C’est une matinée ordinaire dans les couloirs du Tribunal du Travail de Conakry. Pourtant, derrière les murs de ce bâtiment, un véritable renouveau se joue. Après des années de fonctionnement chaotique, marqué par l’absence d’un siège officiel et des conditions de travail précaires, l’institution semble retrouver une nouvelle dynamique.
Le Tribunal du Travail, autrefois logé au Tribunal de Première Instance de Mafanco, a amorcé une transformation remarquable. Aujourd’hui, ses audiences se tiennent dans une salle historique, celle-là même qui avait accueilli le procès des événements du 28 septembre 2009. Ce déménagement, fruit de démarches incessantes, est une victoire personnelle pour Mohamed Diawara, à la tête du tribunal depuis janvier 2024.
Un cadre rénové pour une justice plus rapide
L’effort est palpable, et les résultats le sont tout autant. Pour Me Lanciné 3 Camara, avocat habitué à défendre des dossiers dans cette juridiction, la différence est saisissante : ‘‘Aujourd’hui, nous travaillons dans une salle somptueuse, climatisée, et surtout fonctionnelle. Le président du Tribunal du Travail a réussi à mettre fin aux lenteurs administratives. Les dossiers ne dorment plus dans les tiroirs. C’est un changement impressionnant.’’
Au-delà du confort matériel, la célérité dans le traitement des affaires s’impose comme le véritable moteur de ce renouveau. Les litiges, souvent liés à des licenciements abusifs, des arriérés de salaires ou des indemnités, trouvent désormais une issue dans des délais raisonnables.
Des assesseurs enfin mobilisés
Lorsque Mohamed Diawara a pris ses fonctions, un défi majeur s’imposait : le manque d’assesseurs, aussi bien employeurs que travailleurs. Une problématique ancienne qui paralysait le fonctionnement de la juridiction. Aujourd’hui, cette réalité appartient au passé.
‘‘Nous avons mené les démarches nécessaires pour que chaque composante habilitée par les textes soit représentée. Désormais, les assesseurs sont au complet, avec 12 représentants pour les employeurs et 12 pour les travailleurs’’, se réjouit le magistrat.
Pour Mamadou Traoré, assesseur travailleur depuis près de deux décennies, cet engagement collectif marque une rupture nette avec les années d’inaction : ‘‘Jamais je n’ai vu un tel engouement. Le patronat, qui autrefois brillait par son absence, est aujourd’hui pleinement impliqué. Cela donne une toute autre dynamique à notre tribunal.’’
Une collaboration inédite avec le patronat
Du côté des employeurs, la volonté des autorités d’instaurer une justice équitable a su convaincre. Ismaël Keita, vice-président du patronat et assesseur employeur, ne tarit pas d’éloges : ‘‘Le patronat accompagne désormais activement le tribunal. Nous avons participé à l’aménagement de la salle d’audience et apporté une contribution logistique significative. Cela s’inscrit dans la vision des autorités actuelles de faire de la justice une boussole pour notre pays.’’
Des défis persistants
Malgré ces avancées, un enjeu crucial demeure : doter le Tribunal du Travail d’un siège digne de ce nom. Si les conditions de travail se sont grandement améliorées, l’occupation temporaire d’une salle d’audience ne peut être une solution durable.
Mohamed Diawara reste cependant confiant : ‘‘Nous avons déjà accompli beaucoup. Les audiences se déroulent désormais deux jours par semaine, contre un seul auparavant. Les dossiers sont traités en temps réel. Mais il est essentiel que cette juridiction dispose enfin de son propre siège pour garantir sa pérennité.’’
Une justice en marche
Le Tribunal du Travail de Conakry est à l’image d’une Guinée en quête de renouveau : un édifice encore fragile, mais porté par une volonté collective de changement. Alors que les défis restent nombreux, l’engagement des acteurs – magistrats, avocats, assesseurs et autorités – ouvre la voie à une justice plus rapide, plus équitable et, surtout, plus humaine.
Et comme le rappelle Mamadou Traoré avec une sagesse empreinte d’espoir : ‘‘Nous devons tous travailler main dans la main pour faire de la Guinée une famille unie.’’
Avec Mediaguinee