Censure

Tension dans le secteur des jeux : Ce que cache l’affaire Lonagui-ARSJPA

L’Autorité de Régulation du Secteur des Jeux et Pratiques Assimilées (ARSJPA) aurait récemment saisi l’Agent Judiciaire de l’État, dénonçant le refus de la Loterie Nationale de Guinée (Lonagui) de lui verser plusieurs milliards de francs guinéens -une somme estimée entre 100 et 200 milliards selon diverses sources. Une affaire qui aurait également mobilisé la gendarmerie, suggérant une tension croissante entre les deux entités. Cependant, une source proche de la Lonagui évoque une toute autre version des faits : l’ARSJPA ne chercherait pas à réguler, mais plutôt à nuire à l’opérateur national des jeux.

Des factures contestées et juridiquement douteuses

Depuis son opérationnalisation au premier trimestre 2023, l’ARSJPA aurait adressé des factures périodiques à la Lonagui, y compris pour des exercices antérieurs à sa propre existence. Plus troublant encore, ces factures incluraient des paiements supposés dus au Trésor public, alors qu’aucun texte juridique n’oblige la Lonagui à s’en acquitter. En principe, le recouvrement des redevances fiscales relève des services compétents du ministère des Finances, et non d’un régulateur du secteur des jeux. Or, le Directeur Général de l’ARSJPA aurait pris l’initiative de réclamer ces paiements, soulevant ainsi une question de compétence et de légalité.

Outre ces redevances au Trésor, l’ARSJPA exigerait également des versements en sa faveur et au bénéfice d’un Fonds d’Appui au Développement Social (FADS), sans qu’aucun cadre juridique n’en précise la base légale.

La Lonagui résiste et alerte sur les irrégularités

Face à ces demandes jugées infondées, la Lonagui aurait, à plusieurs reprises, notifié par écrit l’ARSJPA pour lui exposer les raisons de son refus. Selon les textes régissant les finances publiques et les organismes publics, ces paiements seraient non conformes et donc impossibles à honorer. Le Vérificateur général, saisi de l’affaire, aurait lui aussi exprimé des réserves sur ces pratiques, mais cela n’aurait pas empêché le DG de l’ARSJPA de maintenir ses réclamations. Même le Conseil d’Administration de la Lonagui, garant du respect des règles financières, aurait opposé un refus catégorique à ces paiements, protégeant ainsi son Directeur Général de toute responsabilité dans ce bras de fer.

Une institution à la dérive ?

Cette affaire soulève une interrogation plus large sur le rôle et la mission de l’ARSJPA. Un expert du secteur des jeux estime que ‘‘plutôt que d’exiger des paiements contestables, l’ARSJPA aurait dû commencer par travailler à la mise en place d’un cadre juridique clair pour le secteur’’.

En effet, l’absence d’une réglementation bien définie laisse place à des interprétations divergentes et à des conflits d’intérêts potentiels. Un régulateur sans cadre légal précis court le risque de voir son autorité contestée et ses actions perçues comme arbitraires.

Par ailleurs, l’implication de la gendarmerie dans cette affaire interroge : cherche-t-on à faire la lumière sur une véritable fraude ou s’agit-il d’un levier de pression contre la Lonagui ?

Si des détournements existent, il revient aux autorités compétentes d’en établir la preuve de manière rigoureuse et impartiale. Mais si, en revanche, cette affaire est le résultat d’un bras de fer administratif, cela révélerait des failles profondes dans la gestion du secteur des jeux en Guinée. Le débat est ouvert, et l’évolution de cette affaire sera scrutée de près.

Aziz Sylla pour guinee7.com

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