Un personnage déconcertant que ce Donald, autant sinon plus que l’autre, celui de Disneyland. Et ce n’est pas dans son entourage proche que l’on trouvera de quoi se rassurer. Avec le vindicatif Vance, prêt à en découdre pour un regard de travers (le pauvre Zelensky en sait quelque chose), et le truculent Musk, plus riche que Crésus et l’Oncle Picsou réunis, mais prêt à se ruiner pour satisfaire son « pote » de président, l’on se sait jamais à quoi il faudrait s’attendre.
Après avoir imaginé une « Côte d’Azur orientale » sur les ruines de Gaza – projet immobilier pour milliardaires en mal de soleil –, voilà que l’homme s’attaque aux importations. Il embouche les trompettes de Jéricho pour abattre les murs du libre-echange, avant d’ériger les remparts d’un protectionnisme pur et dur.
Maintenant que la hache de la guerre commerciale est déterrée, les cibles sont nombreuses et variées. Il y a non seulement les rivaux traditionnels des États-Unis, comme la Chine, mais aussi les alliés tels que le Canada voisin et l’Europe… ou ceux qui croyaient l’être.
Dans cette campagne de surtaxes à l’importation, aucun pays n’est oublié, nul territoire n’est épargné, pas même le petit Lesotho, dont, selon Donald lui-même, « personne ne parle ».
Pire encore, au-delà des humains, il semblerait que certains animaux aient désormais des raisons de s’inquiéter. C’est en tout cas ce que suggère une nouvelle qui fait les choux gras des médias : une taxe de 10 % sur les produits venant des… îles Heard-et-McDonald (encore ce prénom, décidément !). La raison ? Ces territoires, classés au patrimoine mondial de l’Unesco, sont décrits comme « inhabités » et « recouverts de glace », peuplés principalement de manchots. Aucune activité économique, aucune population permanente, juste des expéditions scientifiques épisodiques.
L’absurdité de cette mesure a déclenché une vague de railleries sur les réseaux sociaux, avec des montages mettant en scène des manchots protestant contre ces tarifs douaniers. Certainement pas, vous vous en doutez, en brandissant les poings vers le ciel puisqu’il s’agit de manchots après tout ! Les internautes ont partagé des images générées par l’intelligence artificielle montrant ces « cousins » des pingouins agitant des pancartes contre les taxes décidées par le pays de l’Oncle Sam… devenu finalement celui de l’Oncle Donald.
Mais il n’y a pas que ce territoire qui soit concerné :
– Île Norfolk (Australie) : taxée à 29 % malgré ses 2 000 habitants ;
– Saint-Pierre-et-Miquelon (France) : droits de douane portés à 50 %, soit le taux le plus élevé, égalant celui du Lesotho ;
– Îles Cocos (Australie) : 10 % de taxes pour 600 habitants.
Ces mesures s’inscrivent dans une liste de plus de 200 pays et territoires ciblés par la nouvelle politique commerciale de Donald, avec des majorations atteignant désormais 125 % pour la Chine (pour « manque de respect ») !
Un revirement surprenant, intervenu après que le locataire de la Maison Blanche a ajourné pendant 90 jours les taxes additionnelles imposées à la plupart des autres pays.
Au moins cette affaire relègue au second plan un bourde potentiellement plus grave, finalement restée sans suite. L’énorme gaffe sécuritaire qui a récemment fait s’esclaffer la planète. Non seulement les services de renseignement de l’ère Trump ont utilisé Signal – l’application cryptée préférée des lanceurs d’alerte – pour organiser une opération militaire contre les Houthis au Yémen, mais ils ont aussi, par mégarde, intégré un journaliste du The Atlantic à leur conversation censée être secrète.
Il faut dire qu’un précédent avait déjà donné dans le surréalisme, avec une bévue moins périlleuse mais tout aussi savoureuse. C’est la méprise du ministère de l’Agriculture américain (USDA), qui a classé le Wakanda – nation fictive de l’univers Marvel – parmi ses partenaires commerciaux en novembre 2020, à quelques semaines de la fin du premier mandat de Trump. L’erreur sera corrigée sous Biden en 2021, après que le document, ébruité sur les réseaux sociaux, a déclenché un déluge de moqueries.
Comme beaucoup le savent sans doute, même dans les sombres ghettos de Conakry (la ville ténèbres qui a renoué avec les coupures d’électricité), le Wakanda est un pays imaginaire issu de l’univers Marvel, popularisé par la bande dessinée américaine Black Panther et par le film éponyme sorti en 2018. Il est décrit comme une nation africaine très avancée sur le plan technologique, qui reste volontairement cachée du reste du monde.
Si le monde n’y prend garde, ce hybride de Picsou (obsédé par les gains), de Pat Hibulaire (roublardise) et de Donald Duck (impulsivité), possédé par le démon d’un capitalisme dérégulé, s’apprête à saisir une lyre, tel Néron, pour entonner l’ode au protectionnisme, sur les ruines encore fumantes de l’économie mondiale.
Et le spectacle risque d’être bien moins drôle qu’un tour de manège à Disneyland.
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