Censure

Les « Vérités » d’Alpha Condé*

Le discours réponse du chef de l’Etat a volé « la vedette » aux différentes sorties des camarades syndicalistes lors de la célébration du 1er mai qui s’est déroulée au palais du peuple. Alpha Condé a dans son laïus, tancé les membres de son gouvernement et les leaders syndicaux pour leurs turpitudes. Preuve que sa gouvernance souffre d’erreurs de castings. C’est du moins l’impression qu’a fait naître chez de nombreux citoyens, cette sortie présidentielle, dont nous vous  proposons un premier extrait.

Contexte de la fête du 1er mai

« Ce 1er mai se fête dans la tristesse. En effet ce premier mai nous le célébrons au moment où notre pays est plongé dans la  crise la plus grave qu’un pays africain a connu. Et cela au moment où il y a une crise internationale grave. En effet, cette crise c’est Ebola. Pourquoi Ebola s’est développé en Guinée. Il y a eu Ebola au Congo Brazzaville. Mais du fait de l’équipement  du pays, le président Sassou a fait encercler la sous-préfecture, et donné à manger et soigné les malades. Et Ebola s’est arrêtée dans cette sous-préfecture.  Et ne s’est pas étendu à tout le Congo.

Pourquoi  l’Ebola s’est étendue en Guinée ? Il est temps que le peuple de Guinée connaisse la vérité. Que ce soit au niveau des partis politiques, que des syndicats, trop de démagogie, il y a trop de déclarations pour se faire applaudir et se faire plaire. Voilà notre tare. On n’a pas le courage de parler aux travailleurs.

Ebola a commencé à Guekédou. On ne sait pas encore qui est ce qui est Ebola 1 ? C’est-à-dire le premier. Le médecin qui a soigné est tombé malade, il est parti à Macenta.  Son collègue qui l’a soigné  est tombé malade. Et tous les deux sont morts. C’est en ce moment qu’on a commencé à se  poser des questions. Pourquoi c’est encore une des tares  de notre pays ? Nous n’avons pas de mémoire, nous sommes des démagogues.

L’héritage colonial

La colonisation n’a pas fait que du mal, la colonisation nous a fait souffrir, mais la colonisation a laissé des choses qui pouvaient nous servir dont l’Institut Pasteur de « Pastoria. »  Tous les vaccins contre les serpents les plus dangereux  étaient faits là-bas. Le PDG est venu avec la révolution, à bas l’impérialisme. On a tout jeté à l’air et on a
plus de laboratoire pour pouvoir trouver les virus. Voilà la première réalité. Notre système hospitalier n’était pas  capable de   trouver des virus. Il a fallu que des médecins meurent à l’hôpital Donka, et celui de Kipé pour qu’on commence à se poser des questions. Il a fallu envoyer le virus à Dakar à l’Institut Pasteur pour savoir que c’est le virus Ebola, mais c’était trop tard, Ebola avait déjà atteint Conakry parce que nous avons hérité d’un système sanitaire obsolète, alors que pendant la période  coloniale, la Guinée avait un des systèmes sanitaires les meilleurs. Qui se rappelle, vous étiez trop jeunes encore  mais à l’hôpital les pauvres on les soignait, on les appelait les indigènes. On les soignait gratuitement. Mais le PDG est venu au lieu de laver le bébé et jeter l’eau salle. On a jeté le bébé avec l’eau salle. C’est ça la première vérité. La deuxième vérité,  il y a eu le camp Boiro. Il y a eu des arrestations. Il y a eu la dictature mais aussi le PDG a laissé des usines plus de cent, les FAPA,  revues et corrigées auraient pu permettre à la Guinée d’avoir l’autosuffisance alimentaire. Nous avons la chance en Guinée qu’aucun pays africain n’a. La basse Guinée seule peut nourrir toute la Guinée en riz. La forêt seule peut nourrir la Guinée, la haute Guinée seule peut nourrir la Guinée, nous avons trois  régions qui peuvent rendre à la Guinée l’autosuffisance alimentaire. Pourquoi nous importons 300.000 tonnes de riz ? Ceux qui s’intéressent  à la lecture de l’histoire. Ce qui n’est pas le cas de la grande majorité des cadres guinéens contrairement aux cadres sénégalais. Vous aurez su que le Gouverneur  Roland Pré  avait fait un Plan de développement qui aurait permis à la Guinée d’aller  très loin. Lorsqu’il a constaté que la France allait faire la guerre d’Indochine, lui aussi avait, ils ont décidé de faire de la Guinée le grenier de l’Afrique de l’Union Française. Ça  veut dire quoi l’union Française ? L’Afrique de l’Ouest, l’AOF, l’AEF plus les colonies. C’est en ce moment qu’on a commencé à faire  l’aménagement des plaines  de Monchon, etc. Lorsque, ensuite le colonisateur Français avait fait  toute l’étude  pour le barrage de Konkouré. Tous les frais étaient prêts, y compris les aménagements agricoles.  Mais les conditions dans lesquelles nous avons pris l’indépendance, dont l’Afrique était très fière,  a amené le gouvernement Français à avoir une attitude totalement contraire à toute forme  d’humanité. Ils ont emporté les plans, donc on ne pouvait plus faire le barrage de Konkouré parce qu’il n’y avait plus de plan. Nous n’avons pas voulu créer la monnaie guinéenne parce que nous l’avons voulu. La création de la monnaie guinéenne nous a été imposée parce qu’ils ont voulu assécher l’économie guinéenne. Quand le  franc CFA  partait à Dakar, il ne revenait plus. Donc la Guinée va se retrouver sans liquidités. C’est ça qui a amené la création de la monnaie guinéenne. Voilà donc, si jamais nous faisions une conférence nationale, j’ai toujours dit la première personne à être condamnée c’est le colonisateur  Français, parce qu’on nous a  imposé une situation inadmissible. Nous avons osé prendre l’Indépendance, mais la Guinée n’a pas plongé grâce à la coopération de la Chine et de l’URSS à l’époque. Mais l’Union Soviétique a repris pour faire le barrage de Konkouré avant le barrage d’Assouan en Egypte.

Mais lorsque la classe des travailleurs a voulu, les enseignants ont présenté un mémorandum qui n’était constitué  que de revendications justes, on a crié au complot communiste. On a chassé les Russes, eux aussi ont abandonné le barrage de Konkouré. Sinon  on aurait eu le barrage avant le Ghana qui a Akossombo. Voilà les vérités. Mais lorsque la deuxième République est venue, on a dit aussi ah  l’économie étatique etc. etc. Il faut privatiser, il faut privatiser. On voulait privatiser dans un pays où il n’y a pas de riches. Les gens qui peuvent acheter. Lorsque Chirac a voulu privatiser en France, Balladur le ministre de l’économie a violé les règles du système capitaliste.  Les règles du capitaliste. Un système capitaliste ça veut dire, quand tu veux vendre une usine privatisée,  c’est le mieux disant qui doit l’emporter. Mais qu’est ce qu’il a fait pour que les entreprises françaises ne soient pas contrôlées par les étrangers. Il a fait ce qu’on appelle le noyau dur, c’est-à-dire, il a dit  les 33 pour cent des actions doivent être réservées aux entreprises françaises. Ce qui est contraire à la loi capitaliste. Et il a eu raison parce qu’il a voulu protéger l’industrie française. Qu’est ce que nous on a fait, on va privatiser. Aller l’état n’intervient plus. C’est privatisé, ça veut dire passer de l’économie où l’usine appartenant à l’Etat, à l’usine appartenant aux nationaux.  Quel est le national qui pouvait acheter les usines ? I n’y en avait pas. On n‘a pas privatisé, on a… c’est-à-dire, on a transféré les patrimoines à des étrangers. Et ces enquêtes qu’ils ont faites. Quelques mois après aucune usine ne marchait. La première République avait laissé plus de cent usines, ou sont ces usines, elles sont toutes fermées, pourquoi ? Qui est responsable ? Il faudrait situer les responsabilités. Lorsque j’étais député le ministre de l’Industrie et du commerce a dit publiquement, l’Etat n’investira jamais, ne créera jamais l’usine, j’ai dit monsieur le ministre, n’ayez  pas si peur du Fonds monétaire international.  Soyez un peu plus courageux, si vous dites que l’Etat ne va pas créer l’usine ; c’est des privés et si n’y a pas de privés pour créer les usines, qui va créer les Usines. U gouvernement intéressant qu’est ce qu’il fait ? Il y a des investissements qui ne sont pas rentables finalement. Aucun privé ne va le faire, pas financièrement, quels sont les investissements qui sont rentables économiquement mais pas financièrement. »  A suivre.

Alpha Amadou Diallo (L’Indépendant)

*Le titre de l’article original est: Face aux « couacs » de sa gouvernance : Le chef de l’Etat se défausse sur ses ministres

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