Dans la République bananière de Guinée où le coup d’État fait office de sport national, Mamadi Doumbouya a transformé la présidence en jeu à durée indéterminée. Arrivé au pouvoir en grande pompe le 5 septembre 2021, notre général autoproclamé semble avoir jeté ses promesses par la fenêtre. La CEDEAO, ce syndicat des présidents ouest-africains à durée indéterminée, avait pourtant marqué la fin de la transition au 31 décembre 2024. Mais entre prolongations et matches truqués, qui a besoin d’un arbitre ?
Le Cirque de la Transition : un one-man show
Avec son sens inné du spectacle, Mamadi a compris qu’il fallait se distraire avant de dominer. Alors, place au show ! Opposants enlevés façon David Copperfield, médias muselés comme des lions en cage, et manifestations interdites au nom du « calme ». Entre terreur et diversion, le Général s’est trouvé une mission divine : convaincre les Guinéens que son règne est leur salut. Ses sbires, véritables apôtres du nouveau testament politique, arpentent le pays avec une zèle évangélique. Écoles fermées, administrations paralysées : tout s’arrête pour écouter ces prêcheurs. À les voir, on croirait que les routes en ruine et les hôpitaux sans médicaments disparaîtront par magie.
Mamadi Superstar : la flagornerie établie en art
La cour royale rivalise d’ingéniosité dans la flatterie. « Mamadi, notre sauveur ! », clament thuriferaires dans une symphonie bien rythmée . Des. ministres et autrescadres en bois, devenus troubadours modernes, jonglent avec les chiffres, promettant « zéro chômage » d’ici 2099. Pendant ce temps, les Guinéens continuent de slalomer entre nids-de-poule et illusions perdues.
Le Trophée Mamadi Doumbouya : foot et propagande
Pour couronner le tout, le Général a eu une révélation digne de César : le football comme nouvel opium du peuple. Des tournois baptisés en son honneur rassemblent des foules exaltées. Les équipes ? Toutes aux couleurs de la junte. Les commentateurs sportifs ? Transformés en poètes de la propagande. Entre deux buts, on nous rappelle que sans Mamadi, le pays sombrerait dans le chaos.
2025 ou l’année de tous les suspenses
Alors que l’échéance de la transition approche, le peuple retient son souffle. Référendum truqué, Constitution sur mesure, ou élections rapportées ? Mamadi semble bien décidé à prolonger son séjour au sommet.
Opposition muselée, liberté confisquée
Toute voix discordante est aussitôt réprimée. Les manifestations pacifiques finissent en bain de lacrymogènes, et les opposants politiques en fugitifs ou prisonniers. Même les réseaux sociaux, dernier bastion de liberté, sont surveillés de près.
Guinée, théâtre de l’absurde
Sur ce grand échiquier de la démagogie, chacun joue son rôle. Ministres et cadres rivalisent pour justifier l’injustifiable, les caisses de l’État se vident,et les populations, spectatrices impuissantes, continuent de patauger dans la misère. Mais derrière les discours enflammés et les ballons de foot, les Guinéens gardent un espoir têtu. Entre résistance citoyenne et indignation grandissante, une voix s’élève : « La liberté n’est pas un don des autorités, mais un droit des citoyens », aurait dit Camus. Alors, le rideau tombera-t-il enfin sur ce cirque de la transition ? Ou bien assistera-t-on à une nouvelle saison de ce feuilleton présidentiel ?
Une chose est sûre : le spectacle continue.
À la semaine prochaine,
Oumar Kateb Yacine,
Analyste-Consultant Géopolitique