« La médiocrité aime s’allier à la médiocrité », a dit Tahra Hassine Ferhat. C’est le sort qui nous est infligé aujourd’hui, malgré nous. Jamais des médiocres aussi éminents n’avaient brillé avec autant d’éclat dans l’espace public, dans les sphères de l’État et de l’administration. Une anarchie et une cohue historiques ! D’ailleurs, la purge en cours le démontre : il y a eu erreur sur les personnes. Beaucoup, à l’image de notre « Zorro » improvisé, à la moralité douteuse, ont cru que l’heure de la revanche sur un destin terne avait sonné. Mal leur en a pris, car chacun est appelé à rendre des comptes.
Prenons ce dernier, par exemple, qui, après un passage apocalyptique au ministère de l’Éducation, a le sommeil troublé par les nombreux cadavres dans ses classeurs. Et ce n’est sûrement pas son zèle tonitruant ni sa loyauté de façade qui le laveront de sa cleptomanie avérée. D’autres avant lui s’y étaient essayés, en vain. Parmi ces tonneaux vides qui font du vacarme dans la cité et polluent l’air, certains excellent davantage en surclassant les autres dans la ruine de l’âme et de l’esprit.
Les élèves qui ont eu le malheur de croiser leur chemin ont souffert de leurs limites et lacunes, étalées au grand jour dans un spectacle des plus pathétiques. Derniers de la classe, ils ont été repêchés à une fonction de seconds couteaux où, pense-t-on, ils pourraient moins nuire à la communauté nationale que dans celle de ministre, même dans une transition si généreuse avec les sycophantes. Peut-être espèrent-ils monter encore plus haut, à la faveur d’un nouveau tirage au sort, car, en dehors des concours de circonstances, ils ne sont même pas éligibles à un poste subalterne.
« Mon passé est leur futur », comme dirait l’autre, et il est clair que la comparaison dégrade toujours les ânes, même ceux qui jouent aux savants. Que peut-on m’offrir encore, à moi qui ai déjà tout reçu sur un plateau d’or, sans avoir eu besoin de renouveler chaque jour mes serments, de faire la génuflexion ou de me constituer en collectif pour quémander l’aumône sous la forme d’un poste juteux ?
Médiocres parmi les médiocres, ils aspirent à régner « par défaut », en l’absence de tout talent, en excluant les compétences éprouvées. Ils prient pour que le temps s’arrête, militent pour le statu quo. Peine perdue. L’histoire se moque de leurs humeurs et de leurs sautes d’humeur. L’horloge du destin ne s’arrête pas pour leurs intérêts mesquins. L’angoisse de retourner à leur véritable condition de « cinquième roue du carrosse », de retrouver une vie banale et ordinaire, les ronge. Alors, ils sortent de l’ombre, et de leurs gongs, pour asséner des trivialités et des débilités qui mériteraient un passage sur le divan d’un bon psychanalyste, à moins que ce ne soit entre les mains d’un exorciste expérimenté.
N’est-il pas préférable d’être taxé – même à tort – de démagogue plutôt que d’être perçu comme un bouffon du roi ou un idiot du village ? Alors, je me demande : faut-il vraiment utiliser un canon pour tuer une mouche dont personne n’entend le bourdonnement ?
Le débat est ouvert, et ce ne sont pas les gesticulations pitoyables d’un illuminé qui vont nous divertir. Au suivant, de ces morveux qui ressentent un besoin irrépressible de se moucher !
Tibou Kamara