaye Sankara