C’est à huis clos que Halimatou Camara, l’une des victimes des événements du 28 Septembre 2009 a comparu devant le tribunal de première instance de Dixinn délocalisé à Kaloum.
La victime loin des caméras et micros, a répondu aux questions des avocats.
Au sortir de l’audience, Me Pépé Koulémou, l’un des avocats du Capitaine Moussa Dadis Camara, a apprécié l’esprit du huis clos. « Habituellement l’audience est publique mais pour des raisons liées à l’intimité des victimes entre guillemets des cas de viol qui sont en train d’être jugés maintenant, je crois que la sagesse a conduit le tribunal à admettre le huis clos, puisque ça pouvait toucher à l’intimité des prétendues et supposées victimes. Parce qu’en réalité, il faudrait que ces victimes entre guillemets viennent rapporter la preuve de ce dont elles ont été victimes. »
Même son de cloche chez la partie civile : « cette première étape nous ramène au fait que voilà, c’est la procédure pénale et c’est surtout les droits de la partie civile qui sont respectés. Surtout en matière de torture; d’actes de barbarie subis par la victime; en matière de violence basée sur le genre où de violence sexuelle; il est de droit dans notre code de procédure pénale que le huis clos soit admis lorsque la victime veut le huis clos. » A laissé entendre Me Halimatou Camara, avocate de la partie civile.
Me Pépé Koulémou a toutefois émis un doute sur la sincérité de la plaignante. « Cette dame a donné sa version des faits. Nous sommes encore en train de poser des questions. Aujourd’hui c’était le tour des avocats de la défense que nous sommes. Nous venons de terminer. Je ne dis pas qu’elle a été victime. Parce que voilà une dame qui dit qu’elle a représenté toutes les victimes des événements du 28 septembre à la Haye. On lui a posé la question de savoir qu’en étant représentante des autres victimes, pas seulement des victimes de viol, est-ce qu’elle disposait d’une procuration des autres ? Elle a dit qu’elle n’a pas de document dans ce sens. On lui a aussi posé la question de savoir durant tout ce parcours là, ses va-et-vient de la Haye, est-ce qu’elle sait pertinemment qu’elle n’est pas témoin, mais effectivement une partie civile à ce procès ? Elle a dit que oui. Donc, ici, nous l’avons invitée d’apporter les preuves de ses déclarations. Les raisons de sa plainte et nous sommes entrain de lui poser des questions dans ce sens pour qu’elle prouve l’effectivité d’une telle infraction commise à son encontre. Mais en réalité moi je ne suis pas convaincu. »
Au même moment, sa consœur de la partie civile se réjouissait que les victimes puissent enfin donner leur part de vérité. « Aujourd’hui, il est difficile de dire que son témoignage a convaincu ou n’a pas convaincu. Notre pays vient de loin. Aujourd’hui le plus important à cette étape, c’est la parole de la victime. Ça c’est extrêmement important. C’est une étape cruciale dans notre pays. Que sa parole soit convaincante ou pas, il est aujourd’hui clair qu’une victime a eu le droit de parler et je pense que c’est historique et ça depuis hier nous ressentons une forte émotion. Nous sommes dans un Etat où on se sent plus ou moins libéré. Le procès criminel en tant que tel, il est même thérapeutique pour la victime. Je pense que ces dimensions là ne sont pas des dimensions qui sont prises en compte par nos adversaires, malheureusement. les gens ne sont pas suffisamment sensibilisés sur ce qu’on appelle les violences basées sur le genre. C’est des types victimes de violences qui font que la victime est souvent marquée par un traumatisme. Et même ce qu’elle peut raconter peut avoir des zones d’ombre parce que tout simplement la victime est traumatisée. Je pense que c’est une victoire. C’est une première victoire que cette victime ait eu le courage de parler, de briser ce tabou malgré qu’elle soit une mère de famille. Elle est restée une citoyenne qui, aujourd’hui veut que sa dignité soit reconnue. Elle veut pouvoir parler elle veut pouvoir être reconnue en qualité de victime. »
Abdou Lory Sylla pour guinee7.com