Après près de deux ans, le procès historique dit des massacres du 28 septembre 2009 s’est enfin conclu en juillet dernier. Pourtant, malgré les lourdes condamnations infligées à certains accusés pour crimes contre l’humanité, un goût d’inachevé plane sur cette affaire. Les responsables réels du massacre restent flous, et les victimes, principales concernées, peinent à obtenir justice, notamment sous la forme de réparations financières.
Des condamnations lourdes mais insuffisantes
Si le procès a permis de condamner quelques figures clés, les victimes pointent une ombre majeure : l’insolvabilité des coupables. Selon elles, les crimes ont été commis sous le couvert de l’État, qui devrait, par conséquent, assumer les dédommagements. Or, à ce jour, aucune mesure concrète n’a été prise pour répondre à leurs attentes. Ces hommes et ces femmes, brisés par une barbarie inouïe, restent encore des oubliés du système.
Le luxe des magistrats
Alors que les victimes luttent pour obtenir réparation, le traitement des magistrats ayant présidé le procès suscite l’indignation. Pendant deux ans, ces derniers ont séjourné dans un hôtel luxueux, aux frais de l’État. Une opération dont le coût, selon nos informations, s’élève à environ 13 milliards de francs guinéens (GNF), avec un reliquat de 4 milliards GNF encore dû par l’État. Fait choquant : même après la fin du procès, certains magistrats auraient continué à garder les clés de leurs chambres d’hôtel. Cette gestion financière extravagante contraste brutalement avec la précarité des victimes, pour qui chaque franc compte.
Le mur du silence des autorités
Pour en savoir davantage sur ces dépenses, nous avons contacté Sâ Millimono, responsable de l’Unité de gestion du projet d’appui au procès. Mais au lieu d’éclairer nos questions, il a préféré jouer la carte de l’opacité, exigeant que nous révélions notre source avant de fournir toute information. Devant notre refus légitime de divulguer nos sources, il a sèchement coupé court à l’échange.
Une justice à deux vitesses
Cette affaire révèle une triste réalité : une justice à deux vitesses. D’un côté, des magistrats choyés par un État prêt à dépenser des milliards pour leur confort. De l’autre, des victimes qui attendent toujours une reconnaissance, une réparation, et surtout, une justice pleine et entière. La conclusion de ce procès était censée marquer une étape vers la réconciliation et la dignité. Elle risque de devenir un symbole de plus de l’échec de l’État à répondre aux attentes de ses citoyens.
En un mot ou en quatre, les victimes du 28 septembre méritent que la justice aille au-delà des discours et des verdicts théâtraux, pour devenir un véritable outil de réparation et de reconstruction. Mais pour cela, il faut un État prêt à regarder ses responsabilités en face.
Pour rappel, selon le verdict, les 8 condamnés du procès doivent payer ‘‘un franc symbolique’’ pour chaque ONG constituée ; un milliard cinq cent millions de francs guinéens par cas de viol ; un milliard pour chaque cas de mort et de disparu et Cinq cent millions GNF pour chaque cas de pillage. Ils débourseront aussi deux cent millions pour chaque cas de torture et de coups et blessures volontaires.
Brahima S. Traoré pour guinee7.com